APRÈS L’OMBRE
De Stéphane Mercurio
Documentaire français (2017)
Le théâtre au service de la réinsertion
Un voyage au cœur d’une réalisation théâtrale avec des anciens détenus. Une parole qui transperce les murs de la prison.
Film proposé par l’ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture avec débat avec Eric Jayat, ancien détenu, acteur du film et Agnès Bussat, service prison Secours Catholique et animé par Anne Le Cor, ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture).
Film à Aubagne (Cours Maréchal Foch) au Cinéma Le Pagnol (tarif cinéma).
SYNOPSIS ET DÉTAILS
Une longue peine, comment ça se raconte ?
C’est étrange ce mot qui signifie punition et chagrin en même temps.
Ainsi s’exprime Didier Ruiz lorsqu’il entreprend la mise en scène de son dernier spectacle monté avec d’anciens détenus de longue peine. Dans le temps suspendu des répétitions on voit se transformer tous ces hommes – le metteur en scène y compris.
Le film raconte la prison, la façon dont elle grave dans les chairs des marques indélébiles et invisibles.
Il saisit le travail rigoureux d’un metteur en scène avec ces comédiens « extraordinaires ».
Et surtout il raconte un voyage, celui qui va permettre à cette parole inconcevable de jaillir de l’ombre pour traverser les murs.
Un univers familier
Ce n’est pas la première fois que la réalisatrice Stéphane Mercurio pose sa caméra dans le monde carcéral. En 2008, elle signe A côté qui s’intéresse aux familles de prisonniers qui viennent au parloir et plus particulièrement aux femmes de prisonniers. Quatre ans plus tard, elle réalise A l’ombre de la république, qui lui a permis de pénétrer au coeur de l’enfermement, dans les quartiers disciplinaires, les cours de prison, les cellules, … Elle y rencontre des prisonniers purgeant de longues peines. Marquée par cette expérience, elle décide de s’intéresser à « l’après prison ». Grâce à Bernard Bolze, cofondateur de l’OIP (Observatoire International des Prisons), elle entre en contact avec le metteur en scène de théâtre Didier Ruiz qui allait commencer à collaborer avec d’anciens détenus sur une pièce intitulée Une longue peine.
Les prisonniers
Aucun casting n’a été effectué pour choisir les prisonniers, comme le précise la réalisatrice : « Didier [Ruiz] a pris les gens avec lesquels, il était possible de travailler : ceux qui avaient reçu du juge l’autorisation de changer de région – puisque certains étaient encore sous contrôle judiciaire, ceux qui en avaient envie, ceux qui étaient disponibles pour participer à cette aventure et que leur travail n’empêcherait pas de faire la tournée. »
La thématique
Au-delà d’être un film sur la prison, Après l’ombre aborde également le collectif, la confiance mais aussi la libération de la parole, un sujet cher à la réalisatrice : « Prendre cette parole a eu très certainement pour certains d’entre eux un rôle important dans la confiance en soi, l’estime de soi tellement mise à mal par l’incarcération. »
Une caméra invisible
Les prisonniers, qui n’avaient jamais joué la comédie, se sont retrouvés à participer à une pièce de théâtre dans laquelle ils racontent leur propre histoire. Le défi était double pour eux car ils étaient suivis par l’équipe du film. Pourtant, la caméra a vite su se faire oublier, comme le précise la réalisatrice : « Ils étaient si absorbés par leur travail. Ils savaient qu’on était là bien sûr, mais ils nous oubliaient. »
Occulter les crimes
La réalisatrice a fait le choix de ne pas dévoiler les raisons exactes de l’incarcération des prisonniers afin de ne pas polluer la réflexion sur la prison : « Le motif de la condamnation risque de dévorer toute la pensée autour de la prison : on le juge grave, ou pas si grave que cela. Chacun a son échelle de valeur mais la question n’est pas là. Il faut se demander : doit-on être traité de la sorte en prison ? Les durées des peines sont-elles justifiées ? Que fabrique la prison ? De toute manière, ces hommes ont été condamnés, ils ont purgé leur peine. »
Un débat primordial
La réalisatrice estime que « La réflexion politique sur la prison est très pauvre, désespérante. Les politiques répondent aux peurs par toujours plus d’emprisonnement. Les chiffres explosent, les durées des peines ont doublé. Le nombre de détenus aussi et on voit que la prison devient impossible aussi pour le personnel pénitentiaire. (…) Il est admis que la prison ne permet pas de se réinsérer. Les études sur cela sont innombrables. Je crois que la prison fabrique la violence de demain. »
La prison en quelques chiffres
En France, aucune mesure n’instaure un minimum légal d’activités proposées aux prisonniers. 80 811 personnes sont détenues dont un surnombre de 10 549 prisonniers. 115 suicides ont été recensés en 2015 et 80% des prisonniers présentent des pathologies psychiatriques.
http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=261325.html
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Quatre anciens détenus répètent une pièce de théâtre qui retrace leur histoire… Un documentaire émouvant sur les vertus de la parole et de l’art.
Quatre hommes et une femme. Eux ont été condamnés à de lourdes peines, qu’ils ont, pour la plupart, accomplies jusqu’au bout : quatorze ans pour l’un, trente-cinq pour l’autre. On ne saura rien des délits qu’ils ont commis : Après l’ombre n’est pas un film qui rejuge ni recondamne. A leurs côtés, une femme. Elle, qui a longtemps partagé la vie d’un détenu, rappelle les héroïnes anonymes de Stéphane Mercurio dans A côté (2008), attendant, au parloir, de rendre visite à leur fils, leur époux, leur père emprisonné. Ici, la réalisatrice n’est qu’un regard qui s’accorde le mieux possible à celui du metteur en scène de théâtre Didier Ruiz, en train de répéter Une longue peine, un spectacle où ces cinq témoins se racontent… Ce qu’elle surprend, c’est ce qui se passe en coulisses : la réserve soudaine d’un des participants à vouloir monter sur scène. Les incessants va-et-vient, durant les pauses, d’un autre, comme s’il était encore en cellule. La panique d’un troisième à l’idée d’être touché, le temps d’une danse, tant il redoute le moindre contact physique. « Ça va où les larmes quand on ne pleure plus ? » se demande soudain Annette…
Et puis il y a André, qui raconte comment il avait pris l’habitude, durant son incarcération, de se couper les veines, pour se retrouver à l’infirmerie et changer d’air… Et Eric, qui, un jour, par désespoir, s’est détruit les dents « avec une fourchette et un couteau à bout rond ». Il évoque presque paisiblement les heures où il a creusé, cassé, extrait… Le film ne milite que pour la dignité que l’on doit à tout être, même coupable, qui se retrouve en prison. Il est simple, sobre et beau.
Synopsis
Une longue peine, comment ça se raconte ? C’est étrange ce mot qui signifie punition et chagrin en même temps. Ainsi s’exprime Didier Ruiz lorsqu’il entreprend la mise en scène de son dernier spectacle monté avec d’anciens détenus de longue peine. Dans le temps suspendu des répétitions on voit se transformer tous ces hommes – le metteur en scène y compris. Le film raconte la prison, la façon dont elle grave dans les chairs des marques indélébiles et invisibles. Il saisit le travail rigoureux d’un metteur en scène avec ces comédiens « extraordinaires ». Et surtout il raconte un voyage, celui qui va permettre à cette parole inconcevable de jaillir de l’ombre pour traverser les murs.
https://www.telerama.fr/cinema/films/apres-lombre,n5394940.php
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Un bouleversant documentaire sur le traumatisme carcéral, autant qu’un dispositif subtil sur les rapports entre l’art dramatique et le réel.
L’argument : Une longue peine, comment ça se raconte ? C’est étrange ce mot qui signifie punition et chagrin en même temps. Ainsi s’exprime Didier Ruiz lorsqu’il entreprend la mise en scène de son dernier spectacle monté avec d’anciens détenus de longue peine. Dans le temps suspendu des répétitions on voit se transformer tous ces hommes – le metteur en scène y compris. Le film raconte la prison, la façon dont elle grave dans les chairs des marques indélébiles et invisibles. Il saisit le travail rigoureux d’un metteur en scène avec ces comédiens « extraordinaires ». Et surtout il raconte un voyage, celui qui va permettre à cette parole inconcevable de jaillir de l’ombre pour traverser les murs.
Notre avis : Après l’ombre est le troisième documentaire que la réalisatrice Stéphane Mercurio consacre à l’univers carcéral. Cette fois, il ne s’agit pas de filmer la prison (A l’ombre de la République) ou un lieu d’accueil de familles de prisonniers (A côté) mais de cerner la difficile réinsertion de détenus ayant purgé une longue peine. Le trauma qui pollue la liberté retrouvée d’André, Eric, Alain et Louis, a en quelque sorte été exorcisé par l’expérience théâtrale que leur a fait partager le metteur en scène Didier Ruiz, fondateur de La compagnie des hommes. Le projet a été de leur donner la parole afin qu’ils élaborent un spectacle où ils racontent plusieurs passages éprouvants de leur incarcération. S’est jointe au groupe Annette, épouse de prisonnier, pour qui l’expérience s’avère être aussi une catharsis. La réalisatrice filme ainsi l’élaboration du processus de création de la pièce, et les répétitions de ces comédiens « non professionnels » jouant leurs propres rôles dans une alternance de monologues.
Le film de Stéphane Mercurio n’est pas seulement un outil de réflexion passionnant sur les failles et les absurdités du système pénitentiaire qui, tel qu’il est assuré en France et dans multiples pays, engendre un cercle vicieux de frustrations et de violences et n’aide en rien à réintégrer l’individu déviant et délinquant. Et la parole protagonistes qui témoignent est éloquente sur le sujet : c’est un prisonnier étiqueté dangereux que l’on conduit sur la tombe de son fils avec des menottes, et tenu en laisse ; c’est cet autre qui se mutile en s’arrachant les dents avec un tournevis, suite à des caries non soignées ; c’est Annette apportant un tupperware de salade au saumon fumé au parloir de Louis le soir de Noël, mais contrainte d’en verser le contenu dans un sachet en plastique, transformant son repas de fête en nourriture pour chien ; c’est cet autre expliquant comment il a introduit des amantes au parloir, les faisant passer pour des cousines. Les dialogues ne sont ni larmoyants ou revanchards, et vont révéler qu’au-delà de leur passé et de leur douleur en commun, tous se seront transformés par cette parole libérée.
Après l’ombre n’est donc pas seulement un documentaire bienveillant sur une réinsertion retrouvée, mais aussi un film subtil sur les rapports entre le théâtre et le vécu, La compagnie des hommes procurant à ces hommes et cette femme une recomposition psychologique et sociale bien plus efficace que maintes analyses, en plus de leur faire côtoyer un univers qu’ils ne connaissaient pas. Mais la mise en abyme est à un double niveau, le 7e art venant s’immiscer à travers la caméra de la réalisatrice, discrète mais présente : « Je ne devais pas me mettre à la place du spectateur de théâtre, ni à celle de Didier. Il fallait que je me décale pour éviter la redite de ce quelque chose qui est bien plus fort que sur scène, en direct », a déclaré la réalisatrice. Sa proposition de cinéma est des plus palpitantes.
https://www.avoir-alire.com/apres-l-ombre-la-critique-du-film
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« Après l’ombre » : retour sur la vie en détention
La réalisatrice Stéphane Mercurio a recueilli les témoignages d’anciens prisonniers qui racontent une vie brutale et déshumanisante.
L’avis du « Monde » – à voir
Après avoir consacré son premier long-métrage (A côté, 2007) aux témoignages de compagnes de détenus qui attendaient l’heure du parloir, Stéphane Mercurio poursuit sa réflexion sur le système pénitentiaire français raconté par ceux qui le subissent. Dans Après l’ombre, la documentariste suit le metteur en scène Didier Ruiz alors en pleine répétition de sa pièce où d’anciens détenus de longue peine et la compagne d’un ancien prisonnier reviennent sur leur quotidien en prison ou auprès d’un détenu.
A travers leurs témoignages, c’est l’histoire d’un système pénitencier brutal et déshumanisant qui se raconte et qui affecte chaque strate de l’intimité : la vie de famille, la sexualité, la santé physique et mentale. Sans jamais tomber dans le misérabilisme, Après l’ombre, et avec lui, la pièce de Didier Ruiz, est là comme un écrin venant recueillir les souvenirs de ces hommes meurtris mais toujours infiniment dignes.
Une évidente portée politique
Emouvant, le film n’en est pas moins aussi un document précieux sur les conditions de détention des prisonniers de longue peine. On apprend ainsi comment un détenu se débrouillait pour pouvoir mener un semblant de vie sexuelle en passant par les petites annonces d’un journal, ou comment beaucoup d’entre eux se sont vus refuser une permission pour assister aux obsèques de leurs proches.
Lors d’une séquence où les anciens détenus travaillent avec une chorégraphe, l’un d’eux s’arrête et avoue ne pas pouvoir supporter d’être touché depuis trente ans, trop habitué à l’être « pour et par la violence ». D’un dispositif simple et ténu, Stéphane Mercurio tire un film juste et d’une évidente portée politique.
www.docks66.com/distribution/apres-lombre
Dans le cadre des Rencontres cinématographiques des Droits de l’Homme