FILM LE PAPE FRANÇOIS, UN HOMME DE PAROLE, FILMS, FRANÇOIS (pape), WIM WANDERS (1945-....)

Retour sur le film François, un homme de parole de Wim Wenders

Francois-homme-parle-Photo-extraite-Wim-Wenders-UPI_0_729_394

Dans cet article Brunot Frappat revient sur le film François, un homme de parole pour répondre aux journalistes qui simplifient souvent à outrance la parole du Pape et ainsi la déforme.

Parole

 

Incroyable nouvelle dans le ciel assombri et terrifiant de l’actualité médiatique où surabondent le mensonge et la malfaisance : il y a sur terre au moins un homme qui parle vrai. Il sait s’adresser à nous tous avec simplicité, humour et vérité. Il parle simplement des choses simples qui nous concernent tous : la vie, la mort, la nature, la justice, la pauvreté, l’argent, la souffrance, les valeurs morales, la famille.

Ce sage caché ordinairement derrière le rideau des apparences dominantes, à quoi se résume trop souvent la vie contemporaine, est le pape François. Nous pensons le connaître depuis des années que nous l’admirons, mais le voici en gros plan grâce à Wim Wenders. Ce « Saint-Père » crève l’écran du cinéma et transforme les salles obscures en espaces de lumière et de joie (1). Le jour où nous avons vu ce film formidable, à la fin de la séance, le public a applaudi.

Il a applaudi comme poussé par un irrépressible soulagement. Enfin ! Enfin, on lui donnait sa chance au contraire des « petites phrases scandaleuses » sorties de leur contexte par des journalistes mal intentionnés ou trop pressés. Enfin, la nuance avait droit de cité dans un univers dominé par le diktat du « faire court », où le simplisme est devenu une loi commune et le « bien commun », une bizarrerie inaccessible et clandestine, jamais évoquée. Dans un paysage médiatique, surtout, globalement hostile aux « cathos » et à tout ce à quoi ils sont supposés ressembler. Cathos réacs, coincés dans leurs lodens, encombrés de poussettes, raidis par les principes enseignés par des prêtres dont beaucoup d’anciens pédophiles, et qui feraient mieux de se marier avant de donner des conseils aux couples modernes, notamment pour l’éducation des enfants.

Le vent de sarcasmes et de diableries qui accompagne en général la moindre évocation des catholiques et de leur présence dans la société donne l’idée d’une nouvelle obligation déontologique à imposer à l’ensemble des confrères qui écrivent sur l’actualité : l’obligation de voir le film de Wim Wenders avant de dire un mot. On ne leur demande pas d’adhé­rer mais de se renseigner sur ce que dit le pape sur la dictature de l’argent, sur le scandale des inégalités, sur la défense de la Création, sur la fraternité universelle, sur les migrants, sur les méfaits du cléricalisme. Une fois pris conscience de ce que dit vraiment le pape de tout cela, nos confrères tremperont leurs plumes dans l’encre de l’intelligence renseignée plutôt que dans celle de la moquerie gratuite et des automatismes du préjugé. Voir ce film devrait relever du devoir d’État. Doublé, rassurez-vous, d’un vrai plaisir lié à l’humour de ce pape qui affirme : ce qui manque le plus à l’Église, ce sont souvent l’humilité et l’humour.

Humour

Il y a dans le film des images d’archives saisissantes. Notamment la grande scène où François passe à la Curie un mémorable savon sur les péchés de cette institution ossifiée, de l’orgueil au goût du pouvoir en passant par l’absence d’humour, justement. La caméra nous montre de près une galerie de visages de « princes de l’Église » comme on ne devrait plus appeler ces vieux messieurs tancés comme des collégiens. Les visages sont durs, flasques, les traits avachis, abîmés par les ans, les regards sont sévères et peu amènes : ils n’ont pas souri depuis des décennies. Pas une esquisse de bienveillance, pas un seul signe d’approbation. Cette incroyable scène rappelle celle du film de Nanni Moretti Habemus papam où les participants du conclave sont présentés de la même façon hilarante et cruelle.

L’humour n’est certes pas la qualité dominante de ce que l’on entend le dimanche tomber du ciel de sermons sans joie. Mais l’humour ne se commande pas, il y faut une complexion particulière des esprits et des cœurs, il y faut une légèreté de l’âme et de l’être, la liesse d’exister, un rapport enjoué avec le réel, une empathie avec les gens et avec les choses. Il faut aimer son monde pour en sourire. Le pape François a tout cela en abondance, il est doté de cette richesse intérieure visible à l’extérieur qui nous le rend tellement sympathique et vrai qu’on se demande pourquoi il reste le grand méconnu de notre temps parmi tant de forbans qui font l’actualité et s’agitent sur l’avant-scène dans des postures grotesques. Ses paroles sont de puissants viatiques pour accompagner nos vies. Mais le sait-on ?

Bunot Frappat dans La Croix

 

FILM LE PAPE FRANÇOIS, UN HOMME DE PAROLE, FILMS, PAPE FRANÇOIS, UN HOMME DE PAROLE, WIM WANDERS (1945-....)

Film : Le Pape François, un homme de parole de Wim Wanders

0230752.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxx

Le Pape François : un homme de parole

de Wim Wenders

Distribution Universal Pictures International
Sélection officielle, hors compétition, au Festival de Cannes 2018

Sortie : Septembre 2018. 1h35

 

Une catéchèse avec le Pape François

 

Ce film de Wim Wenders sort sur les écrans au moment où l’Eglise vit un moment difficile à cause des affaires de pédophilie. Bie sûr le  les esprits chagrins pourront dire que ce film vient bien à propos pour redorer le blason du Pape ou de l’Eglise, où qu’il ne peut s’adresse qu’aux catholiques convaincus par avance. Il est vrai que produit à la demande du Vatican certains l’ont vu comme un film de propagande. Et si l’on allait pour une fois plus avant en quittant nos certitudes pour vraiment voir et écouter celui qui comme le Pauvre d’Assise a la volonté de « rebâtir » l’Eglise du Christ dans le souffle toujours nouveau de l’Esprit Saint.

Cependant au-delà de ses considérations on peut en faire une autre lecture tant l’actualité nous montre combien la parole du Pape sonne juste. Tout au long de cette une heure trente l’on comprend mieux pourquoi  le cardinal Jorge Mario Bergoglio a choisi le nom de François en référence à saint François d’Assise, même si on peut regretter le choix des extraits du film sur le Poverello d’Assise (que l’on se rappelle les Onze  fioretti de saint François d’Assise de Rossellini). C’est bien dans cet esprit que l’on voit le Pape François s’adresser à chaque spectateur comme si il voulait s’adresser à chacun de nous en particulier.

Au lieu d’un plaidoyer pro domo pour lui-même ou pour l’Eglise on peut dire que le Pape nous invite à une catéchèse, une catéchèse soutenue par les images fortes choisies par le réalisateur. On retrouve les thèmes favoris de François : une Eglise non pas triomphante mais pauvre, le primat pour les prêtres d’être de vrais pasteurs et non des hommes de pouvoir, l’insistance sur l’écologie pour sauvegarder « notre maison commune » la « Terre Mère », la justice sociale, le rôle de la famille. (Il rappelle ce qu’il nomme les trois T. : T. comme Terre ; T. : comme Toit ; T. : comme travail). Il développe aussi des idées fortes : une volonté ferme de « construire des ponts » et non des murs, l’accueil de l’autre (l’étranger qui vient aux portes des pays riches pour fuir la guerre ou la pauvreté, le pécheur aussi !).

A travers les images de ses voyages (à Lampedusa, aux Philippines, en Amérique latine), des extraits de discours (aux membres de la Curie, au Congrès américain, à l’ONU) le Pape ne craint pas de dénoncer les maux de notre temps, comme il ne craint pas de dire la vérité aux grands de ce monde  : la corruption par l’argent, le commerce des armes, le pillage de la planète par les multinationales qui aggravent la pauvreté des plus faibles). Mais au cours de ses voyages et dans ses paroles il adresse un message de compassion et d’espérance que ce soit envers les étrangers, les victimes de catastrophes naturelles, les habitants des favellas d’Amérique latine ou les prisonniers des prisons

En fin de compte à travers des mots simples  c’est un langage simple qu’il nous adresse ; point n’est n’est besoin d’avoir fait de longues études de théologie pour le comprendre tant ses paroles s’adressent à tout un chacun. Mais c’est aussi une parole radicale pour inviter chacun à la conversion du cœur pour mettre ses pas dans l’Evangile du Christ. On peut donc sans hésitation continuer cette conversation avec le Pape François en reprenant son encyclique Laudato si’ ou son exhortation apostolique Gaudete et exulstate où il lance un appel à la sainteté.

Un surprise à la fin où François avoue qu’après la prière des Laudes il reprend chaque jour la prière de saint Thomas More pour demander l’humour dont voici le texte intégral .

« Donne-moi une bonne digestion, Seigneur, et aussi quelque chose à digérer.
Donne-moi la santé du corps, avec la bonne humeur pour la garder au mieux,
Donne-moi une âme sainte, Seigneur, qui ait les yeux sur la beauté et la pureté, afin qu’elle ne s’épouvante pas en voyant le péché, mais qu’elle trouve dans Ta présence la voie pour redresser la situation.
Donne-moi une âme qui ignore l’ennui, le gémissement et le soupir, et ne permets pas que je me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j’appelle « moi ».
Seigneur, donne-moi l’humour, Concède-moi la grâce de comprendre la plaisanterie, pour que je tire quelque bonheur de cette vie et que j’en fasse profiter les autres. Ainsi soit-il ».

Thomas More (1478-1535).

On peut retrouver tous ces thèmes dans le livre d’entretien que François a eu avec Dominique Wolton

François (Pape). – Politique et société : rencontres avec Dominique Wolton. – Paris, Editions de l’Observatoire. 2017. 417 pages.

 

En définitive un film à voir et à proposer ! Laissons-nous bousculer  et sortons de nos sentiers battus, de nos certitudes, de notre confort intellectuel et purement matériel et écoutons cette parole jusqu’au bout !

  

©Claude-Marie T.

Dimanche 16 septembre 2018.

  

La biographie de Wim Wenders 

(source Allo Ciné)

Wim_Wenders_Berlinale_2015

Wim Wanders est né l 14 août 1945 à Düsseldorf en Allemagne. Ayant grandi à Coblence et Oberhausen, il commence des études de médecine et de philosophie, mais les interrompt pour aller passer un an à Paris, où il fréquente assidûment la Cinémathèque. En 1967, il entre à l’Ecole supérieure du cinéma et de la télévision, à Munich. Parallèlement, il écrit des critiques de films pour le journal Süddeuttsche Zeitung et la revue Kritik. Il termine sa formation en tournant en 1970 Un été dans la ville,, qui n’a jamais pu être distribué pour des raisons de droits musicaux.

Pour son deuxième long métrage, il adapte un roman de Peter Handke, L’Angoisse du gardien de but au moment du penalty,, qui marque le début d’une fructueuse collaboration avec l’écrivain, ainsi qu’avec l’acteur Rüdiger Vogler.. Wenders signe ensuite une « trilogie du voyage », composée des road movies contemplatifs Alice dans les villes, Faux mouvements et Au fil du temps et , un film en noir et blanc de trois heures qui lui vaut sa première sélection au Festival de Cannes.

En 1977, Wim Wenders élargit son horizon cinématographique en tournant entre l’Europe et les Etats-Unis L’Ami américain , un thriller tiré de l’œuvre de Patricia Highsmith avec Dennis Hopper dans le rôle de Tom Ripley. Acceptant une commande de Francis Ford Coppola,   il réalise Hammett,  , un hommage au célèbre auteur de polars. Mais cet amateur de littérature est également un cinéphile averti. Il le prouve en co-dirigeant Nick’s movie (1980), une déclaration d’amour au cinéma d’Ozu, et, plus tard, Par delà les nuages (1995), sur lequel il sera l’assistant de luxe du maître Antonioni.

La consécration arrive en 1984 avec Paris, Texas, une émouvante traversée de l’Amérique qui décroche la Palme d’Or au Festival de Cannes, suivi des Ailes du désir, un film-poème sur Berlin qui donnera lieu à une suite tournée après la chute du Mur. Le cinéaste-voyageur, qui sillonna le Portugal pour L’Etat des choses (Lion d’or à Venise en 1982) et Lisbonne story  livre en 1991 Jusqu’au bout du monde, une ambitieuse fable futuriste qui déconcerte les spectateurs.

Au milieu des années 90, Wim Wenders retourne aux Etats-Unis pour mettre en scène des films désenchantés sur l’évolution de la société américaine : le polémique The End of violence   (1997), Land of plenty (2004), une méditation, tournée en DV, sur les conséquences des attentats du 11 septembre 2001, et Dont’t come knoking (2005), un drame sentimental

Passionné de musique, Wim Wenders connaît un triomphe inattendu en 1999 avec son documentaire sur la musique cubaine, Buena Vista Social-Club, et signe quatre ans plus tard The Soul of a man, où il rend hommage à quelques pionniers du blues. La même année il tourne Land of plenty, qui, comme son film suivant, Don’t Come Knocking, tentent de cerner « l’esprit de l’Amérique ». 

Il participe, en 2007, au projet Chacun son cinéma réalisé en l’honneur des 60 ans du Festival de Cannes (mais son film n’est visible que sur le DVD) et revient au Festival l’année suivante pour présenter Rendez-vous à Palerme (jamais sorti en salles) Connaissant de plus en plus de difficultés à monter ses films il se lance pourtant sur un projet ambitieux : un documentaire sur la chorégraphe Pina Bausch où il tente une utilisation novatrice de la 3D. 

Jonglant entre fiction et documentaire, Wim Wenders participe en 2011, à Mundo Invisivel, qui compile les courts-métrages de plusieurs réalisateurs sur le thème de l’invisibilité, et retrace, trois ans plus tard, la vie du photographe Sebastiao Salgado dans Le Sel de la terre.   Le film reçoit le César du Meilleur documentaire 2015. Revenant à la fiction, il réalise avec Charlotte Gainsbourg notamment, une œuvre dramatique Every Thing We Be Fine.