ANTONIO MACHADO (1875-1939), ECRIVAIN ESPAGNOL, LITTERATURE, LITTERATURE ESPAGOLE, POEME, POEMES, POESIES, VOYAGEUR, IL N'Y A PAS DE CHEMIN

Voyageur, il n’y a pas de chemin

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le chemin se fait en marchant

Jamais je n’ai cherché la gloire
Ni voulu dans la mémoire des hommes
Laisser mes chansons
Mais j’aime les mondes subtils
Aériens et délicats
Comme des bulles de savon.

J’aime les voir s’envoler,
Se colorer de soleil et de pourpre,
Voler sous le ciel bleu, subitement trembler,
Puis éclater.

À demander ce que tu sais
Tu ne dois pas perdre ton temps
Et à des questions sans réponse
Qui donc pourrait te répondre ?

Chantez en cœur avec moi :
Savoir ? Nous ne savons rien
Venus d’une mer de mystère
Vers une mer inconnue nous allons
Et entre les deux mystères
Règne la grave énigme
Une clef inconnue ferme les trois coffres
Le savant n’enseigne rien, lumière n’éclaire pas
Que disent les mots ?
Et que dit l’eau du rocher ?

Voyageur, le chemin
C’est les traces de tes pas
C’est tout ; voyageur,
il n’y a pas de chemin,
Le chemin se fait en marchant
Le chemin se fait en marchant
Et quand tu regardes en arrière
Tu vois le sentier que jamais
Tu ne dois à nouveau fouler

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Antonio Machado, poète espagnol (1875-1939). Poème extrait de Champs de Castille précédé de Solitudes, Galeries et autres poèmes et suivi de Poésies de la guerre. Trad. de l’espagnol par Sylvie Léger et Bernard Sesé. Préface de Claude Esteban
Collection Poésie/Gallimard (n° 144), 312 pages  Édiions GALLIMARD (13/01/1981) 

ANTONIO MACHADO (1875-1939), ECRIVAIN ESPAGNOL, LITTERATURE, LITTERATURE ESPAGOLE, MARCHEUR IL N'Y PAS DE CHEMIN, POEME, POEMES, POESIES

Marcheur il n’y a pas de chemin (Antonio Machado)

Caminante no hay camino

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Caminante, no hay camino

Todo pasa y todo queda,

pero lo nuestro es pasar,

pasar haciendo caminos,

caminos sobre el mar.

Nunca persequí la gloria,

ni dejar en la memoria

de los hombres mi canción;

yo amo los mundos sutiles,

ingrávidos y gentiles,

como pompas de jabón.

Me gusta verlos pintarse

de sol y grana, volar

bajo el cielo azul, temblar

súbitamente y quebrarse…

Nunca perseguí la gloria.

Caminante, son tus huellas

el camino y nada más;

caminante, no hay camino,

se hace camino al andar.

Al andar se hace camino

y al volver la vista atrás

se ve la senda que nunca

se ha de volver a pisar.

Caminante no hay camino

sino estelas en la mar…

Hace algún tiempo en ese lugar

donde hoy los bosques se visten de espinos

se oyó la voz de un poeta gritar

“Caminante no hay camino,

se hace camino al andar…”

Golpe a golpe, verso a verso…

Murió el poeta lejos del hogar.

Le cubre el polvo de un país vecino.

Al alejarse le vieron llorar.

“Caminante no hay camino,

se hace camino al andar…”

Golpe a golpe, verso a verso…

Cuando el jilguero no puede cantar.

Cuando el poeta es un peregrino,

cuando de nada nos sirve rezar.

“Caminante no hay camino,

se hace camino al andar…”

Golpe a golpe, verso a verso.

Marcheur il n’y a pas de chemin

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Marcheur, il n’y a pas de chemin

Tout passe et tout reste

Mais notre truc c’est de passer

Passer en créant des chemins

Chemins sur la mer

Je n’ai jamais poursuivi la gloire

Ni laissé dans la mémoire

Des hommes ma chanson ;

Moi j’aime les mondes subtils,

Légers et gentils,

Comme des bulles de savon

J’aime les voir se peindre

De soleil et graine, voler

Sous le ciel bleu, vibrer

Subitement et se briser

Je n’ai jamais poursuivi la gloire

Marcheur, ce sont tes traces

Le chemin et rien de plus ;

Marcheur, il n’y a pas de chemin

Le chemin se crée en marchant

En marchant se crée le chemin

Et en tournant les yeux derrière

On voit le sentier qui jamais

Ne doit de nouveau être foulé

Marcheur, il n’y a pas de chemin

Sinon celui des étoiles dans la mer…

Ça fait un temps que dans ce lieu

Où aujourd’hui les forêts se vêtissent d’aubépines

On a entendu la voix d’un poète crier :

« Marcheur, il n’y a pas de chemin,

Le chemin se crée en marchant… »

Coup par coup, vers par vers…

Le poète est mort loin du foyer.

Le couvre la poussière d’un pays voisin.

En s’éloignant ils l’ont vu pleurer.

« Marcheur, il n’y a pas de chemin,

Le chemin se crée en marchant… »

Coup par coup, vers par vers

Quand le chardonneret ne peut chanter.

Quand le poète est un pèlerin,

Quand il ne sert à rien de prier.

« Marcheur il n’y a pas de chemin

Le chemin se crée en marchant… »

Coup par coup, vers par vers.

Antonio Machado

Antonio Machado 

 

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Antonio Machado est né le 26 juillet 1875 à Séville (Espagne). Il est mort le 22 février 1939 à Collioure (France).

 Antonio Machado est un des poètes de langue castillane les plus reconnus aujourd’hui. Son oeuvre prolifique se caractérise par la simplicité du langage et l’exactitude des tournures. Il fut un des membres phares du courant littéraire de la « génération de 98 ».

Antonio Machado est né à Séville en 1875. En 1883, il déménage à Madrid avec sa famille. Il montre très tôt des dispositions pour l’écriture, encouragées par ses professeurs, ainsi que son frère aîné, également poète. Son père décède alors qu’il n’a que 17 ans. Antonio Machado vit alors de petits boulots. À 24 ans, il suit son frère à Paris. Il fréquente les écrivains célèbres de l’époque : Jean Moréas, Paul Fort, Rubén Darío et Oscar Wilde. En 1903, il publie son premier recueil de poèmes, Solitudes, où pointe déjà la rêverie mélancolique qui caractérisera toutes ses œuvres .

Puis il retourne en Espagne, où il devient professeur de français. En 1909, il épouse Leonor Izquierdo Cuevas, âgée de 15 ans à peine. La jeune fille décède trois ans plus tard de la tuberculose. Antonio Machado est douloureusement touché par la mort de son épouse. Il quitte Soria, où le couple s’était installé, et voyage. Le recueil Champs de Castille, publié en 1912, célèbre les paysages de la province de Soria, et évoque la jeune femme emportée trop tôt. Antonio Machado s’installe finalement à Madrid. Il enseigne le français, compose des pièces de théâtre en collaboration avec son frère, et publie des essais. Il est élu à l’Académie espagnole en 1927. Lorsque la guerre civile éclate, en 1936, il se réfugie avec sa mère et son oncle à Rocafort puis à Barcelone. Fatigué par ces voyages, Antonio Machado décède en 1939, alors qu’il tente de rejoindre la France. Sa mère meurt quelques jours après lui.