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Dimanche 1er janvier 2023 : Fête de Marie, mère de Dieu : lectures et commentaires

Dimanche 1er janvier 2023 :

Fête de sainte Marie, mère de Dieu

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Commentaires de Marie-Noëlle Thabut,

1ère lecture

Psaume

2ème lecture

Evangile

PREMIERE LECTURE – Livre des nombres, 6, 22-27

22 Le Seigneur parla à Moïse. Il dit :
23 « Parle à Aaron et à ses fils. Tu leur diras :
Voici en quels termes vous bénirez les fils d’Israël :
24 “Que le Seigneur te bénisse et te garde !
25 Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage,
qu’il te prenne en grâce !
26 Que le Seigneur tourne vers toi son visage,
qu’il t’apporte la paix !”
27 Ils invoqueront ainsi mon nom sur les fils d’Israël,
et moi, je les bénirai. »

Voici donc comment les prêtres d’Israël, depuis Aaron et ses fils, bénissaient le peuple au cours des cérémonies liturgiques au Temple de Jérusalem… Formule qui fait partie du patrimoine chrétien désormais : puisque cette phrase du livre des Nombres figure parmi les bénédictions solennelles proposées pour la fin de la Messe. Vous avez remarqué la phrase : « Mon nom sera prononcé sur les enfants d’Israël » ; c’est une façon de parler, puisque, précisément, là-bas, on ne dit jamais le nom de Dieu, pour marquer le respect qu’on lui porte.
On sait à quel point, dans ce monde-là, le nom représente la personne elle-même. Prononcer le nom est un acte juridique marquant une prise de possession, mais aussi un engagement de protection. Quand un guerrier conquiert une ville, par exemple, on dit qu’il prononce son nom sur elle ; et le jour du mariage, le nom du mari est prononcé sur sa femme ; là encore, cela implique appartenance et promesse de vigilance. (A noter que la femme ne porte pas le nom de son mari pour autant).
Quand Dieu révèle son nom à son peuple, il se rend accessible à sa prière. Réciproquement, l’invocation du nom de Dieu constitue normalement un gage de bénédiction. Par voie de conséquence, les atteintes portées au peuple ou au temple de Dieu constituent un blasphème contre son nom, une insulte personnelle. Du coup, nous comprenons mieux la phrase de Jésus : « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ». Sur toutes les personnes que nous rencontrerons cette année, nous pourrons nous dire que Dieu a posé son nom ! Voilà qui nous incitera à les regarder d’un œil  neuf !

Revenons sur la bénédiction du Livre des Nombres. Je vous propose quatre remarques :

Première remarque : la formule des prêtres est au singulier : « Que le SEIGNEUR te bénisse » et non pas : « Que le SEIGNEUR vous bénisse » ; mais, en réalité, il s’agit bien d’Israël tout entier : c’est un singulier collectif. Et, plus tard, le peuple d’Israël a bien compris que cette protection de Dieu ne lui est pas réservée, qu’elle est offerte à l’humanité tout entière.

Deuxième remarque : « Que le SEIGNEUR te bénisse » (v. 24) est au subjonctif ; curieuse expression quand on y réfléchit : est-ce que le Seigneur pourrait ne pas nous bénir ? « Que le SEIGNEUR fasse briller sur toi son visage… Que le SEIGNEUR se penche vers toi… » De la même manière : « Ils invoqueront ainsi mon Nom sur les fils d’Israël, et moi, je les bénirai. » (v. 27). On a envie de demander : sinon il ne les bénirait pas ? Lui qui « fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants », c’est-à-dire sur tous les hommes, Lui qui nous dit d’aimer même nos ennemis… ? Bien sûr, nous connaissons la réponse : nous savons bien que Dieu nous bénit sans cesse, que Dieu nous accompagne, qu’il est avec nous en toutes circonstances.
Et pourtant ce subjonctif, comme tous les subjonctifs, exprime un souhait : mais c’est de nous qu’il s’agit : Dieu nous bénit sans cesse, mais nous sommes libres de ne pas accueillir sa bénédiction… comme le soleil brille en permanence même quand nous recherchons l’ombre… nous sommes libres de rechercher l’ombre… de la même manière, nous sommes libres d’échapper à cette action bienfaisante de Dieu… Celui ou celle qui se met à l’abri du soleil, perd toute chance de bronzer… ce ne sera pas la faute du soleil !
Alors, la formule « que Dieu vous bénisse » est le souhait que nous nous mettions sous la bénédiction de Dieu… On pourrait dire : Dieu nous propose sa bénédiction (sous-entendu : libre à nous de nous laisser faire ou pas). Ce subjonctif, justement, est là pour manifester notre liberté.

Troisième remarque, en forme de question : En quoi consiste la « bénédiction » de Dieu ? Que se passe-t-il pour nous ? Bénir est un mot latin : « bene dicere », « dire du bien »… Dieu dit du bien de nous. Ne nous étonnons pas que Dieu « dise du bien » de nous ! Puisqu’il nous aime… Il pense du bien de nous, il dit du bien de nous… Il ne voit en nous que ce qui est bien. Or la Parole de Dieu est acte : « Il dit et cela fut » (Gn 1). Donc quand Dieu dit du bien de nous, sa Parole agit en nous, elle nous transforme, elle nous fait du bien. Quand nous demandons la bénédiction de Dieu, nous nous offrons à son action transformante.

Quatrième remarque : ce n’est pas pour autant un coup de baguette magique ! Etre « béni », c’est être dans la grâce de Dieu, vivre en harmonie avec Dieu, vivre dans l’Alliance. Cela ne nous épargnera pas pour autant les difficultés, les épreuves comme tout le monde ! Mais celui qui vit dans la bénédiction de Dieu, traversera les épreuves en « tenant la main de Dieu ». « Béni tu le seras, plus qu’aucun autre peuple » promettait Moïse au peuple d’Israël (Dt 7, 14). Le peuple d’Israël est béni, cela ne l’a pas empêché de traverser des périodes terribles, mais au sein de ses épreuves le croyant sait que Dieu l’accompagne.
En cette fête de Marie, mère de Dieu, tout ceci prend un sens particulier. Lorsque l’ange Gabriel envoyé à Marie pour lui annoncer la naissance de Jésus l’a saluée, il lui a dit « Je te salue, pleine de grâce », c’est-à-dire comblée de la grâce de Dieu ; elle est par excellence celle sur qui le nom de Dieu a été prononcé, celle qui reste sous cette très douce protection : « Tu es bénie entre toutes les femmes… »
Cinquième remarque : Malheureusement, le texte français ne nous délivre pas toute la richesse de la formule originelle en hébreu ; cela pour deux raisons. Tout d’abord, le nom de Dieu, YHVH transcrit ici par « le SEIGNEUR », est celui que Dieu a révélé lui-même à Moïse. A lui tout seul, il est une promesse de présence protectrice, celle-là même qui a accompagné les fils d’Israël depuis leur sortie d’Egypte.
Ensuite, la traduction des verbes hébreux par un subjonctif en français est un indéniable appauvrissement. Car le système verbal en hébreu est très différent du français : pour être complet, il faudrait traduire « Le SEIGNEUR te bénit et te garde depuis toujours, il te bénit et te garde en ce moment, et il te bénira et te gardera à jamais. » Telle est bien notre foi !

PSAUME – 66 (67)

2 Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse,
que son visage s’illumine pour nous ;
3 et ton chemin sera connu sur la terre,
ton salut, parmi toutes les nations.

5 Que les nations chantent leur joie,
car tu gouvernes le monde avec justice ;
tu gouvernes les peuples avec droiture,
sur la terre, tu conduis les nations.

6 Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ;
qu’ils te rendent grâce, tous ensemble !
8 Que Dieu nous bénisse,
et que la terre tout entière l’adore !

On ne pouvait pas trouver de plus belle réponse que ce psaume 66 en écho à la première lecture qui nous offrait la superbe formule de bénédiction rapportée par le livre des Nombres : « Que le SEIGNEUR te bénisse et te garde ! Que le SEIGNEUR fasse briller sur toi son visage, Qu’il te prenne en grâce ! Que le SEIGNEUR tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! » Notre psaume est bien dans la même tonalité.

Je vous propose cinq remarques :

Première remarque : sur le sens même du mot « bénédiction » pour commencer. On trouve chez le prophète Zacharie cette phrase : « En ces jours-là, dix hommes de toutes les langues que parlent les nations s’accrocheront à un Juif par le pan de son vêtement en déclarant : « Nous voulons aller avec vous, car nous l’avons appris : Dieu est avec vous. » (Za 8, 23). Voilà une très belle définition de la « bénédiction » : dire que Dieu nous bénit, c’est dire que Dieu nous accompagne, que Dieu est avec nous. C’était, d’ailleurs, le Nom même de Dieu révélé au Sinaï : YHVH, ce Nom imprononçable1 que l’on traduit par « SEIGNEUR ». On ne sait pas le traduire mais nos frères juifs le comprennent comme une promesse de présence permanente de Dieu auprès de son peuple.

Deuxième remarque : Cette fois, c’est le peuple qui appelle sur lui, qui demande la bénédiction de Dieu : « Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse » ; à propos de la formule des prêtres (la bénédiction du livre des Nombres), j’avais insisté sur le fait que nous sommes assurés en permanence de la bénédiction de Dieu, mais que nous sommes libres de ne pas l’accueillir ; quand le prêtre dit « Que le Seigneur vous bénisse », il n’exprime pas le souhait que Dieu veuille bien nous bénir… comme si Dieu pouvait tout d’un coup cesser de nous bénir ! Le prêtre exprime le souhait que nous ouvrions notre cœur  à cette bénédiction de Dieu qui peut, si nous le désirons, agir en nous et nous transformer. La fin de ce psaume le dit très bien : « Dieu, notre Dieu, nous bénit. Que Dieu nous bénisse … » Ces deux phrases ne sont pas contradictoires : Dieu nous bénit sans cesse, c’est une certitude (c’est la première phrase : « Dieu, notre Dieu, nous bénit ») ; pour nous ouvrir à son action, il suffit que nous le désirions (c’est la deuxième phrase : « Que Dieu nous bénisse »).

Troisième remarque : Cette certitude d’être exaucé avant même de formuler une demande est caractéristique de toute prière en Israël. Le croyant sait qu’il baigne en permanence dans la bénédiction, la présence bienfaisante de Dieu. « Je sais que tu m’exauces toujours » disait Jésus (Jn 11).

Quatrième remarque : Le peuple d’Israël ne demande pas cette bénédiction pour lui seul. Car cette bénédiction prononcée sur Israël rayonnera, rejaillira sur les autres : « Béni (est) celui qui te bénit », avait dit Dieu à Abraham ; et il avait ajouté : « A travers toi seront bénies toutes les familles de la terre. » (Gn 12, 3). Dans ce psaume, on retrouve, comme toujours, les deux thèmes entrelacés : d’une part ce qu’on appelle l’élection d’Israël, de l’autre l’universalisme du projet de Dieu ; l’œuvre du salut de l’humanité passe à travers l’élection d’Israël.
L’élection d’Israël est bien présente dans l’expression « Dieu, notre Dieu », qui à elle seule est un rappel de l’Alliance que Dieu a conclue avec le peuple qu’il a choisi. L’universalisme du projet de Dieu est aussi très clairement affirmé : « Ton chemin sera connu sur la terre, ton salut, parmi toutes les nations », ou encore « Que les nations chantent leur joie ». Et d’ailleurs, vous aurez remarqué le refrain répété deux fois qui appelle le jour où tous les peuples, enfin, accueilleront la bénédiction de Dieu : « Que les peuples, Dieu, te rendent grâce ; qu’ils te rendent grâce, tous ensemble ! »
Israël sait qu’il est choisi pour être le peuple témoin : la lumière qui brille sur lui est le reflet de Celui qu’il doit faire connaître au monde. A vrai dire, cette compréhension de l’élection d’Israël comme une vocation n’a pas été immédiate pour les hommes de la Bible. Et c’est bien compréhensible : au tout début de l’histoire biblique, chaque peuple s’imaginait que les divinités régnaient sur des territoires : il y avait les divinités de Babylone et les divinités de l’Egypte et celles de tous les autres pays. C’est seulement au sixième siècle, probablement, que le peuple d’Israël a compris que son Dieu avec lequel avait été conclue l’Alliance du Sinaï, était le Dieu de tout l’univers ; l’élection d’Israël n’était pas abolie pour autant, mais elle prenait un sens nouveau. Le texte de Zacharie, que nous lisions tout à l’heure, est écrit dans cette nouvelle perspective. (« En ces jours-là, dix hommes de toutes les langues que parlent les nations s’accrocheront à un Juif par le pan de son vêtement en déclarant : « Nous voulons aller avec vous, car nous l’avons appris : Dieu est avec vous. » (Za 8, 23)
A notre tour, nous sommes un peuple témoin : chaque fois que nous recevons la bénédiction de Dieu, c’est pour devenir dans le monde les reflets de sa lumière. Voilà un magnifique souhait que nous pouvons formuler les uns pour les autres en ce début d’année : être des vecteurs de la lumière de Dieu pour tous ceux qu’elle n’éblouit pas encore.

Cinquième remarque : « La terre a donné son fruit ; Dieu, notre Dieu, nous bénit. » Parce que la Parole de Dieu est acte, elle produit du fruit. Dieu avait promis une terre fertile où couleraient le lait et le miel. Et Dieu a tenu promesse. A plus forte raison, les Chrétiens relisent ce psaume en pensant à la naissance du Sauveur : quand les temps furent accomplis, la terre a porté son fruit.
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Note
Par respect pour le Nom de Dieu (YHVH, ce que l’on appelle le Tétragramme), et en fidélité à la récente directive romaine, chaque fois que je le rencontre dans un texte de l’Ancien Testament, je le transcris systématiquement en français par le mot « SEIGNEUR » en majuscules.

DEUXIEME LECTURE – Lettre de saint Paul apôtre aux Galates, 4, 4-7

Frères,
4 lorsqu’est venue la plénitude des temps,
Dieu a envoyé son Fils,
né d’une femme
et soumis à la loi de Moïse,
5 afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi
et pour que nous soyons adoptés comme fils.
6 Et voici la preuve que vous êtes des fils :
Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs,
et cet Esprit crie
« Abba ! », c’est-à-dire : Père !
7 Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils,
et puisque tu es fils, tu es aussi héritier :
c’est l’œuvre de Dieu.

Je prends le texte tout simplement en suivant
« Lorsqu’est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils » : nous retrouvons ici un thème très cher à Paul : le thème de l’accomplissement du projet de Dieu. Pour les croyants juifs, puis chrétiens, c’est un élément très important de notre foi : l’histoire n’est pas un perpétuel recommencement, elle est une marche progressive de l’humanité vers son accomplissement, vers la réalisation du « dessein bienveillant de Dieu ». C’est un thème très important dans les lettres de Saint Paul ; et il est, je crois, une bonne clé de lecture pour aborder les lettres de Paul, mais pas lui seulement : en fait, c’est une clé de lecture pour toute la Bible, dès l’Ancien Testament.
Je m’arrête un peu sur ce point : les auteurs du Nouveau Testament prennent bien soin de préciser à plusieurs reprises que la vie, la passion, la mort et la résurrection de Jésus de Nazareth accomplissent les Ecritures. Paul, par exemple, affirme à ses juges : « Moïse et les prophètes ont prédit ce qui devait arriver et je ne dis rien de plus. » (Ac 26, 22). Et Matthieu en particulier aime dire « Tout cela arriva pour que s’accomplisse ce qui avait été dit par le prophète… ». Une question nous vient immédiatement à l’esprit : tout était-il donc écrit d’avance ? En fait, c’est sur le mot « pour » qu’il faut bien s’entendre car il peut avoir deux sens : ou bien un sens de finalité, ou bien seulement un sens de conséquence. Si l’on optait pour le sens de finalité, alors, les événements se seraient produits selon un plan bien défini, prédéterminé. Si on opte pour le sens de conséquence (et c’est, je crois, ce qu’il faut faire), les événements se sont produits de telle ou telle manière et, après coup, nous comprenons comment, à travers ces événements, Dieu a accompli son projet.
Celui-ci n’est donc pas un programme, comme si le rôle de tout un chacun était déjà déterminé par avance. Dieu prend le risque de notre liberté ; et, au long des siècles, les hommes ont bien souvent contrecarré le beau projet. Alors on a pu entendre les prophètes se lamenter ; mais ils n’ont jamais perdu l’espérance ; bien au contraire, ils ont promis à maintes reprises que Dieu ne se lassait pas. Isaïe, par exemple, annonçait de la part de Dieu : « Je dis : Mon dessein subsistera et tout ce qui me plaît, je l’exécuterai. » (Is 46, 10). Et Jérémie n’était pas en reste : « Moi, je sais les projets que j’ai formés à votre sujet – oracle du SEIGNEUR -, projets de prospérité et non de malheur : je vais vous donner un avenir et une espérance. » (Jr 29, 11). Ce que les auteurs du Nouveau Testament contemplent inlassablement, c’est l’accomplissement par Jésus des promesses de Dieu.
« Dieu a envoyé son Fils : né d’une femme, et soumis à la Loi de Moïse » : en quelques mots Paul nous dit tout le mystère de la personne de Jésus : Fils de Dieu, homme comme tous les autres, Juif comme tous les Juifs. L’expression « né d’une femme », pour commencer, est courante dans la Bible ; elle veut dire tout simplement « un homme comme les autres » ; il arrive par exemple que, pour ne pas répéter dans une même phrase le mot « hommes », on le remplace par « ceux qui naissent des femmes » (Si 10, 18 ; Jb 15, 14 ; Jb 25, 4). Jésus lui-même l’a employée en parlant de Jean-Baptiste : « En vérité, je vous le déclare : parmi ceux qui sont nés d’une femme, il ne s’en est pas levé de plus grand que Jean le Baptiste. » (Mt 11, 11 ; Lc 7, 28).1 Quant à l’expression « soumis à la Loi de Moïse », elle signifie qu’il a accepté la condition des hommes de son peuple.
Paul continue « Afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi et faire de nous des fils ». Nous avons déjà rencontré de nombreuses fois le mot « racheter » : nous savons qu’il signifie « libérer », « affranchir ». Dans l’Ancien Testament, le « racheteur » était précisément celui qui affranchissait l’esclave. Ce n’est donc pas la même chose d’être sous la domination de la Loi et d’être fils… Il y a un passage à faire : le sujet de la Loi, c’est celui qui se soumet à des ordres ; il se conduit en esclave. Le fils, c’est celui qui vit dans l’amour et la confiance : il peut « obéir » à son père ; c’est-à-dire mettre son oreille sous la parole du père parce qu’il fait confiance à son père, il sait que la parole du père n’est dictée que par l’amour. Ce qui veut dire que nous passons de la domination de la Loi à l’obéissance des fils.
Ce passage à une attitude filiale, confiante, nous pouvons le faire parce que « L’Esprit du Fils est dans nos cœurs , et il crie vers le Père en l’appelant Abba ! » ce qui veut dire « Père ». Le seul cri qui nous sauve, en toutes circonstances, c’est ce mot « Abba », Père, qui est le cri du petit enfant. Etre sûr, quoi qu’il arrive, que Dieu est un Père pour nous, qu’il n’est que bienveillant à notre égard, c’est l’attitude filiale que le Christ est venu vivre parmi nous, en notre nom. Paul continue : « Tu n’es plus esclave, mais fils, et comme fils, tu es héritier ». Il faut prendre le mot au sens fort ; « héritier », cela veut dire que ce qui est à Lui nous est promis ; seulement, il faut oser le croire… et c’est là notre problème.
Quand Jésus nous traite « d’hommes de peu de foi », peut-être est-ce cela qu’il veut dire : nous n’osons pas croire que l’Esprit de Dieu est en nous, nous n’osons pas croire que sa force est en nous, nous n’osons pas croire que tout ce qui est à lui est à nous ; c’est-à-dire que sa capacité d’amour est en nous.
Sans oublier que nous n’y avons aucun mérite ! Si nous sommes héritiers, c’est par la grâce de Dieu : alors nous commençons à comprendre pourquoi on peut dire que « tout est grâce ».
—————————-
Note
Paul pensait peut-être à ce que le livre de la Sagesse fait dire à Salomon : « Je suis, moi aussi, un homme mortel, égal à tous, descendant du premier qui fut modelé de terre. Dans le ventre d’une mère, j’ai été sculpté en chair. » (Sg 6-7, 1).

EVANGILE – selon Saint Luc, 2, 16-21

En ce temps-là,
16 les bergers se hâtèrent d’aller à Bethléem,
et ils découvrirent Marie et Joseph,
avec le nouveau-né
couché dans la mangeoire.
17 Après avoir vu,
ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé
au sujet de cet enfant.
18 Et tous ceux qui entendirent s’étonnaient
de ce que leur racontaient les bergers.
19 Marie, cependant, retenait tous ces événements
et les méditait dans son cœur.
20 Les bergers repartirent ;
ils glorifiaient et louaient Dieu
pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu,
selon ce qui leur avait été annoncé.
21 Quand fut arrivé le huitième jour,
celui de la circoncision,
l’enfant reçut le nom de Jésus,
le nom que l’ange lui avait donné avant sa conception.

Ce récit apparemment anecdotique est en réalité profondément « théologique ». Ce qui veut dire que tous les détails comptent. Je vous propose de les relire un à un dans l’ordre du texte.
Les bergers, tout d’abord : c’étaient des gens peu recommandables, des marginaux, car leur métier les empêchait de fréquenter les synagogues et de respecter le sabbat. Or ce sont eux qui sont les premiers prévenus de l’événement qui vient de bouleverser l’histoire de l’humanité ! Et ils deviennent de ce fait les premiers apôtres, les premiers témoins : ils racontent, on les écoute, ils étonnent ! Ils racontent cette annonce étrange dont ils ont bénéficié en pleine nuit ; voici le récit de Luc pour cette fameuse nuit : « Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’Ange du Seigneur s’approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte, mais l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmaillotté et couché dans une mangeoire. Et soudain, il y eut avec l’ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime. » (sous-entendu parce que Dieu les aime). Ils racontent tout cela, avec leurs mots à eux ; et on ne peut s’empêcher de penser à une fameuse phrase de Jésus, une trentaine d’années plus tard : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Lc 10, 21-22 ; Mt 11, 25). Cela a commencé dès le début de sa vie.
Tout ceci se passe dans le petit village de Bethléem : tout le monde le savait à l’époque, c’est la ville qui devait voir naître le Messie, dans la descendance de David. Bethléem, c’est aussi la ville dont le nom signifie littéralement « la maison du pain » et le nouveau-né est couché dans une mangeoire : belle image pour celui qui vient se donner en nourriture pour l’humanité.
« Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son coeur. » A l’inverse des bergers que l’événement rend bavards, Marie contemple et médite dans son cœur ; Luc veut-il faire ici un rapprochement avec la vision du fils de l’homme chez le prophète Daniel ? Après cette vision, Daniel avoue : « Mes réflexions me tourmentèrent… et je gardai la chose dans mon cœur . » (Dn 7, 28). Ce serait pour Luc une manière de profiler déjà devant nous le destin grandiose de ce nourrisson. On sait, premièrement, que le livre de Daniel était bien connu au temps de Jésus, et, deuxièmement, qu’il annonçait un Messie-Roi triomphant de tous les ennemis d’Israël.
Le nom de l’enfant, déjà, révèle son mystère : « Jésus » signifie « Dieu sauve » et si (à l’inverse de Matthieu) Luc ne précise pas cette étymologie, il a, quelques versets plus haut, rapporté la phrase de l’ange « Il vous est né un Sauveur » (Lc 2, 11).
En même temps, il vit à fond la solidarité avec son peuple : comme tout enfant juif, il est circoncis le huitième jour ; « il a été sous la domination de la Loi de Moïse pour racheter ceux qui étaient sous la domination de la Loi », dit Paul dans la lettre aux Galates (Ga 4, 4 : notre deuxième lecture). Les trois autres évangiles ne parlent pas de la circoncision de Jésus, tellement la chose allait de soi. « Ce sera le signe de l’Alliance entre moi et vous… Mon Alliance deviendra dans votre chair une alliance perpétuelle », avait dit Dieu à Abraham (Gn 17). Et le Livre du Lévitique en avait tiré une loi selon laquelle tout garçon devait être circoncis le huitième jour. Joseph et Marie n’ont fait que s’y conformer : pour tout Juif de l’époque, obéir à la Loi de Moïse était le meilleur moyen, pensait-on, de faire la volonté de Dieu. Le plus surprenant pour nous n’est donc pas le fait même de la circoncision de Jésus, mais l’insistance de cet évangéliste : visiblement, Saint Luc a souhaité marquer la volonté du jeune couple de se conformer en tous points à la Loi de Moïse.
Il y revient quelques lignes plus tard, pour raconter la présentation de l’enfant au Temple : « Quand arriva le jour fixé par la Loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi… Ils venaient aussi présenter en offrande le sacrifice prescrit par la Loi du Seigneur. » (Lc 2, 22-24). Plus que la bonne volonté d’un couple fervent, sans doute Luc veut-il nous faire entrevoir l’entière solidarité de Jésus avec son peuple ; le dernier soir, Jésus lui-même l’a revendiquée : « Il faut que s’accomplisse en moi ce texte de l’Ecriture : Il a été compté avec les pécheurs » (Lc 22, 37).
Enfin, dernière remarque, on ne peut s’empêcher de remarquer (et cela est valable pour les quatre lectures de cette fête) la discrétion du personnage de Marie, alors même que cette liturgie lui est dédiée sous le vocable de « Marie, Mère de Dieu ». (Luc dit seulement : « Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur . » A l’inverse des bergers que l’événement rend bavards, Marie contemple et médite dans son coeur ; ) peut-être ce silence même de Marie est-il un message pour nous : la gloire de Marie, c’est justement d’avoir tout simplement accepté d’être la mère de Dieu, d’avoir su se mettre tout entière, humblement, au service de l’accomplissement du projet de salut de Dieu ; elle n’est pas le centre du projet ; le centre du projet, c’est Jésus, celui dont le nom signifie « Dieu sauve ».

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Noël selon Charles Péguy

Noël selon Charles Péguy

 

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Chaque poutre du toit…

Chaque poutre du toit était comme un vousseau.
Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire
Tomber comme une ardente et tragique rosée
N’était dans cette heureuse et paisible misère
Qu’un filet transparent sous la lèvre rosée.

Sous le regard de l’âne et le regard du bœuf
Cet enfant reposait dans la pure lumière.

Et dans le jour doré de la vieille chaumière
S’éclairait son regard incroyablement neuf.
Et ces laborieux et ces deux gros fidèles
Possédaient cet enfant que nous n’avons pas eu.

Et ces industrieux et ces deux haridelles
Gardaient ce fils de Dieu que nous avons vendu.
Et les pauvres moutons eussent donné leur laine
Avant que nous n’eussions donné notre tunique.

Et ces deux gros pandours donnaient vraiment leur peine.
Et nous qu’avons-nous mis aux pieds du fils unique ?
Ainsi l’enfant dormait sous ce double museau,
Comme un prince du sang gardé par des nourrices.

Et ces amusements et ses jeunes caprices
Reposaient dans le creux de ce pauvre berceau.
L’âne ne savait pas par quel chemin de palmes
Un jour il porterait jusqu’en Jérusalem

Dans la foule à genoux et dans les matins calmes
L’enfant alors éclos aux murs de Bethléem…
« Chaque poutre du toit… »,

Charles Péguy (1873-1914) est un écrivain, poète et essayiste. Le noyau central de toute son œuvre réside dans un profond patriotisme d’essence religieuse.

Ce poème est un extrait d’« Eve » où Charles Péguy évoque à la fois la chute et de la rédemption, le péché et la grâce.

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Dimanche 25 décembre 2022 : Noël, fête de la Nativité : lectures et commentaires

Dimanche 25 décembre 2022 : Noël, fête de la Nativité

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Commentaires de Marie-Noëlle Thabut,

1ère lecture

Psaume

2ème lecture

Evangile

PREMIERE LECTURE – livre du prophète Isaïe 52,7-10

7 Comme ils sont beaux sur les montagnes,
les pas du messager,
celui qui annonce la paix,
qui porte la bonne nouvelle,
qui annonce le salut,
et vient dire à Sion :
« Il règne, ton Dieu ! »
8 Écoutez la voix des guetteurs :
ils élèvent la voix,
tous ensemble ils crient de joie
car, de leurs propres yeux,
ils voient le SEIGNEUR qui revient à Sion.
9 Éclatez en cris de joie,
vous, ruines de Jérusalem,
car le SEIGNEUR console son peuple,
il rachète Jérusalem !
10 Le SEIGNEUR a montré la sainteté de son bras
aux yeux de toutes les nations.
Tous les lointains de la terre
ont vu le salut de notre Dieu.

LE SEIGNEUR CONSOLE SON PEUPLE
« Eclatez en cris de joie, ruines de Jérusalem ! » L’expression  « ruines de Jérusalem » nous permet de situer très précisément ce texte d’Isaïe : Jérusalem a été dévastée par les troupes de Nabuchodonosor en 587 av. J.C. Elles ont commis les horreurs que commettaient toutes les armées victorieuses à l’époque : pillage, destructions, viols, profanations. Des agriculteurs ont été maintenus sur place pour nourrir les occupants ; et ce qui restait d’hommes et de femmes valides ont été emmenés en déportation à Babylone. Cet Exil devait durer cinquante ans, ce qui est considérable ; amplement le temps de se décourager, de croire qu’on ne reverrait jamais le pays.
Et voilà que le prophète annonce le retour ; il a commencé sa prédication par les mots « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu » (Is 40,1). Ici, il reprend exactement le même mot « consoler »  (« le SEIGNEUR console son peuple »), pour dire que Dieu a déjà agi, le retour est pour très bientôt. Et il voit déjà le messager qui ira annoncer la grande nouvelle à Jérusalem et le guetteur qui, du haut des collines de Jérusalem, verra revenir les colonnes de déportés.
Un messager à pied et un guetteur, voilà deux personnages qu’on a bien du mal à se représenter aujourd’hui ! En ce temps de télécommunications triomphantes (télévision, téléphone portatif, fax…) nous avons un effort d’imagination à faire !
Mais dans le monde antique, il n’y avait pas d’autre moyen qu’un coureur à pied pour annoncer les nouvelles. On connaît le fameux exemple du coureur de Marathon : en 490 av. J.C., lorsque les Athéniens ont remporté la bataille de Marathon contre les Perses, un coureur s’est précipité à Athènes (qui est à quarante-deux kilomètres de Marathon), pour annoncer la Bonne Nouvelle de la victoire. Il a couru d’un trait les quarante-deux kilomètres et a juste eu le temps de crier victoire avant de s’effondrer. C’est de là que vient notre expression « courir le Marathon ».
A l’époque, lorsque les messagers couraient porter les nouvelles, il y avait dans le même temps des guetteurs postés sur les murailles des villes ou sur les collines alentour pour surveiller l’horizon.
Isaïe imagine le guetteur posté sur le haut des remparts ou sur le mont des oliviers, peut-être, et qui voit déjà voler de colline en colline le messager qui annonce le retour au pays : « Comme ils sont beaux sur les montagnes, les pas du messager, celui qui annonce la paix, qui porte la bonne nouvelle, qui annonce le salut ». Non seulement le peuple est sauvé, mais la ville elle-même va l’être, elle sera rebâtie par ceux qui reviennent. C’est pour cela que les ruines de Jérusalem sont invitées à éclater en cris de joie.
NOTRE MISSION : MESSAGERS QUI ANNONCENT LE SALUT
A l’époque on considérait que les défaites d’un peuple étaient aussi celles de son Dieu. Mais voici que le peuple est délivré, son Dieu a fait preuve de sa puissance, il « a montré la sainteté de son bras » comme dit Isaïe. C’est pour cela que le messager vient dire à la ville sainte : « Il règne, ton Dieu ».
Une fois de plus, Dieu a délivré son peuple comme il l’avait libéré d’Egypte, « à main forte et à bras étendu », comme dit le livre du Deutéronome (Dt 4,34). Et, juste derrière le messager, le guetteur voit déjà le cortège triomphal ; et du haut des remparts, que voit-il ? Qui est en tête du cortège triomphal du retour ? Le Seigneur lui-même !  Le Seigneur revient à Sion. Il marche au milieu de son peuple et désormais, il sera de nouveau là, à Jérusalem, au milieu de son peuple.
Pour dire cette action de Dieu, Isaïe emploie un mot très fort, le mot « racheter ». Dans le langage biblique,  ce mot  « racheter »  signifie  « libérer » : vous connaissez l’institution du « Go’el » : lorsqu’un Israélite a été obligé de se vendre comme esclave ou de vendre sa maison à son créancier pour payer ses dettes, son plus proche parent se présentera au créancier pour libérer son parent débiteur. On dira qu’il « rachète » son parent, qu’il le « revendique »… Bien sûr le créancier ne laissera pas partir son débiteur s’il n’est pas remboursé, mais cet aspect financier n’est pas premier dans l’opération. Ce qui est premier, c’est la libération du débiteur. Isaïe a eu l’audace d’appliquer ce mot de « Go’el » à Dieu : manière de dire à la fois qu’il est le plus proche parent de son peuple et qu’Il le libère.
Autre phrase significative de ce texte et qui traduit une avancée très importante de la pensée juive pendant l’Exil à Babylone : c’est à ce moment-là qu’Israël a découvert l’amour de Dieu pour toute l’humanité et pas seulement pour son peuple. Il a compris que son « élection » est une mission au service du salut de toute l’humanité. C’est ce qui explique la phrase :
« Le SEIGNEUR a montré la sainteté de son bras aux yeux de toutes les nations. Tous les lointains de la terre ont vu le salut de notre Dieu. » : c’est-à-dire, bientôt, elles reconnaîtront que Dieu est sauveur.
Pour nous qui relisons ce texte à l’occasion du la fête de Noël, évidemment, cette prédication d’Isaïe prend un sens nouveau ; plus que jamais, nous pouvons dire : « Le SEIGNEUR a montré la sainteté de son bras aux yeux de toutes les nations. Tous les lointains de la terre ont vu le salut de notre Dieu. » Notre mission, désormais, c’est d’être ces messagers qui annoncent la paix, ces messagers de la bonne nouvelle, qui annoncent le salut, ceux qui viennent dire non seulement à la cité sainte mais au monde entier : « Il est roi, ton Dieu » !

PSAUME – 97 (98),1-6

1 Chantez au SEIGNEUR un chant nouveau,
car il a fait des merveilles ;
par son bras très saint, par sa main puissante,
il s’est assuré la victoire.

2 Le SEIGNEUR a fait connaître sa victoire
et révélé sa justice aux nations ;
3 il s’est rappelé sa fidélité, son amour,
en faveur de la maison d’Israël.

La terre tout entière a vu
la victoire de notre Dieu.
4 Acclamez le SEIGNEUR, terre entière.
sonnez, chantez, jouez !

5 Jouez pour le SEIGNEUR sur la cithare,
sur la cithare et tous les instruments ;
6 au son de la trompette et du cor 1,
acclamez votre roi, le SEIGNEUR !

LE PEUPLE DE L’ALLIANCE…
« La terre tout entière a vu la victoire de notre Dieu » : c’est le peuple d’Israël qui parle ici et qui dit « notre » Dieu, affichant ainsi la relation tout-à-fait privilégiée qui existe entre ce petit peuple et le Dieu de l’univers ; mais Israël a peu à peu compris que sa mission dans le monde est précisément de ne pas garder jalousement pour lui cette relation privilégiée mais d’annoncer l’amour de Dieu pour tous les hommes, afin d’intégrer peu à peu l’humanité tout entière dans l’Alliance.
Ce psaume dit très bien ce que l’on pourrait appeler « les deux amours de Dieu » : son amour pour son peuple choisi, élu, Israël… ET son amour pour l’humanité tout entière, ce que le psalmiste appelle les « nations » … Relisons le verset 2 : « Le SEIGNEUR a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations » : les « nations », ce sont tous les autres, les païens, ceux qui ne font pas partie du peuple élu.  Mais vient aussitôt le verset 3 : « Il s’est rappelé sa fidélité, son amour, en faveur de la maison d’Israël », ce qui est l’expression consacrée pour rappeler ce qu’on appelle « l’élection d’Israël ». Derrière cette toute petite phrase, il faut deviner tout le poids d’histoire, tout le poids du passé : les simples mots « sa fidélité », « son amour » sont le rappel vibrant de l’Alliance : c’est par ces mots-là que, dans le désert, Dieu s’est fait connaître au peuple qu’il a choisi. « Dieu d’amour et de fidélité ». Cette phrase veut  dire : oui, Israël est bien le peuple choisi, le peuple élu ; mais la phrase d’avant, et ce n’est peut-être pas un hasard si elle est placée avant, cette phrase qui parle des nations, rappelle bien que si Israël est choisi, ce n’est pas pour en jouir égoïstement, pour se considérer comme fils unique, mais pour se comporter en frère aîné. Comme disait André Chouraqui, « le peuple de l’Alliance est destiné devenir l’instrument de l’Alliance des peuples ».
L’un des grands acquis de la Bible, c’est que Dieu aime toute l’humanité, et pas seulement Israël. Dans ce psaume, cette certitude marque la composition même du texte ; si on regarde d’un peu plus près la construction de ces quelques versets, on remarque la disposition en « inclusion » de ces deux  versets  2 et 3 : l’inclusion est un procédé de style qu’on trouve souvent dans la Bible. Une inclusion, c’est un peu comme un encadré, dans un journal ou dans une revue ; bien évidemment le but est de mettre en valeur le texte écrit dans le cadre.
Dans une inclusion, c’est la même chose : le texte central est mis en valeur, « encadré » par deux phrases identiques, une avant, l’autre après… Ici, la phrase centrale, qui parle d’Israël, est encadrée par deux phrases synonymes qui parlent des nations : « Le SEIGNEUR a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations », voilà la première phrase donc, sur les nations … la deuxième phrase, elle, concerne Israël : « il s’est rappelé sa fidélité, son amour en faveur de la maison d’Israël »… et voici la troisième phrase : « la terre tout entière a vu la victoire de notre Dieu ». Le mot « nations » ne figure pas ici, mais il est remplacé par l’expression « la terre tout entière ». La phrase centrale sur ce qu’on appelle «  l’élection d’Israël » est donc encadrée par deux phrases sur l’humanité tout entière. L’élection d’Israël est centrale mais on n’oublie pas qu’elle doit rayonner sur l’humanité tout entière et cette construction le manifeste bien.
…AU SERVICE DE L’ALLIANCE DES PEUPLES
Et quand le peuple d’Israël, au cours de la fête des Tentes à Jérusalem, acclame Dieu comme roi, ce peuple sait bien qu’il le fait déjà au nom de l’humanité tout entière ; en chantant cela, on imagine déjà (parce qu’on sait qu’il viendra) le jour où Dieu sera vraiment le roi de toute la terre, c’est-à-dire reconnu par toute la terre.
La première dimension de ce psaume, très importante, c’est donc l’insistance sur ce « les deux amours de Dieu », pour son peuple choisi, d’une part, et pour toute l’humanité, d’autre part. Une deuxième dimension de ce psaume est la proclamation très appuyée de la royauté de Dieu.
Par exemple, on chante au Temple de Jérusalem « Acclamez le SEIGNEUR, terre entière, acclamez votre roi, le SEIGNEUR » Mais dire « on chante », c’est trop faible ; en fait, par le vocabulaire employé en hébreu, ce psaume est un cri de victoire, le cri que l’on pousse sur le champ de bataille après la victoire, la « terouah » en l’honneur du vainqueur. Le mot de victoire revient trois fois dans les premiers versets. « Par son bras très saint, par sa main puissante, il s’est assuré la victoire » … « Le SEIGNEUR a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations »… « La terre tout entière a vu la victoire de notre Dieu ».
La victoire de Dieu dont on parle ici est double : c’est d’abord la victoire de la libération d’Egypte ; la mention « par son bras très saint, par sa main puissante » est une allusion au premier exploit de Dieu en faveur des fils d’Israël, la traversée miraculeuse de la mer qui les séparait définitivement de l’Egypte, leur terre de servitude. L’expression « Le SEIGNEUR t’a fait sortir d’Egypte à main forte et à bras étendu » (Dt 5,15) était devenue la formule-type de la libération d’Egypte. La formule « il a fait des merveilles » (au verset 1 de ce psaume) est aussi un rappel de la libération d’Egypte.
Mais quand on chante la victoire de Dieu, on chante également la victoire attendue pour la fin des temps, la victoire définitive de Dieu contre toutes les forces du mal. Et déjà on acclame Dieu comme jadis on acclamait le nouveau roi le jour de son sacre en poussant des cris de victoire au son des trompettes, des cornes et dans les applaudissements de la foule. Mais alors qu’avec les rois de la terre, on allait toujours vers une déception, cette fois, on sait qu’on ne sera pas déçus ; raison de plus pour que cette fois la « terouah » soit particulièrement vibrante !
Désormais les Chrétiens acclament Dieu avec encore plus de vigueur parce qu’ils ont vu de leurs yeux le roi du monde : depuis l’Incarnation du Fils, ils savent et ils affirment (envers et contre tous les événements apparemment contraires), que le Règne de Dieu, c’est-à-dire de l’amour est déjà commencé.
————–
Note
1 – Les instruments de musique : c’est par les psaumes, et en particulier le Ps 150 que l’on connaît les instruments de musique de l’époque. Ici déjà, en voici 3 énumérés : cithare, trompette et cor.
Complément : Devant la Crèche, on ne peut pas s’empêcher de penser que, pour l’instant la force divine du bras de Dieu qui libère son peuple repose dans deux petites mains d’enfant.

DEUXIEME LECTURE – lettre aux Hébreux 1,1-6

1 À bien des reprises
et de bien des manières,
Dieu, dans le passé,
a parlé à nos pères par les prophètes ;
2 mais à la fin, en ces jours où nous sommes,
il nous a parlé par son Fils
qu’il a établi héritier de toutes choses
et par qui il a créé les mondes.
3 Rayonnement de la gloire de Dieu,
expression parfaite de son être,
le Fils, qui porte l’univers
par sa parole puissante,
après avoir accompli la purification des péchés,
s’est assis à la droite de la Majesté divine
dans les hauteurs des cieux ;
4  et il est devenu bien supérieur aux anges,
dans la mesure même où il a reçu en héritage
un nom si différent du leur.
5 En effet, Dieu déclara-t-il jamais à un ange :
« Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré ? »
Ou bien encore :
« Moi, je serai pour lui un père, et lui sera pour moi un fils ? »
6 À l’inverse, au moment d’introduire le Premier-né
dans le monde à venir,
il dit :
« Que se prosternent devant lui tous les anges de Dieu. »

DIEU A PARLE A NOS PERES PAR LES PROPHETES
« Dieu a parlé à nos pères par les prophètes » ; à travers cette phrase on devine que les destinataires de la lettre aux Hébreux sont des Juifs devenus chrétiens. L’une des caractéristiques d’Israël, c’est bien cette conviction que Dieu s’est révélé progressivement à ce peuple qu’il a choisi. Parce que Dieu n’est pas à la portée de l’homme, il faut bien qu’il se révèle lui-même. Vous connaissez la fameuse phrase de Paul dans la lettre aux Ephésiens : « Dieu nous dévoile le mystère de sa volonté… » (Ep 1,9). Sous-entendu, nous ne l’aurions pas trouvé tout seuls. Et cette révélation ne pouvait être que progressive, tout comme l’éducation d’un enfant ne se fait pas en un jour. Au contraire, les parents disent à leur enfant progressivement, au fur et à mesure du développement de son intelligence, ce dont il a besoin pour comprendre le monde et la société dans laquelle il vit. C’est exactement comme cela que Moïse explique la pédagogie de Dieu dans le livre du Deutéronome : « Comme un homme éduque son fils, ainsi le SEIGNEUR ton Dieu fait ton éducation. » (Dt 8,5).
Pour cette éducation progressive de son peuple, Dieu a suscité, à chaque époque, des prophètes qui parlaient de sa part, dans des termes qui correspondaient à la mentalité de l’époque. On disait qu’ils  étaient la « bouche de Dieu ». Comme dit l’une des phrases de notre liturgie : « Tu les as formés par les prophètes dans l’espérance du salut. » (Prière Eucharistique N° IV). Parce que Dieu utilise avec son peuple cette pédagogie très progressive, il lui parle « à bien des reprises et de bien des manières » (v.1).
Quand l’auteur de la lettre aux Hébreux prend la plume, ce salut est arrivé : c’est pour cela qu’il coupe l’histoire de l’humanité en deux périodes : avant Jésus-Christ et depuis Jésus-Christ. Avant Jésus-Christ, c’est ce qu’il appelle le passé ; depuis Jésus-Christ, c’est ce qu’il appelle « ces jours où nous sommes », c’est le temps de l’accomplissement. En Jésus-Christ, le monde nouveau est déjà inauguré. Le Christ est en lui-même l’accomplissement du projet de Dieu, ce que nous appelons son « dessein bienveillant ».
Après l’éblouissement et la stupeur de la résurrection du Christ, la conviction des premiers Chrétiens s’est forgée peu à peu : oui, Jésus de Nazareth est bien le Messie que le peuple juif attendait, mais il est bien différent de l’idée qu’on s’en était faite à l’avance. L’ensemble du Nouveau Testament médite cette découverte étonnante. Certains attendaient un Messie-roi, d’autres, un Messie-prophète, d’autres, un Messie-prêtre. L’auteur de la lettre aux Hébreux, dans le passage d’aujourd’hui, nous dit : Eh bien, mes frères, Jésus est bien tout cela.
Je vous propose donc une remarque sur chacun de ces trois points : Jésus est le Messieprophète qu’on attendait, il est le Messie-prêtre, il est le Messie-Roi.
LE CHRIST, PRETRE, PROPHETE ET ROI
Pour commencer, Il est le Messie – prophète : l’auteur nous dit : « Dieu nous a parlé par son Fils » : Jésus est bien le prophète par excellence ; si les prophètes de l’Ancien Testament étaient la « bouche de Dieu », lui, il est la Parole même de Dieu, la Parole créatrice « par qui Dieu a créé les mondes » (v. 2). Mieux encore, il est le « rayonnement de la gloire de Dieu » (v. 3)1 ; il dira lui-même « qui m’a vu a vu le Père » (il est l’expression parfaite de l’être de Dieu, v. 3).
Ensuite, Il est le Messie – prêtre : c’était le rôle du grand-prêtre d’être l’intermédiaire entre Dieu et le peuple pécheur ; or, en vivant une relation d’amour parfaite avec son Père, une véritable relation filiale, Jésus-Christ restaure l’Alliance entre Dieu et l’humanité. Il est donc le grand-prêtre par excellence, qui accomplit la « purification  des péchés » : cette « purification des péchés », (l’auteur reviendra longuement sur ce thème dans la suite de sa lettre), Jésus l’a opérée en vivant toute sa vie dans une relation parfaitement filiale, comme un parfait dialogue d’amour et « d’obéissance » avec son Père.
Enfin, Il est le Messie – roi : l’auteur lui applique des titres et des prophéties qui concernaient le Messie : on a là l’image du trône royal, « il est assis à la droite de la Majesté divine », et surtout il est appelé « Fils de Dieu » : or c’était le titre qui était conféré au nouveau roi le jour de son sacre. « Tu es mon fils, moi, aujourd’hui je t’ai engendré », était l’une des phrases de la cérémonie du sacre (reprise par le psaume 2). Et le prophète Natan avait annoncé : « Moi, je serai pour lui un père ; et lui sera pour moi un fils. » (2 S 7,14). Et, à la différence des rois de la terre, lui, Il est roi sur toute la création, même les Anges : l’auteur nous dit  « il est devenu bien supérieur aux anges, dans la mesure même où il a reçu en héritage un nom si diffdérent du leur. »  (v. 4). Et lorsqu’il dit « Au moment d’introduire le Premier-né dans le monde à venir, il (Dieu) dit : Que se prosternent devant lui tous les anges de Dieu », l’auteur annonce que le Christ est Dieu lui-même ! Puisque Dieu seul a droit à l’adoration des Anges.
Prêtre, prophète et roi, Jésus l’est donc, c’est pourquoi on peut l’appeler Christ qui veut dire « Messie » ; mais ce texte nous révèle en même temps notre propre grandeur puisque notre vocation est d’être intimement unis à Jésus-Christ, de devenir à notre tour les reflets de la gloire du Père… d’être à notre tour appelés Fils… d’être rois en lui… prêtres en lui… prophètes en lui. Au jour de notre baptême, le prêtre nous a annoncé que, désormais, nous étions membres du Christ, Prêtre, Prophète et Roi.
Et si ce passage nous est proposé dès le jour de Noël, c’est pour que nous sachions déjà déchiffrer le mystère de la crèche à cette profondeur-là. L’enfant qui nous est donné à contempler est porteur de tout ce mystère-là et nous en lui, par lui et avec lui.
————–
Note sur Hébreux 1,3
Dans l’expression « Rayonnement de la gloire de Dieu », on peut entendre un écho de l’épisode de la Transfiguration de Jésus.
Compléments
On a longtemps cru que la lettre aux Hébreux était de saint Paul. Aujourd’hui, on dit souvent par manière de boutade : « Ce n’est pas une lettre, elle n’est pas de saint Paul, elle ne s’adresse pas aux Hébreux. » Le mot « Hébreux », dans cet écrit, désigne probablement d’anciens Juifs devenus chrétiens. Cela expliquerait ses allusions très fréquentes aux textes bibliques et aux pratiques juives.

EVANGILE – selon Saint Jean 1,1-18

1 Au commencement était le Verbe,
et le Verbe était auprès de Dieu,
et le Verbe était Dieu.
2 Il était au commencement auprès de Dieu.
3 C’est par lui que tout est venu à l’existence,
et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui.
4 En lui était la vie,
et la vie était la lumière des hommes ;
5 la lumière brille dans les ténèbres,
et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée.
6 Il y eut un homme envoyé par Dieu ;
son nom était Jean.
7 Il est venu comme témoin,
pour rendre témoignage à la Lumière,
afin que tous croient par lui.
8 Cet homme n’était pas la Lumière,
mais il était là pour rendre témoignage à la Lumière.
9 Le Verbe était la vraie Lumière,
qui éclaire tout homme
en venant dans le monde.
10 Il était dans le monde,
et le monde était venu par lui à l’existence,
mais le monde ne l’a pas reconnu.
11 Il est venu chez lui,
et les siens ne l’ont pas reçu.
12 Mais à tous ceux qui l’ont reçu,
il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu,
eux qui croient en son nom.
13 Ils ne sont pas nés du sang,
ni d’une volonté charnelle,
ni d’une volonté d’homme :
ils sont nés de Dieu.
14 Et le Verbe s’est fait chair,
il a habité parmi nous,
et nous avons vu sa gloire,
la gloire qu’il tient de son Père
comme Fils unique,
plein de grâce et de vérité.
15 Jean le Baptiste lui rend témoignage en proclamant :
« C’est de lui que j’ai dit :
Celui qui vient derrière moi
est passé devant moi,
car avant moi il était. »
16 Tous, nous avons eu part à sa plénitude,
nous avons reçu grâce après grâce ;
17 car la Loi fut donnée par Moïse,
la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
18 Dieu, personne ne l’a jamais vu ;
le Fils unique, lui qui est Dieu,
lui qui est dans le sein du Père,
c’est lui qui l’a fait connaître.

LA CREATION EST LE FRUIT DE L’AMOUR
« Au commencement » : Jean reprend volontairement le premier mot de la Genèse (« Bereshit ») ; il faut entendre la profondeur de ce mot : ce n’est pas une précision d’ordre chronologique !  Ce qui commence, c’est ce qui commande toute l’histoire humaine, c’est l’origine, le fondement de toutes choses …
« Au commencement était le VERBE » : tout est mis sous le signe de la Parole, Parole d’Amour, Dialogue… Voilà l’Origine, le commencement de toutes choses… « Et le Verbe était au commencement auprès de Dieu » (v. 2-3) : en grec c’est « pros ton Théon »qui veut dire  littéralement « tourné vers Dieu » ; le Verbe était tourné vers Dieu…  C’est l’attitude du dialogue. Quand on dit « Je t’aime », ou quand on dialogue vraiment avec quelqu’un, on lui fait face ; on est « tourné vers lui » ; quand on lui tourne le dos, qu’on se détourne, le dialogue est rompu ; et il faudra faire demi-tour pour renouer le dialogue.
Ce que saint Jean nous dit ici est capital : la Création tout entière, puisque rien n’a été fait sans le Verbe, (la Création tout entière) est le fruit du dialogue d’amour du Père et du Fils ; et nous, à notre tour, nous sommes créés dans ce dialogue et pour ce dialogue. Nous sommes le fruit d’un dialogue d’amour. Bien sûr, c’est vrai concrètement au niveau de l’acte qui nous a engendrés chacun à la vie. Mais, spirituellement, nous pouvons nous dire que nous sommes le fruit de l’amour de Dieu. La vocation de l’humanité, d’Adam, pour reprendre le mot de la Genèse, c’est de vivre un parfait dialogue d’amour avec le Père.
Mais toute notre histoire humaine, malheureusement, étale le contraire. Le récit de la chute d’Adam et Eve, au deuxième chapitre de la Genèse, nous le dit à sa manière : il montre bien que le dialogue est rompu ; l’homme et la femme se sont méfiés de Dieu, ont soupçonné Dieu d’être mal intentionné à leur égard ; c’est le contraire même du dialogue d’amour ! Nous le savons bien : quand le soupçon traverse nos relations, le dialogue est empoisonné. Et, dans notre vie personnelle, toute l’histoire de notre relation à Dieu pourrait être représentée comme cela : nous sommes tantôt tournés vers lui, tantôt détournés et il nous faut alors faire demi-tour pour qu’il puisse renouer le dialogue… « Demi-tour », c’est exactement le sens du mot « conversion » dans la Bible.
NOTRE AVENIR : ENTRER DANS CE DIALOGUE
Le Christ, lui, vit en perfection ce dialogue sans ombre avec le Père : il vient prendre la tête de l’humanité ; j’ai envie de dire : il est le « OUI » de l’humanité au Père. Il vient vivre ce « OUI » au quotidien ; et alors, par lui, nous sommes réintroduits dans le dialogue primordial : « A tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. ». « Pouvoir devenir enfants de Dieu », c’est retrouver cette relation filiale, confiante, sans ombre. Et le seul but du Christ, c’est que l’humanité tout entière puisse rentrer dans ce dialogue d’amour ; « ceux qui croient en son nom », ce sont ceux qui lui font confiance, qui marchent à sa suite. « Pour que le monde croie » : c’est le souhait ardent de Jésus : « Que tous soient un comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. » (Jn 17,21). Je reprends une phrase de Kierkegaard :  « Le contraire du péché, ce n’est pas la vertu, le contraire du péché, c’est la foi ».
« Croire », c’est faire confiance au Père, savoir en toutes circonstances, quoi qu’il nous arrive, que Dieu est bienveillant, ne jamais soupçonner Dieu, ne jamais douter de l’amour de Dieu pour nous et pour le monde… et du coup, bien sûr, regarder le monde avec ses yeux.
Regarder le monde avec les yeux de Dieu : « Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous », cela veut dire qu’il n’y a pas besoin de s’évader du monde pour rencontrer Dieu. C’est dans la  « chair » même, dans la réalité du monde que nous lisons sa Présence. Comme Jean-Baptiste, à notre tour, nous sommes envoyés comme témoins de cette Présence.

AVENT, MEDITATIONS, MEDITATIONS SUR LE TEMPS DE L'AVENT, NOEL, PRIERES

Méditations sur le temps de l’Avent

 

Méditations sur le temps de l’Avent

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Apprends-nous à attendre ; C’est l’Avent ; Vierge de l’attente ; Tu m’attends encore ; Pas étonnant, dit Dieu ; Merci de nous réveiller ; J’en ferai un petit enfant ; L’attente ; Tu es l’hôte annoncé

 

 

Apprends-nous à attendre 

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Dieu
Tu as choisi de te faire attendre
Tout le temps d’un Avent.
Moi je n’aime pas attendre
Dans les files d’attente.
Je n’aime pas attendre mon tour.
Je n’aime pas attendre le train.
Je n’aime pas attendre pour juger.
Je n’aime pas attendre le moment.
Je n’aime pas attendre un autre jour.
Je n’aime pas attendre
parce que je n’ai pas le temps
et que je ne vis que dans l’instant.

Tu le sais bien d’ailleurs,
Tout est fait pour m’éviter l’attente :
les cartes bleues et les libres services,
les ventes à crédit
et les distributeurs automatiques,
les coups de téléphone
et les photos à développement instantané,
les télex et les terminaux d’ordinateur,
la télévision et les flashs à la radio…
Je n’ai pas besoin d’attendre les nouvelles :
elles me précèdent.

Mais toi Dieu
tu as choisi de te faire attendre
le temps de tout un Avent.
parce que tu as fait de l’attente
l’espace de la conversion,
le face à face avec ce qui est caché,
l’usure qui ne s’use pas.
L’attente, seulement l’attente,
l’attente de l’attente,
l’intimité avec l’attente qui est en nous
parce que seule l’attente
et que seule l’attention
est capable d’aimer.

Tout est déjà donné dans l’attente,
et pour toi, Dieu,
attendre
se conjugue Prier.

Père Jean Debruyne



C’est l’Avent

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Allume une braise dans ton cœur, c’est l’Avent.
Tu verras, l’attente n’est pas vaine quand on espère quelqu’un.

Allume une flamme dans tes yeux, c’est l’Avent.
Regarde autour de toi, on a soif de lumière et de paix.

Allume un feu dans tes mains, c’est l’Avent.
Ouvre-les à ceux qui n’ont rien, ta tendresse est à bout de doigts.

Allume une étoile dans ton ciel, c’est l’Avent.
Elle dira à ceux qui cherchent qu’il y a un sens à toute vie.

Allume un foyer en hiver, c’est l’Avent.
Les transis du cœur et du corps viendront et il fera chaud au cœur du monde.

II suffit d’une seule braise, pour enflammer le monde,
et réchauffer le cœur le plus froid.

Père Robert Riber



Vierge de l’attente

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Sainte Marie, vierge de l’attente,
donne-nous de ton huile,
parce que nos lampes s’éteignent.
Vois : nos réserves se sont consumées.
Ne nous envoie pas chez d’autres marchands.
Allume à nouveau dans nos âmes les anciennes ardeurs
qui nous brûlaient de l’intérieur,
quand il suffisait d’un rien pour nous faire tressaillir de joie :
l’arrivée d’un ami lointain,
le rouge du soir après l’orage,
le crépitement de la bûche
qui en hiver surveillait les retours à la maison,
le son des cloches carillonnant les jours de fête,
l’arrivée des hirondelles au printemps,
l’arrondi tendre et mystérieux du ventre maternel,
le parfum de lavande qui faisait irruption quand on préparait un berceau.

Si aujourd’hui nous ne savons plus attendre,
c’est parce que nous sommes à court d’espérance.
Ses sources se sont asséchées.
Nous souffrons d’une crise profonde du désir.
Et, désormais satisfaits des mille succédanés qui nous assaillent,
nous risquons de ne plus rien attendre,
pas même ces promesses surnaturelles
qui ont été signées avec le Sang du Dieu de l’Alliance.

Sainte Marie, femme de l’attente,
soulage la douleur des mères souffrant pour leurs fils qui,
sortis un jour de la maison, n’y sont jamais revenus,
tués dans un accident ou séduits par les appels de la jungle ;
dispersés par la fureur de la guerre
ou aspirés par le tourbillon des passions ;
engloutis par la fureur de l’océan ou bouleversés
par les tempêtes de la vie.

Sainte Marie, vierge de l’attente, donne-nous une âme de veilleur.
Arrivés au seuil du troisième millénaire,
nous nous sentons malheureusement plutôt fils du crépuscule
que prophètes de l’Avent.
Sentinelle du matin,
réveille dans nos cœurs la passion de fraîches nouvelles
à porter à un monde qui se sent déjà vieux.
Apporte-nous enfin la harpe et la cithare,
afin qu’avec toi, matinale,
nous puissions réveiller l’aurore.
Face aux changements qui secouent l’histoire,
donne-nous de sentir sur notre peau les frissons des commencements.
Fais-nous comprendre qu’il ne suffit pas d’accueillir :
il faut attendre.
Accueillir est parfois un signe de résignation.
Attendre est toujours un signe d’espérance.
Rends-nous pour cela ministres de l’attente.
Quand le Seigneur viendra, ô Vierge de l’Avent,
qu’il nous surprenne,
grâce à ta complicité maternelle,
la lampe à la main.

Mgr Tonino Bello



Tu m’attends encore

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Seigneur, si Tu veux m’attendre encore,
je serai le quatrième mage,
parti de nulle part,
parti sans étoile aux cieux
pour un voyage au bout du temps,
pour un voyage au bout de moi…

Quand les ténèbres brouillent toutes pistes,
quand ma boussole intérieure bat la chamade,
quand ma route s’emballe sur elle-même,
Tu me montres quelque part dans la nuit
l’étoile inconnue que Tu fais lever pour moi.

Tu me dis que je n’ai pas perdu ma vie,
ce temps que j’avais rêvé tout autre !
Tu me dis que Tu m’attends encore,
car la fête ne commencera pas sans moi.

Et je T’offrirai mon enfance
tapie sous les décombres de mon passé…
J’adorerai l’Enfant de Noël
comme on s’agenouille émerveillé
devant le miracle fragile
d’une Parole enfin devenue vraie.
Maintenant, je Te vois en l’Enfant de Noël
T’agenouiller devant moi
pour que je devienne enfin Ton enfant.

Lytta Basset



Pas étonnant, dit Dieu

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Pas étonnant, dit Dieu.
que notre histoire soit tissée de rendez-vous manqués !

Vous m’attendez dans la toute-puissance,
et je vous espère dans la fragilité d’une naissance !

Vous me cherchez dans les étoiles du ciel,
et je vous rencontre dans les visages qui peuplent la terre !

Vous me rangez au vestiaire des idées reçues
et je viens à vous dans la fraîcheur de la grâce !

Vous me voulez comme une réponse,
et je me tiens dans le bruissement de vos questions !

Vous m’espérez comme un pain
et je creuse en vous la faim !

Vous me façonnez à votre image,
et je vous surprends dans le dénuement d’un regard d’enfant !

Mais, dit Dieu, sous le pavé de vos errances,
un Avent de tendresse se prépare,
où je vous attends comme la nuit attend le jour.

 Francine Carillo



Merci de nous réveiller

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Dieu, merci de venir réveiller
notre attente endormie sous les soucis,
la bousculade des jours et nos ennuis.

Dieu, merci de venir réveiller notre attente endormie
sous le poids des choses.

Nous sommes si pressés que nous ne prenons plus le temps d’attendre.
Nous avons tant à faire, à penser.
Nos agendas, nos heures, nos vies sont remplis.
Nous sommes si occupés, envahis, pressés
que nous n’avons jamais plus le temps.

Dieu, merci de venir réveiller notre attente.
Toi, tu nous fais cadeau de ce temps neuf.

Voici les temps nouveaux !
D’un temps qui ne peut se gagner ni se perdre.
D’un temps pour respirer, pour espérer, pour vivre.

Dieu, merci pour ce temps d’Avent.
Merci d’arriver à l’improviste,
visiteur inattendu !

Car si Noël est programmé sur nos calendriers,
Toi, Dieu, tu n’as jamais fini de nous surprendre !

Anonyme



J’en ferai un petit enfant

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Et toi, Dieu, que feras-tu de tes pouvoirs ?
Que feras-tu de tes trompettes ?
De tes chevaux fumant de sang ?
Des cornes d’or de tes prophètes ?
Ta parole chauffée à blanc ?

Et toi, Dieu, que feras-tu de tes pouvoirs ?
Que feras-tu de tes archanges ?
Que feras-tu de tes légions ?
De tes orchestres de louanges ?
Des pouvoirs de ta religion ?
Que feras-tu de tes tonnerres ?
De tes pesants chandeliers d’or ?
Du feu du ciel et de la terre ?
Tes pouvoirs d’amour et de mort ?

Et toi, Dieu, que feras-tu de tes pouvoirs ?
J’en ferai un petit enfant…

Père Jean Debruyne



L’attente

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Viens dans l’obscurité
quand le ciel est fermé.
Viens sur la paille du cœur,
sois Noël et que tout devienne
ton doux visage qui brûle.

Viens en plein désespoir
quand le cœur est gelé.
Toi, le tué de chaque jour
qui chaque nuit nous rends
la vie avec l’amour,
sois Noël indéfiniment
qui jamais ne nous déprend.

Sois Noël indéfiniment
qui fait de chaque instant
un bel arbre de lumière.
Sois ce recommencement,
ce doux visage qui brûle
et qui nous rend l’amour avec la vie.

Vaïno Hamnström



Tu es l’hôte annoncé
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Tu es l’hôte annoncé
Ô mon Dieu, je t’attends.
Tu es Celui qui doit venir.
Laisse-moi te donner ce nom.
Il est voilé, mais il est sans fard.
Tu es l’hôte annoncé
dont chaque jour j’attends l’évidence.
Tu es la joie que ma prière voudrait accueillir.
Je t’attends. Tu es Celui qui doit venir.
En t’attendant, le temps est long,
et il a fallu le meubler d’agissements,
j’ai appris la solitude, le rire et la peine
et la violence du monde déchu.
J’ai déchiffré les visages et les gestes
de mes compagnons de routine,
j’ai construit des machines de rien,
je me suis affairé à des jeux d’enfant pauvre,
et je me suis débrouillé, livré à moi-même.
Je t’attends. Tu es Celui qui doit venir.
Mais déjà la nuit descend vers l’horizon.
Je suis prêt, pour Toi.
En moi la paix descend d’au-delà des collines
comme une naissance seconde
qui fait tout éternel.
Je t’attends. Tu es Celui qui doit venir.

Pasteur Alain Houziaux

 

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Lettre apostolique du Pape François sur la signification et la valeur de la crèche

LETTRE APOSTOLIQUE ADMIRABILE SIGNUM

DU SOUVERAIN PONTIFE FRANÇOIS

SUR LA SIGNIFICATION ET LA VALEUR DE LA CRÈCHE

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  1. Le merveilleux signe de la crèche, si chère au peuple chrétien, suscite toujours stupeur et émerveillement. Représenter l’événement de la naissance de Jésus, équivaut à annoncer le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu avec simplicité et joie. La crèche, en effet, est comme un Évangile vivant, qui découle des pages de la Sainte Écriture. En contemplant la scène de Noël, nous sommes invités à nous mettre spirituellement en chemin, attirés par l’humilité de Celui qui s’est fait homme pour rencontrer chaque homme. Et, nous découvrons qu’Il nous aime jusqu’au point de s’unir à nous, pour que nous aussi nous puissions nous unir à Lui.

Par cette lettre je voudrais soutenir la belle tradition de nos familles qui, dans les jours qui précèdent Noël, préparent la crèche. Tout comme la coutume de l’installer sur les lieux de travail, dans les écoles, les hôpitaux, les prisons, sur les places publiques… C’est vraiment un exercice d’imagination créative, qui utilise les matériaux les plus variés pour créer de petits chefs-d’œuvre de beauté. On l’apprend dès notre enfance : quand papa et maman, ensemble avec les grands-parents, transmettent cette habitude joyeuse qui possède en soi une riche spiritualité populaire. Je souhaite que cette pratique ne se perde pas ; mais au contraire, j’espère que là où elle est tombée en désuétude, elle puisse être redécouverte et revitalisée.

  1. L’origine de la crèche se trouve surtout dans certains détails évangéliques de la naissance de Jésus à Bethléem. L’évangéliste Luc dit simplement que Marie « mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune » (2, 7). Jésus est couché dans une mangeoire, appelée en latin praesepium, d’où la crèche.

En entrant dans ce monde, le Fils de Dieu est déposé à l’endroit où les animaux vont manger. La paille devient le premier berceau pour Celui qui se révèle comme « le pain descendu du ciel » (Jn 6, 41). C’est une symbolique, que déjà saint Augustin, avec d’autres Pères, avait saisie lorsqu’il écrivait : « Allongé dans une mangeoire, il est devenu notre nourriture » (Serm. 189, 4). En réalité, la crèche contient plusieurs mystères de la vie de Jésus de telle sorte qu’elle nous les rend plus proches de notre vie quotidienne.

Mais venons-en à l’origine de la crèche telle que nous la comprenons. Retrouvons-nous en pensée à Greccio, dans la vallée de Rieti, où saint François s’arrêta, revenant probablement de Rome, le 29 novembre 1223, lorsqu’il avait reçu du Pape Honorius III la confirmation de sa Règle. Après son voyage en Terre Sainte, ces grottes lui rappelaient d’une manière particulière le paysage de Bethléem. Et il est possible que le Poverello ait été influencé à Rome, par les mosaïques de la Basilique de Sainte Marie Majeure, représentant la naissance de Jésus, juste à côté de l’endroit où étaient conservés, selon une tradition ancienne, les fragments de la mangeoire.

Les Sources franciscaines racontent en détail ce qui s’est passé à Greccio. Quinze jours avant Noël, François appela un homme du lieu, nommé Jean, et le supplia de l’aider à réaliser un vœu : « Je voudrais représenter l’Enfant né à Bethléem, et voir avec les yeux du corps, les souffrances dans lesquelles il s’est trouvé par manque du nécessaire pour un nouveau-né, lorsqu’il était couché dans un berceau sur la paille entre le bœuf et l’âne »[1]. Dès qu’il l’eut écouté, l’ami fidèle alla immédiatement préparer, à l’endroit indiqué, tout le nécessaire selon la volonté du saint. Le 25 décembre, de nombreux frères de divers endroits vinrent à Greccio accompagnés d’hommes et de femmes provenant des fermes de la région, apportant fleurs et torches pour illuminer cette sainte nuit. Quand François arriva, il trouva la mangeoire avec la paille, le bœuf et l’âne. Les gens qui étaient accourus manifestèrent une joie indicible jamais éprouvée auparavant devant la scène de Noël. Puis le prêtre, sur la mangeoire, célébra solennellement l’Eucharistie, montrant le lien entre l’Incarnation du Fils de Dieu et l’Eucharistie. À cette occasion, à Greccio, il n’y a pas eu de santons : la crèche a été réalisée et vécue par les personnes présentes[2].

C’est ainsi qu’est née notre tradition : tous autour de la grotte et pleins de joie, sans aucune distance entre l’événement qui se déroule et ceux qui participent au mystère.

Le premier biographe de saint François, Thomas de Celano, rappelle que s’ajouta, cette nuit-là, le don d’une vision merveilleuse à la scène touchante et simple : une des personnes présentes vit, couché dans la mangeoire, l’Enfant Jésus lui-même. De cette crèche de Noël 1223, « chacun s’en retourna chez lui plein d’une joie ineffable »[3].

  1. Saint François, par la simplicité de ce signe, a réalisé une grande œuvre d’évangélisation. Son enseignement a pénétré le cœur des chrétiens et reste jusqu’à nos jours une manière authentique de proposer de nouveau la beauté de notre foi avec simplicité. Par ailleurs, l’endroit même où la première crèche a été réalisée exprime et suscite ces sentiments. Greccio est donc devenu un refuge pour l’âme qui se cache dans le rocher pour se laisser envelopper dans le silence.

Pourquoi la crèche suscite-t-elle tant d’émerveillement et nous émeut-elle ? Tout d’abord parce qu’elle manifeste la tendresse de Dieu. Lui, le Créateur de l’univers, s’abaisse à notre petitesse. Le don de la vie, déjà mystérieux à chaque fois pour nous, fascine encore plus quand nous voyons que Celui qui est né de Marie est la source et le soutien de toute vie. En Jésus, le Père nous a donné un frère qui vient nous chercher quand nous sommes désorientés et que nous perdons notre direction ; un ami fidèle qui est toujours près de nous. Il nous a donné son Fils qui nous pardonne et nous relève du péché.

Faire une crèche dans nos maisons nous aide à revivre l’histoire vécue à Bethléem. Bien sûr, les Évangiles restent toujours la source qui nous permet de connaître et de méditer sur cet Événement, cependant la représentation de ce dernier par la crèche nous aide à imaginer les scènes, stimule notre affection et nous invite à nous sentir impliqués dans l’histoire du salut, contemporains de l’événement qui est vivant et actuel dans les contextes historiques et culturels les plus variés.

D’une manière particulière, depuis ses origines franciscaines, la crèche est une invitation à « sentir » et à « toucher » la pauvreté que le Fils de Dieu a choisie pour lui-même dans son incarnation. Elle est donc, implicitement, un appel à le suivre sur le chemin de l’humilité, de la pauvreté, du dépouillement, qui, de la mangeoire de Bethléem conduit à la croix. C’est un appel à le rencontrer et à le servir avec miséricorde dans les frères et sœurs les plus nécessiteux (cf. Mt 25, 31-46).

  1. J’aimerais maintenant passer en revue les différents signes de la crèche pour en saisir le sens qu’ils portent en eux. En premier lieu, représentons-nous le contexte du ciel étoilé dans l’obscurité et dans le silence de la nuit. Ce n’est pas seulement par fidélité au récit évangélique que nous faisons ainsi, mais aussi pour la signification qu’il possède. Pensons seulement aux nombreuses fois où la nuit obscurcit notre vie. Eh bien, même dans ces moments-là, Dieu ne nous laisse pas seuls, mais il se rend présent pour répondre aux questions décisives concernant le sens de notre existence : Qui suis-je ? D’où est-ce que je viens ? Pourquoi suis-je né à cette époque ? Pourquoi est-ce que j’aime ? Pourquoi est-ce que je souffre ? Pourquoi vais-je mourir ? Pour répondre à ces questions, Dieu s’est fait homme. Sa proximité apporte la lumière là où il y a les ténèbres et illumine ceux qui traversent l’obscurité profonde de la souffrance (cf. Lc 1, 79).

Les paysages qui font partie de la crèche méritent, eux aussi, quelques mots, car ils représentent souvent les ruines d’anciennes maisons et de palais qui, dans certains cas, remplacent la grotte de Bethléem et deviennent la demeure de la Sainte Famille. Ces ruines semblent s’inspirer de la Légende dorée du dominicain Jacopo de Voragine (XIIIème siècle), où nous pouvons lire une croyance païenne selon laquelle le temple de la Paix à Rome se serait effondré quand une Vierge aurait donné naissance. Ces ruines sont avant tout le signe visible de l’humanité déchue, de tout ce qui va en ruine, de ce qui est corrompu et triste. Ce scénario montre que Jésus est la nouveauté au milieu de ce vieux monde, et qu’il est venu guérir et reconstruire pour ramener nos vies et le monde à leur splendeur originelle.

  1. Quelle émotion devrions-nous ressentir lorsque nous ajoutons dans la crèche des montagnes, des ruisseaux, des moutons et des bergers ! Nous nous souvenons ainsi, comme les prophètes l’avaient annoncé, que toute la création participe à la fête de la venue du Messie. Les anges et l’étoile de Bethléem sont le signe que nous sommes, nous aussi, appelés à nous mettre en route pour atteindre la grotte et adorer le Seigneur.

« Allons jusqu’à Bethléem pour voir ce qui est arrivé, l’événement que le Seigneur nous a fait connaître » (Lc 2, 15) : voilà ce que disent les bergers après l’annonce faite par les anges. C’est un très bel enseignement qui nous est donné dans la simplicité de sa description. Contrairement à tant de personnes occupées à faire mille choses, les bergers deviennent les premiers témoins de l’essentiel, c’est-à-dire du salut qui est donné. Ce sont les plus humbles et les plus pauvres qui savent accueillir l’événement de l’Incarnation. À Dieu qui vient à notre rencontre dans l’Enfant Jésus, les bergers répondent en se mettant en route vers Lui, pour une rencontre d’amour et d’étonnement reconnaissant. C’est précisément cette rencontre entre Dieu et ses enfants, grâce à Jésus, qui donne vie à notre religion, qui constitue sa beauté unique et qui transparaît de manière particulière à la crèche.

  1. Dans nos crèches, nous avons l’habitude de mettre de nombreuses santons symboliques. Tout d’abord, ceux des mendiants et des personnes qui ne connaissent pas d’autre abondance que celle du cœur. Eux aussi sont proches de l’Enfant Jésus à part entière, sans que personne ne puisse les expulser ou les éloigner du berceau improvisé, car ces pauvres qui l’entourent ne détonnent pas au décor. Les pauvres, en effet, sont les privilégiés de ce mystère et, souvent, les plus aptes à reconnaître la présence de Dieu parmi nous.

Les pauvres et les simples dans la crèche rappellent que Dieu se fait homme pour ceux qui ressentent le plus le besoin de son amour et demandent sa proximité. Jésus, « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29), est né pauvre, il a mené une vie simple pour nous apprendre à saisir l’essentiel et à en vivre. De la crèche, émerge clairement le message que nous ne pouvons pas nous laisser tromper par la richesse et par tant de propositions éphémères de bonheur. Le palais d’Hérode est en quelque sorte fermé et sourd à l’annonce de la joie. En naissant dans la crèche, Dieu lui-même commence la seule véritable révolution qui donne espoir et dignité aux non désirés, aux marginalisés : la révolution de l’amour, la révolution de la tendresse. De la crèche, Jésus a proclamé, avec une douce puissance, l’appel à partager avec les plus petits ce chemin vers un monde plus humain et plus fraternel, où personne n’est exclu ni marginalisé.

Souvent les enfants – mais aussi les adultes ! – aiment ajouter à la crèche d’autres figurines qui semblent n’avoir aucun rapport avec les récits évangéliques. Cette imagination entend exprimer que, dans ce monde nouveau inauguré par Jésus, il y a de la place pour tout ce qui est humain et pour toute créature. Du berger au forgeron, du boulanger au musicien, de la femme qui porte une cruche d’eau aux enfants qui jouent… : tout cela représente la sainteté au quotidien, la joie d’accomplir les choses de la vie courante d’une manière extraordinaire, lorsque Jésus partage sa vie divine avec nous.

  1. Peu à peu, la crèche nous conduit à la grotte, où nous trouvons les santons de Marie et de Joseph. Marie est une mère qui contemple son enfant et le montre à ceux qui viennent le voir. Ce santon nous fait penser au grand mystère qui a impliqué cette jeune fille quand Dieu a frappé à la porte de son cœur immaculé. À l’annonce de l’ange qui lui demandait de devenir la mère de Dieu, Marie répondit avec une obéissance pleine et entière. Ses paroles : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole » (Lc 1, 38), sont pour nous tous le témoignage de la façon de s’abandonner dans la foi à la volonté de Dieu. Avec ce « oui » Marie est devenue la mère du Fils de Dieu, sans perdre mais en consacrant, grâce à lui, sa virginité. Nous voyons en elle la Mère de Dieu qui ne garde pas son Fils seulement pour elle-même, mais demande à chacun d’obéir à sa parole et de la mettre en pratique (cf. Jn 2, 5).

À côté de Marie, dans une attitude de protection de l’Enfant et de sa mère, se trouve saint Joseph. Il est généralement représenté avec un bâton à la main, et parfois même tenant une lampe. Saint Joseph joue un rôle très important dans la vie de Jésus et de Marie. Il est le gardien qui ne se lasse jamais de protéger sa famille. Quand Dieu l’avertira de la menace d’Hérode, il n’hésitera pas à voyager pour émigrer en Égypte (cf. Mt 2, 13-15). Et ce n’est qu’une fois le danger passé, qu’il ramènera la famille à Nazareth, où il sera le premier éducateur de Jésus enfant et adolescent. Joseph portait dans son cœur le grand mystère qui enveloppait Jésus et Marie son épouse, et, en homme juste, il s’est toujours confié à la volonté de Dieu et l’a mise en pratique.

  1. Le cœur de la crèche commence à battre quand, à Noël, nous y déposons le santon de l’Enfant Jésus. Dieu se présente ainsi, dans un enfant, pour être accueilli dans nos bras. Dans la faiblesse et la fragilité, se cache son pouvoir qui crée et transforme tout. Cela semble impossible, mais c’est pourtant ainsi : en Jésus, Dieu a été un enfant et c’est dans cette condition qu’il a voulu révéler la grandeur de son amour qui se manifeste dans un sourire et dans l’extension de ses mains tendues vers tous.

La naissance d’un enfant suscite joie et émerveillement, car elle nous place devant le grand mystère de la vie. En voyant briller les yeux des jeunes mariés devant leur enfant nouveau-né, nous comprenons les sentiments de Marie et de Joseph qui, regardant l’Enfant Jésus, ont perçu la présence de Dieu dans leur vie.

« La vie s’est manifestée » (1Jn 1, 2) : c’est ainsi que l’Apôtre Jean résume le mystère de l’Incarnation. La crèche nous fait voir, nous fait toucher cet événement unique et extraordinaire qui a changé le cours de l’histoire et à partir duquel la numérotation des années, avant et après la naissance du Christ, est également ordonnée.

La manière d’agir de Dieu est presque étourdissante, car il semble impossible qu’il renonce à sa gloire pour devenir un homme comme nous. Quelle surprise de voir Dieu adopter nos propres comportements : il dort, il tète le lait de sa mère, il pleure et joue comme tous les enfants ! Comme toujours, Dieu déconcerte, il est imprévisible et continuellement hors de nos plans. Ainsi la crèche, tout en nous montrant comment Dieu est entré dans le monde, nous pousse à réfléchir sur notre vie insérée dans celle de Dieu ; elle nous invite à devenir ses disciples si nous voulons atteindre le sens ultime de la vie.

  1. Lorsque s’approche la fête de l’Épiphanie, nous ajoutons dans la crèche les trois santons des Rois Mages. Observant l’étoile, ces sages et riches seigneurs de l’Orient, s’étaient mis en route vers Bethléem pour connaître Jésus et lui offrir comme présent de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Ces dons ont aussi une signification allégorique : l’or veut honorer la royauté de Jésus ; l’encens sa divinité ; la myrrhe sa sainte humanité qui connaîtra la mort et la sépulture.

En regardant la scène de la crèche, nous sommes appelés à réfléchir sur la responsabilité de tout chrétien à être évangélisateur. Chacun de nous devient porteur de la Bonne Nouvelle pour ceux qu’il rencontre, témoignant, par des actions concrètes de miséricorde, de la joie d’avoir rencontré Jésus et son amour.

Les Mages nous enseignent qu’on peut partir de très loin pour rejoindre le Christ. Ce sont des hommes riches, des étrangers sages, assoiffés d’infinis, qui entreprennent un long et dangereux voyage qui les a conduits jusqu’à Bethléem (cf. Mt 2, 1-12). Une grande joie les envahit devant l’Enfant Roi. Ils ne se laissent pas scandaliser par la pauvreté de l’environnement ; ils n’hésitent pas à se mettre à genoux et à l’adorer. Devant lui, ils comprennent que, tout comme Dieu règle avec une souveraine sagesse le mouvement des astres, ainsi guide-t-il le cours de l’histoire, abaissant les puissants et élevant les humbles. Et certainement que, de retour dans leur pays, ils auront partagé cette rencontre surprenante avec le Messie, inaugurant le voyage de l’Évangile parmi les nations.

  1. Devant la crèche, notre esprit se rappelle volontiers notre enfance, quand nous attendions avec impatience le moment de pouvoir commencer à la mettre en place. Ces souvenirs nous poussent à prendre de plus en plus conscience du grand don qui nous a été fait par la transmission de la foi ; et en même temps, ils nous font sentir le devoir et la joie de faire participer nos enfants et nos petits-enfants à cette même expérience. La façon d’installer la mangeoire n’est pas importante, elle peut toujours être la même ou être différente chaque année ; ce qui compte c’est que cela soit signifiant pour notre vie. Partout, et sous différentes formes, la crèche parle de l’amour de Dieu, le Dieu qui s’est fait enfant pour nous dire combien il est proche de chaque être humain, quelle que soit sa condition.

Chers frères et sœurs, la crèche fait partie du processus doux et exigeant de la transmission de la foi. Dès l’enfance et ensuite à chaque âge de la vie, elle nous apprend à contempler Jésus, à ressentir l’amour de Dieu pour nous, à vivre et à croire que Dieu est avec nous et que nous sommes avec lui, tous fils et frères grâce à cet Enfant qui est Fils de Dieu et de la Vierge Marie ; et à éprouver en cela le bonheur. À l’école de saint François, ouvrons notre cœur à cette grâce simple et laissons surgir de l’émerveillement une humble prière : notre « merci » à Dieu qui a voulu tout partager avec nous afin de ne jamais nous laisser seuls.

Donné à Greccio, au Sanctuaire de la crèche, le 1er décembre 2019, la septième année de mon Pontificat.

François

BETHLEEM, CLAUDE TRICOIRE (1951-...), CRECHE, MEDITATIONS, NATIVITE DE JESUS, NOEL, UNE NUIT A BETHLEEM.... PRESQUE COMME LES AUTRES !

Une nuit à Bethléem… presque comme les autres !

Une nuit à Bethléem … presque comme les autres

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Hier

Il est venu une nuit qui semblait comme toutes les autres nuits

Il est venu de nuit.

C’était une nuit calme ou presque puisqu’il y avait beaucoup de monde à Bethléem ce jour là à cause de l’ordre de l’empereur Auguste qui avait ordonné le recensement de tous les habitants dans leur ville d’origine.

A part cet évènement dans cette bourgade rien de bien extraordinaire ! Rien n’annonçait un fait qui marquerait l’histoire du monde. Mise à part les auberges assaillies par le flot des nouveaux arrivants il n’y avait sans doute peu de quoi faire de grandes emplettes et encore moins de grands magasins où faire des achats dispendieux ; non, rien qui aurait pu distraire le voyageur et encore moins de grandes manifestations qui auraient annoncé un quelconque fait extraordinaire.

Il est né tellement discrètement que personne ne se doutait de rien comme seuls savent le faire les pauvres.

Et pourtant Il est venu !

Il est né discrètement comme pour ne déranger personne.

Il est venu chez les siens sans faire de fracas comme pour laisser le monde le découvrir au temps voulu.

Dieu s’est fait homme une nuit semblable à toutes les nuits dans le silence ! Il repose dans une simple mangeoire que Marie et Joseph ont trouvé dans une étable.

Ce fut cette nuit-là que le monde a reçu la LUMIERE …. Une lumière que nul ténèbre ne pourra jamais éteindre !

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Aujourd’hui

Il vient encore une nuit !

Il vient encore….

Tout le mois de décembre, chaque année, dans chaque ville, dans chaque village, les lumières des rues, les lumières des magasins brillent de mille feux qui aveuglent, qui veulent donner l’illusion d’une fête pour tous, d’un bonheur qui se veut accessible à tous. Mais c’est un moment où chacun voudrait oublier les tristes réalités du monde au milieu du bruit et au milieu de la foule. .

Tout le mois de décembre les magasins rivalisent de mille astuces pour attirer le client, pour vendre du rêve et du bonheur. Les sapins sont à chaque coin de rue, à chaque devanture. Les crèches aussi se font plus grandes les unes que les autres, plus décorées aussi… Comme elle est loin l’étable de Bethléem !

Les gens se pressent, se précipitent pour faire leurs achats et déambulent dans les rues les bras chargés de lourds cadeaux. Ils ont dépensé une fortune sans doute pour acheter un semblant de bonheur ! Et dans la nuit de Noël ils mangeront le foie gras et la dinde !

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Comme il est loin le dénuement de l’humble étable de Bethléem !

Comme il est loin le temps où il y a deux mille ans Marie et Joseph sont arrivés repus de fatigue, avec leur maigre bagage et personne pour leur offrir un logis ou un lit pour se reposer du voyage et faire naître un petit enfant !

Comme il loin le temps où il y a deux mille ans dans le silence de la nuit Dieu se faisait homme, homme parmi les hommes pour libérer l’humanité de ses chaines.

Comme elle est loin la nuit de Bethléem éclairée seulement par les étoiles ! Comme elle est loin la nuit de Bethléem où le silence ne fut rompu que par le chant des anges !

Lui seul est le vrai cadeau que personne ne peut acheter parce qu’Il se donne.

Lui seul est la vraie lumière venu en ce monde pour éclairer le monde et dissiper les ténèbres de nos vies !

AU COMMENCEMENT était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était au commencement auprès de Dieu.

C’est par lui que tout est venu à l’existence, et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui.En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ; la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée.

Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. Il était dans le monde, et le monde était venu par lui à l’existence, mais le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu.

 (Jn 1, 1-5.9-11)

©Claude Tricoire

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Basilique de La Nativité

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Le chant de la Vierge par Marie Noël

Le Chant de la Vierge Marie

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MARIE :
Je me hâte, je prépare,
Car nous entrons en Avent,
Le trousseau de mon Enfant.
« Joseph a taillé du hêtre
Pour sa Couchette de bois ;

LES ANGES :
Les Juifs tailleront du hêtre
Pour Lui dresser une Croix.

MARIE :
J’ai fait de beaux points d’épine
Sur Son petit bonnet rond ;

LES ANGES :
Nous avons tressé l’épine
En couronne pour Son front.

MARIE :
J’ai là des drapeaux de toile
Pour L’emmailloter au sec ;

LES ANGES :
Nous avons un drap de toile
Pour L’ensevelir avec.

MARIE :
Un manteau de laine rouge
Pour qu’Il ait bien chaud dehors ;

LES ANGES :
Une robe de sang rouge
Pour Lui couvrir tout le corps.

MARIE :
Pour Ses mains, Ses pieds si tendres,
Des gants, des petits chaussons ;

LES ANGES :
Pour Ses mains, Ses pieds si tendres,
Quatre clous, quatre poinçons.

MARIE :
La plus douce des éponges
Pour laver Son corps si pur ;

LES ANGES :
La plus dure des éponges
Pour L’abreuver de vin sur.

MARIE :
La cuiller qui tourne, tourne,
Dans Sa soupe sur le feu ;

LES ANGES :
La lance qui tourne, tourne
Dans son Cœur. Un rude épieu.

MARIE :
Et, pour Lui donner à boire,
Le lait tiède de mon sein ;

LES ANGES :
Et, pour Lui donner à boire,
Le fiel prêt pour l’assassin.

MARIE :
Au bout de l’Avent nous sommes,
Tout est prêt, Il peut venir…

LES ANGES :
Tout est prêt, Tu peux venir,
Ô Jésus, sauver les hommes »

Ainsi soit-il.

Marie Noël Rouget (1883-1967)

BERCEUSE DE LA MERE DE DIEU, MARIE-NOËL (1883-1967), MARIE-NOËL ROUGET (1883-1967), NATIVITE DE JESUS, NOEL, POEME, POEMES, PRIERE, PRIERES

Berceuse de la Mère de Dieu par Marie Noël

Berceuse de la Mère de Dieu

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Mon Dieu qui dormez faible entre mes bras,

Mon enfant tout chaud sur mon cœur qui bat,

J’adore en mes mains et berce étonnée,

La merveille, ô Dieu, que m’avez donnée.

De fils, ô mon Dieu, je n’en avais pas.

Vierge que je suis, en cet humble état,

Quelle joie en fleur de moi serait née ?

Mais Vous, Tout-Puissant, me l’avez donnée.

Que rendrais-je à vous, moi sur qui tomba

Votre grâce ? Ô Dieu, je souris tout bas

Car j’avais aussi, petite et bornée,

J’avais une grâce et Vous l’ai donnée.

De bouche, ô mon Dieu, Vous n’en aviez pas

Pour parler aux gens perdus d’ici-bas…

Ta bouche de lait vers mon sein tournée,

Ô mon fils, c’est moi qui te l’ai donnée.

De main, ô mon Dieu, Vous n’en aviez pas

Pour guérir du doigt leurs pauvres corps las…

Ta main, bouton clos, rose encor gênée,

Ô mon fils, c’est moi qui te l’ai donnée.

De chair, ô mon Dieu, Vous n’en aviez pas

Pour rompre avec eux le pain du repas…

Ta chair au printemps de moi façonnée,

Ô mon fils, c’est moi qui te l’ai donnée.

De mort, ô mon Dieu, Vous n’en aviez pas

Pour sauver le monde… Ô douleur ! là-bas,

Ta mort d’homme, un soir, noire, abandonnée,

Mon petit, c’est moi qui te l’ai donnée.

Marie Noël, Le Rosaire des joies 

Un poème de Marie Noël, qui fait parler la Vierge Marie avec la simplicité d’une mère. Celle-ci avoue l’émerveillement devant la naissance et la gratitude d’avoir été choisie pour être la mère de Dieu. Elle donne tout son prix à l’Incarnation en évoquant la bouche consolatrice, la main guérisseuse, la chair qui deviendra Eucharistie, qu’elle-même a façonnées. Enfin, elle dit dans les larmes le mystère de la Rédemption qui doit passer par la mort de son fils. En quelques strophes, tout le mystère de l’Incarnation et de la Rédemption est accompli.

CHARLES PEGUY, NATIVITE DE JESUS, NOËL, NOEL, POEME, POEMES, POETE FRANÇAIS, PRIERE, PRIERES

Le Noël de Charles Péguy

Le Noël de Charles Péguy 

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Je ne comprends pas les hommes, dit Dieu :
Tous s’apprêtent à fêter Noël et si peu pensent à mon Fils !
Noël est pourtant la fête de mon Fils, ou bien ?
Et eux, les hommes – pas tous, mais la plupart –
Font de Noël leur fête à eux.
Ils mangent et boivent en famille, ils se font des cadeaux.
Je veux bien qu’ils s’offrent des cadeaux,
Et demande même qu’ils en reçoivent.
Mais qu’ils n’oublient pas le cadeau extraordinaire
Que moi – Père – je leur ai fait de mon Fils unique.
A-t-on jamais vu un père donner son fils en cadeau ?
J’ai fait don de mon Fils aux hommes qui se perdaient,
Parce que mon amour pour eux
Ne voyait pas d’autre moyen de les sauver.
J’ai bien le droit de demander qu’à Noël
Les hommes pensent moins à leurs cadeaux à eux
Et davantage à mon cadeau à moi.
Et je sais à quel point cela vaudrait mieux pour eux.
Il faut être raisonnable, dit Dieu :
Ou bien fêter Noël et recevoir mon Fils, obéir à mon Fils,
Ou bien ne pas recevoir mon Fils, mais alors ne pas fêter Noël,
Il faut être raisonnable, dit Dieu.

 

Charles Péguy, écrivain et poète français (1873-1914) –

NOËL, NOEL, PRIERE AFRICAINE POUR LA NATIVITE DE JESUS, PRIERES

Prière africaine pour la nativité de Jésus

Noël tant attendu s’approche et cette année, je vous propose d’assister à la célébration de la Nativité au Congo invité par le poète-prêtre Aloys Shanyungu Mupenda –Watu. Nous pensons tout particulièrement aux priants du Congo de cette communauté !

Congo Nativity set with the Holy Family carved on wooden black

Abusirwe’ene*, Alléluia !

 

Conscients de l’événement splendide,
Ils étaient venus nombreux …
Les uns accroupis, assis à même le sol,
Debout ou adossés aux colonnes ;
Les autres obstinés à mettre à l’écart
Un certain rhumatisme naissant ;
Ils étaient là, en attente.

C’était alors le moment opportun
De profonde exhibition,
Lorsque le mudahwa** fit son entrée ;
Dans une ambiance très cadencée,
Tous étaient embarqués !

A voir l’atmosphère régnante,
Qui ne se réjouirait en se trémoussant,
à la vue de la multitude,
à la figure miroitante, rayonnante,

Et à la joie surabondante ?

Coup de sonnette donnée,
L’assistance n’avait qu’une seule pensée :
Glorifier l’Eternel,
Louer le « Grand-Attendu »,
L’Hôte de marque annoncé ;
Et elle s’y mit sans baragouiner.

A brûle-pourpoint,
Des cris jaillirent çà et là,
Accompagnant des mélodies quasi-angéliques,
Au rythme vif et enthousiaste ;
Le coup de pédale était donné !

Là quelqu’un marmonne,
Ici un autre toussote,
Là encore, un enfant regarde,
Ebahi et un peu souriant,
Stupéfait de tout ce qui se passait,
Ne comprenant rien à ce grand « carnaval » !

Un rire sur les lèvres,
Les chrétiens se dandinent, se trémoussent,
Y compris les enfants de chœur et les servants,
Enfants, jeunes et vieux pratiquants…
Oh oui ! Il fallait magnifier
Nyamuzinda-Nnamahanga*** !

Il y avait de quoi bondir d’allégresse…

Privé de la vue,
Comme l’aveugle de Jéricho,
Le maître des chants écoutait ;
Tout en battant la mesure adéquate…
Il dansait de son mieux !

Chacun pour sa part
Savourait l’atmosphère joyeuse,
Engagé ou non à faire bouger
Ventre, hanches, bras et épaules

C’était merveilleux à voir !

Loué soit le « Grand Visiteur » qui vient !
Glorifié soit le Rédempteur et l’homme !
Dans les cieux et sur la terre,
à Murhesa, Cibanda-Mpungwe,
Buhimba, Vulindi, Vuhira, Mufala,
Comme partout ailleurs…

Que cette allégresse se déverse,
En abondance, à fortes doses,
Jusqu’aux confins de la terre.
Gloria in excelsis Deo !
Et paix sur notre terre !

 

*Il est né aujourd’hui

**prêtre

***Deux noms différents de Dieu