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Notre-Dame de Paris

Notre-Dame de Paris, au cœur de l’histoire

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Notre-Dame est depuis 850 ans témoin des grandes heures de l’histoire de France. La Croix revient sur cinq moments, cinq dates de l’histoire de la cathédrale où elle n’a pas été seulement un lieu spirituel, mais aussi un lieu temporel et politique.

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Le Sacre de Napoléon par Jacques-Louis David (1808, musée du Louvre).MUSÉE DU LOUVRE, PARIS

Du sacre de Napoléon au Te Deum de la Libération, Notre-Dame de Paris a accueilli de nombreux événements marquants dans l’histoire de France. Au Moyen Âge, à la Renaissance, sous la Révolution, au XIXe siècle et à la Libération… La Croix fait le récit de cinq de ces moments clés.

Au Moyen Âge, une cathédrale politique (1/5)

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Vue générale de Paris sous Philippe-Auguste, gravure du XIXe siècle.

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Philippe Auguste, roi de France (1165-1223)

Au XIIIe siècle, Notre-Dame – dont la construction a débuté en 1165 – n’est pas encore achevée, mais le roi Philippe Auguste entend bien lui donner un rôle majeur dans la grande entreprise de son règne : la restauration du royaume de France.

► Après la Saint-Barthélemy, une cathédrale catholique (2/5)

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Mariage de Henri IV et de Marguerite de Valois le 18 août 1572. Lithographie de Régnier, 1832. B.N.F.

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Portrait du roi de France Henri IV, par Louis Hersent (1777-1860). Musée du château de Versailles (photo recadrée). / NPL/OPALE

Après avoir été le théâtre de la réconciliation manquée entre les catholiques et les protestants pour le mariage d’Henri de Navarre et Marguerite de Valois, le 18 août 1572, Notre-Dame devient un symbole de la royauté catholique à la fin du XVIe siècle sous le règne d’Henri IV, puis de son fils, Louis XIII.

► Sous la Révolution, une cathédrale républicaine (3/5)

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La fête de la raison à Notre-Dame de Paris le 10 novembre 1793, par Charles-Louis Müller.

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Jacques-René Hébert, l’un des leaders de la Commune, 1889. / HERITAGE/COLL.CHRISTOPHEL

D’abord objet de fascination pour les révolutionnaires de 1789, Notre-Dame est victime de l’entreprise de déchristianisation menée par la Commune pendant la Terreur. Vandalisée, elle retrouve de sa superbe avec l’arrivée au pouvoir de Napoléon qui tente de rétablir la paix religieuse dans le pays.

► Notre-Dame de Paris : avec Victor Hugo et Viollet-le-Duc, une cathédrale culturelle (4/5)

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Notre-Dame de Paris, par Arthur Ranson, couverture de Look and Learn, 1979.

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Victor Hugo jeune, lithographie couleur d’après une peinture à l’huile de Paul Gavarni, 1829. / Bridgeman Images

Au début du XIXe siècle, la cathédrale est délaissée et se trouve dans un état de délabrement avancé. Publié en 1831, le roman de Victor Hugo Notre-Dame de Paris joue un rôle essentiel dans sa réappropriation et elle bénéficie d’un grand plan de restauration confié une dizaine d’années plus tard à l’architecte Eugène Viollet-le-Duc.

► À la Libération, la cathédrale de la nation (5/5)

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La joie des Parisiens à la Libération devant Notre-Dame en août 1944.

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Charles de Gaulle à son arrivée à Notre-Dame pour le Te Deumle 26 août 1944. / JEAN-MARIE MARCEL / ADOC-PHOTOS

En 1944, le général de Gaulle est à Paris pour célébrer la Libération de la capitale. Il sait le passage par Notre-Dame obligé, mais il s’en méfie : le général tient à affirmer une conception laïque de la République et veut éviter de se compromettre avec certains religieux.

https://www.la-croix.com/France/Notre-Dame-Paris-Moyen-Age-cathedrale-politique-1-5-2022-08-22-1201229703

https://www.la-croix.com/France/Notre-Dame-Paris-Saint-Barthelemy-cathedrale-catholique-2-5-2022-08-23-1201229824

https://www.la-croix.com/France/Notre-Dame-Paris-Revolution-cathedrale-republicaine-3-5-2022-08-24-1201229963

https://www.la-croix.com/France/Notre-Dame-Paris-Victor-Hugo-Viollet-Le-Duc-cathedrale-culturelle-4-5-2022-08-25-1201230126

https://www.la-croix.com/France/Notre-Dame-Paris-Liberation-cathedrale-nation-5-5-2022-08-26-1201230291

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Film Notre-Dame brûle, un film de Jean-Jacques Annaud

Le film Notre-Dame brûle

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Dans Notre-Dame brûle: Annaud reconstitue minutieusement les faits

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Qui peut oublier où il se trouvait quand dans la soirée du lundi 15 avril 2019 en tout début de Semaine Sainte la nouvelle tombait que Notre-Dame de Paris brûlait ? Cette nouvelle avait vite fait de faire le tour du monde : les spectateurs assistaient avec stupeur et émotion à l’incendie de l’un des plus anciens patrimoines de la France : une cathédrale riche de souvenir historiques et l’héroïne d’un roman de Victor Hugo Notre-Dame de Paris. C’est se souvenir que Jean-Jacques Annaud avec l’aide de Jérôme Seydoux a décidé de nous montrer dans on film Notre-Dame brûle

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La journée du 15 avril avait pourtant commencé comme toutes les autres. Les visiteurs affluaient dans Notre-Dame. Une messe était entrain d’être célébrée vers 18 heures quand la première alerte a fait sortir tous les fidèles puis sont revenus tranquillement pour assister à la fin de la messe, messe interrompue quand on s’est aperçue qu’il y avait le feu à la cathédrale. A cela s’ajoutait le fait que malheureusement les poutres de bois étaient fragilisées, que l’entretien de la cathédrale de Paris était défectueux.

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Jean-Jacques Annaud détaille bien les faits qui ont provoqué cet incendie : un ouvrier qui fait tomber négligemment un mégot de cigarette, un stagiaire mal formée qui ignore le bon fonctionnement des alarmes. Quand les pompiers sont informés ils se précipitent mais leur arrivée est retardée par les embouteillages dans les rues de Paris et comme le montre bien le film feront tout leur possible pour circoncire le feu. Malheureusement on verra, comme le verront en direct des millions de téléspectateurs et les personnes agglutinées au pied de l’édifice, les différentes parties de l’édifice qui s’écroulent, la nef pleine de gravats et pour finir la flèche de la cathédrale qui s’effondre. Comme on le voit dans le film seront sauvés la plupart des objets précieux dont la Couronne d’épine du Christ rapportée de Terre Sainte par Louis IX.

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Jean-Jacques Annaud a réalisé pour son film une véritable prouesse technique et le soin apporté à la reconstitution des faits forcent le respect. Sont également perceptible l’émotion ressentie dans le monde et celui du peuple de Paris. Cependant on peut regretter certaines scènes : le conservateur des trésors de la cathédrale peinant à rejoindre Paris, celle de la vieille dame et son chat.. Ces scènes offrent au spectateur des moments de respiration, mais était-ce bien nécessaire ?

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Au final c’est un film qui rend hommage à la cathédrale Notre-Dame de Paris et aussi aux pompiers de Paris et des alentours mobilisées pour sauver l’édifice le plus visité au monde.

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©Claude Tricoire

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14 juillet : par Eric Vuillard

14 juillet

Eric Vuillard

Arles, Actes Sud Editions, 2016. 208 pages

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Dans « 14 juillet », Éric Vuillard raconte la prise de la Bastille en s’affranchissant de l’historiographie officielle telle que l’on peut l’apprendre dans les livres d’histoire. Menant avec brio un récit alerte composé de personnages vivants, il nous parle pour les lecteurs du 21e siècle, et rend justice à ceux qui ont mis en marche la Révolution française sans en avoir conscience.

Au départ, un sentiment d’injustice sourd au sein du Tiers-Etat qui trime et ne peut plus se nourrir : « un journalier gagne dix sous par jour, un pain de quatre livres en vaut quinze ». Alors la révolte gagne le peuple de Paris : à Versailles pendant ce temps-là c’est la gabegie,  les banquiers spéculent sur la dette, les esprits s’échauffent et les femmes réclament du pain. Faute d’être entendu, on commence à piller les palais, puis on recherche des armes. C’est finalement à la Bastille, prison d’Etat et symbole de l’arbitraire de l’Ancien Régime, que l’on va s’attaquer et devant la résistance de son gouverneur, la rage du peuple va se cristalliser autour de la forteresse.

Éric Vuillard se place au milieu de la foule, « le » personnage principal de cette chronique. Il donne un nom et un visage sortant les émeutiers de l’anonymat où les historiens les avaient entassés, en dressant des listes de noms, des listes de métiers, en décrivant les trognes et les vêtements de gros drap et de laine, l’organisation sur le tas, les idées lancées à la volée, les mots qu’on se répète dans un mouvement improvisé qui, parti du faubourg Saint-Antoine, enfle et se répand comme une traînée de poudre dans tout Paris et au-delà. Grâce à un travail d’archives remarquable, on les imagine, on peut les voir comme si on y était, ces hommes qui ont quitté échoppes et ateliers pour venir prêter main forte ; le lecteur a l’impression de la vivre heure après heure, cette prise de la Bastille, d’en connaître les protagonistes, et même ceux qui ont été tués, auxquels l’auteur donne une identité et des histoires de vie tellement plus riches que ce que contiennent les procès-verbaux, tout en dépeignant ces femmes du petit peuple, humbles et dignes qui viennent réclamer à l’administration le cadavre d’un mari ou d’un frère : des cœurs simples flaubertiens.

Eric Vuillard (1968-…)

Biographie :

Éric Vuillard est un écrivain, cinéaste et scénariste français.

Il publie un premier récit, « Le Chasseur », en 1999, puis deux livres aux tons poétiques (dont « Tohu », 2005), et un roman épique, sur la conquête du Pérou par Pizarro et la chute de l’Empire inca, « Conquistadors » (2009) qui a reçu le Prix Ignatius J. Reilly 2010.

Il a réalisé en 2008 un long métrage, « Mateo Falcone », qui est une adaptation de la nouvelle de Prosper Mérimée.

En 2012, il reçoit le Prix franco-allemand Franz Hessel pour « La Bataille d’Occident » et « Congo », puis le prix Valery-Larbaud 2013 pour les mêmes livres. En 2014, il publie « Tristesse de la terre » qui obtient un beau succès. Il est sélectionné pour plusieurs prix littéraires.

Son livre sur les coulisses de la Seconde Guerre mondiale, « L’Ordre du jour », remporte le prix Goncourt 2017.

En 2019, il publie un court récit littéraire aux confins de la fiction, de l’histoire et de la politique, relatant des luttes sociales du Moyen Âge, « La guerre des pauvres ».

Éric Vuillard vit actuellement à Rennes.

FRANCE, GUERRE FRANCO-PRUSSIENNE (1870-1871), GUERRES, HISTOIRE, HISTOIRE DE FRANCE, LA COMMUNE DE PARIS (18 mars - 27 mai 1871), PARIS (France)

La Commune de Paris (18 mars – 27 mai 1871)

la Commune (18 mars-27 mai 1871)

La Commune : barricade rue de Charonne

Tentative à implications révolutionnaires, faite par les ouvriers à Paris après l’insurrection du 18 mars 1871, pour assurer, dans un cadre municipal et sans recours à l’État, la gestion des affaires publiques.

  1. LE CONTEXTE

Proclamation de la République, le 4 septembre 1870, place de l’Hôtel de Ville

Cette insurrection prend naissance dans cette ville du travail qu’est devenu Paris en pleine croissance démographique (en 1866, sur 1 799 980 habitants, 57 % vivent du travail industriel et 12 % du travail commercial). Un mouvement ouvrier de plus en plus virulent se forme, des grèves se succèdent, manifestant la prise de conscience de la classe ouvrière, qui a obtenu en 1864 la reconnaissance du droit de grève. Parallèlement, à Londres, la Ière Internationale est créée. La guerre franco-allemande  éclate en juillet 1870 : les désastres militaires s’accumulent du côté français, et, le 4 septembre, la république est proclamée sous la poussée populaire. Le gouvernement de la Défense nationale qui est formé a pour mission de continuer la guerre et déclare « qu’il ne cédera pas un pouce de notre territoire ».

Très vite, cette république bourgeoise (composée entre autres du général Trochu, de Jules Favre et de Jules Ferry) est accusée de trahison par la population parisienne, qui, depuis le 19 septembre, subit avec héroïsme les conditions d’un siège de plus en plus difficile et qui réclame, en outre, des succès militaires.

  1. DE LA RÉSISTANCE AUX PRUSSIENS À L’ÉLECTION DE LA COMMUNE

Dans chaque arrondissement se constituent des comités de vigilance, bientôt chapeautés par un comité central pour aider le gouvernement et mobiliser toutes les forces de la nation. L’affrontement entre la république bourgeoise et le peuple armé au sein de la Garde nationale se dessine rapidement.

Cantine municipale pendant le siège de 1870

Dès octobre 1870, l’élection d’une Commune est demandée par la population. Après l’échec de Buzenval (19 janvier), les gardes nationaux réclament le 22 la guerre à outrance. Peu après la signature de l’armistice le 28, les forts sont occupés, l’enceinte fortifiée de Paris désarmée, 200 millions de francs sont versés à la Prusse en quinze jours.

Dans l’Assemblée nationale élue (8 février), les représentants conservateurs de la province (majoritaires), qui désirent la paix, s’opposent aux élus parisiens à majorité républicaine. Les députés, qui siègent à Bordeaux, prennent alors une série de mesures pour mater la ville révolutionnaire (suppression des 30 sous accordés aux gardes nationaux, suppression des moratoires concernant les loyers et les effets de commerce, qui touchent les ouvriers, les artisans et le petit commerce). Outre ces mesures, le transfert de l’Assemblée non à Paris mais à Versailles et l’entrée des Prussiens dans la capitale exaspèrent les Parisiens.

Adolphe Thiers

Thiers, dans la nuit du 17 au 18 mars, décide de désarmer la ville afin de la purger de « tous les rouges » en s’emparant des 227 canons regroupés à Montmartre et à Belleville (ils avaient été ramenés par les gardes nationaux du Ranelagh, des Champs-Élysées… avant l’entrée des Prussiens dans la capitale). Mais le 88e de ligne ne parvient pas à prendre les canons à Montmartre et, entouré par les gardes nationaux et la foule, pactise avec les Parisiens et désarme les officiers. Le général Lecomte, qui avait ordonné de tirer sur la foule, et le général Thomas sont fusillés.

Thiers, refusant toute négociation, donne l’ordre d’évacuer la ville et se réfugie à Versailles afin de ne pas se trouver prisonnier. Le Comité central de la Garde nationale siège alors à l’Hôtel de Ville et prépare les élections fixées au 22 mars. Il invite la France à « jeter les bases d’une république avec toutes ses conséquences et qui fermera pour toujours l’ère des invasions et des guerres civiles ». En attendant les élections, le Comité central de la Garde nationale, soutenu par l’Association internationale des travailleurs, les clubs et comités d’arrondissement et la fédération des chambres syndicales, agit comme un gouvernement.

Le 26 mars 1871, les élections municipales (qui ont été repoussées de quelques jours) s’accomplissent dans la légalité, les maires y ayant consenti. Le Conseil communal, élu par 229 167 votants sur 485 569 (soit environ 50 % d’abstention), est mis en place à l’Hôtel de Ville le 28 mars sous le nom de Commune de Paris et reçoit les pouvoirs du Comité central.

Louise Michel parlant aux communards

Sur 85 membres, 15 du « parti des maires » refusent de siéger. Les 70 membres restants sont idéologiquement très opposés et se répartissent en plusieurs groupes : les blanquistes (9), partisans de l’action directe (Charles Ferré, Raoul Rigault) ; les jacobins (Charles Delescluze, Gambon, Miot, Félix Pyat), qui veulent faire de Paris l’élément moteur du gouvernement de la France. La majorité est complétée par les révolutionnaires indépendants (Clément). Quant à la minorité ouvrière, composée d’internationaux militants (17 membres, dont Varlin, Frankel), elle s’inspire de Marx et Proudhon.. Le reste est indécis et comprend quelques personnalités comme Courbet, Zépherin Camélinat, Gustave Flourens.

Très vite le clivage entre la tendance majoritaire et minoritaire se produit. Si tous veulent consolider la république et consacrer l’autonomie absolue de la Commune de Paris, les uns veulent que cette dernière dirige dictatorialement la France comme en 1793, les autres qu’elle s’intègre à cette fédération des communes de France dans laquelle doit se dissoudre l’État.

  1. L’ACTION DE LA COMMUNE

3.1. LES COMMISSIONS

Le couronnement de l’édifice

Cette diversité d’opinions, qui s’ajoute à la dualité des pouvoirs entre le Comité central de la Garde nationale maintenu après les élections et le Conseil général de la Commune, contribue à diminuer l’efficacité de la Commune. Alors que des mouvements communalistes éclatent à Lyon (4 septembre), Saint-Étienne, au Creusot, à Limoges, Narbonne, Toulouse et surtout Marseille sous l’impulsion de Gaston Crémieux (fin mars-début avril 1871), mais sont rapidement réprimés par le gouvernement, Paris essaie de s’organiser militairement et politiquement. Dès le 29 mars, le Conseil de la Commune met sur pied neuf commissions, qui sont autant de véritables ministères, couronnées par une Commission exécutive qui devait jouer le rôle d’un véritable gouvernement à partir du 21 avril.

3.2. L’ŒUVRE SOCIALE DE LA COMMUNE

Écoles laïques

C’est dans le domaine du travail que la Commune manifeste sa volonté de donner un caractère social à son entreprise et fait œuvre de précurseur. Elle nomme un marxiste, Léo Frankel, , à la commission du Travail, de l’Industrie et des Échanges. Pour défendre les intérêts de la petite bourgeoisie et de la classe ouvrière, un certain nombre de mesures à caractère social sont prises : moratoire des effets de commerce et des loyers, abolition du travail de nuit des ouvriers boulangers, abolition des amendes et des retenues sur les salaires, suppression des bureaux de placement, enfin adoption de la journée de 10 heures. Il s’agit d’organiser le travail et d’en donner à ceux qui n’en ont pas. Aux Finances, la Commune a placé François Jourde, , comptable d’une honnêteté scrupuleuse qui reculera devant la nationalisation de la Banque de France, « n’osant toucher à la fortune de la France ».

3.3. L’INSTRUCTION LAÏQUE, OBLIGATOIRE ET GRATUITE

Dans le domaine de l’enseignement, la Commune agit avec vigueur. La commission de l’Enseignement, dirigée par Edouard Vailland, met en place une œuvre essentiellement laïque, obligatoire et gratuite, liée à l’attitude anticléricale de la Commune (suppression du budget des cultes et séparation des Églises et de l’État, transformation en propriété nationale des biens de mainmorte appartenant aux congrégations). Les municipalités sont invitées à créer des écoles professionnelles pour des jeunes filles, amorçant une réforme de l’enseignement primaire et professionnel.

  1. LA RÉACTION DU GOUVERNEMENT ET L’ÉCRASEMENT DE LA COMMUNE

4.1. VERSAILLAIS CONTRE COMMUNARDS

Très vite, cependant, l’effort de la Commune est absorbé par la lutte contre les forces de Thiers. Regroupées du 10 au 25 mai au camp de Satory et renforcées de soldats et d’officiers de l’armée de Mac-Mahon libérés par les Allemands et dotés d’une bonne artillerie, celles-ci comptent 130 000 hommes.

Après plusieurs échecs militaires (le fort d’Issy a failli tomber aux mains des versaillais), la Commune décide de créer un Comité de salut public (1er mai, renouvelé le 9 mai). Elle est en état d’infériorité du fait de l’incompétence des délégués à la Guerre (Cluseret, , Rossel, Delescluze), de l’indiscipline et de l’insuffisance des combattants : la Commune ne réussit à en mobilier qu’entre 20 000 et 30 000).

Les troupes versaillaises place de la Concorde

Les versaillais resserrent leur pression et s’emparent des forts de Vanves (13 mai) et d’Issy (8 mai) avant de pénétrer dans Paris par la porte de Saint-Cloud le 21 mai. Les troupes versaillaises gagnent le centre de la capitale, dont les rues se couvrent de barricades, défendues quartier par quartier, sous la direction d’un membre du Comité central, tandis que les Tuileries, l’Hôtel de Ville et la Cour des comptes sont la proie des flammes.

4.2. UNE IMPITOYABLE RÉPRESSION

Paris et ses ruines : l’Hôtel de Ville après l’incendie de la Commune en 1871

Aux massacres des Parisiens par les troupes de Thiers, les communards répondent en fusillant 52 otages, dont Monseigneur Darboy, , archevêque de Paris. Le 27 mai, les derniers combats se déroulent au cimetière du Père-Lachaise, où 200 communards se sont retranchés. À court de munitions, ces derniers se défendent à l’arme blanche mais sont vaincus par les versaillais qui achèvent les blessés et fusillent les derniers survivants contre le mur de l’enceinte, devenu depuis le mur des Fédérés. On appellera la semaine du 21 au 28 mai la « semaine sanglante ». Les jours suivants, les cours martiales continuent à condamner à mort.

Le mur des Fédérés

Du 3 avril au 31 mai, on estime entre 20 000 et 30 000 le nombre de Parisiens tués au combat ou exécutés (les versaillais ont perdu environ 1 millier d’hommes). Le gouvernement fait procéder à 40 000 arrestations environ, et les poursuites dureront jusqu’en 1874. Les 26 conseils de guerre prononceront 13 450 condamnations, dont 268 à mort (23 condamnés seront exécutés, dont Ferré et Rossel), les autres aux travaux forcés et à la déportation dans les bagnes de Nouvelle-Calédonie. Des milliers de vaincus doivent s’exiler. L’amnistie votée en 1880 ramènera en France les derniers survivants.

Si la dure répression qui s’est abattue sur les communards prive le mouvement ouvrier de ses chefs, l’influence de la Commune devait être considérable. Karl Marx en fit le symbole du soulèvement contre la bourgeoisie.

Les damnés de la Commune : tableau de Raphaël Meyssan

FRANCE, GENEVIEVE DE PARIS (sainte ; v. 420 - v. 500), HISTOIRE DE FRANCE, PARIS (France)

Sainte Geneviève de Paris (v. 420 – v. 500)

 

Geneviève de Paris

Geneviève (née à Nanterre vers 420, morte à Paris vers 500) est une sainte française, patronne de la ville de Paris, du diocèse de Nanterre et des gendarmes. La forme issue du latin Genovefa est également employée et a donné le nom Génovéfain (religieux).

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Hagiographie

La source unique d’informations historiques sur le personnage est la Vita de Geneviève, un texte hagiographique que l’auteur anonyme, probablement un clerc de l’Église de Paris, prétend écrire 18 ans après la mort de la sainte, vers 520, ce qui en fait un des très rares monuments littéraires du vie siècle en Gaule. Cette hagiographie génovéfaine Vita sanctae Genovefa empreinte de merveilleux et qui ne contient aucune chronologie est réalisée par un clerc qui a rassemblé tout ce qu’il savait d’elle par des témoins directs encore vivants.

L’abbé Saint-Yves, dans sa Vie de sainte Geneviève, donne une origine celtique au nom de Geneviève (Genovefa). Selon lui en gallois, genoeth veut dire « jeune fille » (cf. gaulois genata « jeune fille »). Cependant, le nom Genovefa est vraisemblablement la latinisation du francique *Kenowīfa ou *Kenuwefa, nom germanique féminin constitué des éléments ken- « genre, race » (apparenté à kin en anglais) et wīf « femme » (apparenté à wife en anglais et Weib en allemand). Pourtant, la plupart des sources font état d’une autre étymologie germanique, à savoir : *ginu- « grand, spacieux » et *waifō- « remuant ».

Les historiens ont maintes fois débattu des origines sociales de la sainte. Les biographes Dom Jacques Dubois et Laure Beaumont-Maillet ont tranché le débat : Geneviève, issue d’une riche famille de l’aristocratie gallo-romaine, est la fille unique de Severus (nom latin signifiant « austère »), probablement un Franc romanisé qui après une carrière d’officier, a exercé la fonction de régisseur de terres d’Empire et de Geroncia (ou Gerontia, nom grec « désignant une personne sage par l’âge et les vertus »). Elle aurait hérité en tant que fille unique de la charge de membre du conseil municipal (curia) détenue par son père, charge qu’elle aurait exercée tout d’abord à Nanterre, puis à Paris (faisant partie des dix principales constituant l’aristocratie municipale) après son installation dans cette ville chez une « marraine » influente. Baptisée, elle se voue très jeune à Dieu et, selon la légende, est remarquée par saint Germain d’Auxerre et saint Loup de Troyes, qui passent par Nanterre vers 430 (légende à l’origine de l’église Saint-Germain-de-Charonne), à l’occasion de leur voyage vers la province romaine de Bretagne (Grande-Bretagne actuelle). Elle mène une vie consacrée et ascétique, probablement dès ses seize ans. Selon la Vita sanctae Genovefae, à l’âge de 18 ou 20 ans, elle reçoit à Paris le voile des vierges des mains de l’évêque Wllicus, prélat inconnu des historiens. À la mort de ses parents vers 440, elle quitte Nanterre et vient s’établir chez sa marraine Procula en plein Paris, dans l’île de la Cité.

Selon la tradition, lors du siège de Paris en 451, grâce à sa force de caractère, Geneviève, qui n’a que 28 ans, convainc les habitants de Paris de ne pas abandonner leur cité aux Huns. Elle encourage les Parisiens à résister à l’invasion par les paroles célèbres :

« Que les hommes fuient, s’ils veulent, s’ils ne sont plus capables de se battre. Nous les femmes, nous prierons Dieu tant et tant qu’Il entendra nos supplications. »

De fait, Attila évita Lutèce (Paris).

Une autre hypothèse controversée prétend qu’elle aurait averti l’envahisseur d’une épidémie de choléra sévissant dans la région. Enfin, par ses liens avec les Francs, intégrés au dispositif romain, elle aurait pu savoir qu’Attila voulait s’attaquer d’abord aux Wisigoths en Aquitaine, et ne voulait sans doute pas perdre du temps devant Paris. Dans tous les cas, le plus important était d’empêcher les Parisiens de risquer leur vie en fuyant.

En 465, elle s’oppose à Childéric Ier, qui entreprend le siège de Paris, en parvenant à ravitailler plusieurs fois la ville avec du blé de la Brie et de Champagne, forçant alors le blocus.

Elle fait bâtir une chapelle sur l’emplacement du tombeau de saint Denis, premier évêque de Lutèce.

Elle convainc également Clovis, dont elle a toujours été une partisane, de faire ériger une église dédiée aux saints Pierre et Paul sur le mons Lucotitius (qui porte aujourd’hui le nom de montagne Sainte-Geneviève), dans l’actuel Ve arrondissement de Paris, au cœur du Quartier latin. Si l’historiographie récente avance une date de mort le 3 janvier 502, la tradition préfère celle du 3 janvier 512. Selon la Vita, elle meurt à l’âge de 89 ans dans l’ermitage de Paris, et est enterrée dans cette même église aux côtés de Clovis et rejointe plus tard par la reine Clotilde, ses plus célèbres disciples. L’église est d’abord confiée à des bénédictins, puis à des chanoines séculiers : c’est l’abbaye Sainte-Geneviève de Paris, dont le clocher est encore visible dans l’enceinte du lycée Henri-IV (ce clocher est connu sous le nom de « tour Clovis »).

Postérité

Sainte patronne

Sainte patronne de Paris et du diocèse de Nanterre, Geneviève est fêtée le 3 janvier. La Gendarmerie nationale, dont elle est également la sainte patronne, la fête, quant à elle, le 26 novembre, date du « Miracle des ardents » : en rapport avec l’intoxication par le seigle qui sévit à Paris en 1130.

Elle a une homonyme : sainte Geneviève de Loqueffret, une sainte bretonne que l’on fête aussi le 3 janvier comme son illustre patronne. Elle est invoquée pour les règles abondantes ou les périodes menstruelles prolongées chez la jeune fille vierge.

Châsse de sainte Geneviève

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Châsse de sainte Geneviève dans l’église Saint-Étienne-du-Mont

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Sarcophage de sainte Geneviève dans l’église Saint-Étienne-du-Mont.

Selon la tradition, le tombeau de sainte Geneviève est placé auprès de celui de Clovis dans la crypte de l’église Saint-Pierre-Saint-Paul (future abbaye Sainte-Geneviève de Paris), construite par le roi des Francs. Vers 630, saint Éloi orne le sarcophage de pierre de la sainte de plaques d’or, finement ciselées, et de pierres précieuses

La châsse est évacuée vers Draveil lors de la première invasion des Normands en 845. Elle y reste jusqu’en 853. La première procession connue a lieu en 886 lors du siège de Paris. En janvier 1162, court la rumeur que des réformateurs de l’abbaye ont dérobé le chef de sainte Geneviève en le séparant du reste de ses reliques. Louis VII fait apposer sur la châsse le sceau royal et ordonne une enquête solennelle. Le résultat de cette enquête rassure tout le monde et le chapitre décide que désormais le 10 janvier serait une fête célébrée avec autant de solennité que le 3, sous la dénomination d’Invention du chef de Sainte Geneviève. En 1230, ce coffre est endommagé à un tel point que l’abbé Robert de la Ferté-Milon confie l’exécution d’une nouvelle châsse en vermeil par l’orfèvre parisien Bonnard, de 1240 à 1242. Elle est reconstruite en 1614, sous la régence de Marie de Médicis.

Le port de la châsse est dévolu à l’origine aux Génovéfains. En 1412, une confrérie de Sainte Geneviève est érigée en vertu d’un bref du Pape et de lettres patentes de Charles VI qui finance les processions. Cette Confrérie accueillant par cooptation les membres éminents des grandes corporations de la ville, obtient en 1524 le privilège de porter la châsse.

Le 8 novembre 1793, la châsse de la sainte est transportée à la Monnaie où l’on fond les métaux précieux, tandis qu’on récupère les pierreries. Le 21 novembre, le Conseil général de Paris fait brûler les ossements de la sainte sur la place de Grève et fait jeter les cendres à la Seine.

La nouvelle châsse en cuivre entaillé et doré, honorée aujourd’hui dans l’église Saint-Étienne-du-Mont près du Panthéon, contiendrait quelques reliques (un avant-bras et quelques phalanges) qui avaient été envoyées dans d’autres sanctuaires avant la Révolution et qui ont ainsi pu être préservées des destructions. Bien que la châsse n’ait pas été portée processionnellement à l’extérieur depuis le xviiie siècle, la Confrérie des Porteurs de la châsse existe toujours, son rôle se bornant à la porter dans l’église même, au moment de la neuvaine. Le culte de la sainte, très populaire, explique qu’elle possède dans l’église plusieurs châsses, dont la plus grande qui contiendrait la pierre tombale de la sainte redécouverte en 1803 lors de la démolition de l’église Sainte-Geneviève

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Iconographie

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Sainte Geneviève qui tient de la main droite un cierge et de la main gauche un livre.

 

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Sainte Geneviève en bergère.

 

Sainte Geneviève dans la série des Reines de France et Femmes illustres du jardin du Luxembourg.

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Jusqu’au xvie siècle, Geneviève est représentée vêtue d’une robe de jeune fille noble, tenant à la main un cierge qu’un démon souvent essaie d’éteindre (en souvenir de la construction de la première basilique de Saint-Denis, dont elle visitait le chantier, de nuit, avec ses compagnons. Alors que le cierge que tient l’un deux s’éteint brusquement, elle le prend en main et il se rallume miraculeusement). À la fin du xvie siècle, elle est représentée en jeune bergère entourée de moutons, peut-être par confusion avec Jeanne d’Arc et les représentations de vierges pastourelles. Cette légende qui fait de Geneviève une bergère date du succès du poème latin de Pierre de Ponte paru en 1512, puis de la mode des bergeries qui se manifeste au xviie siècle. De nombreuses lithographies popularisent dans les chaumières la « bergère de Nanterre » au temps de la Restauration et de la Monarchie de Juillet.

Au xixe siècle, Pierre Puvis de Chavannes consacre un cycle de peintures à l’enfance de Geneviève (1874) au Panthéon de Paris.

En 1928, Paul Landowski réalise une statue de sainte Geneviève pour le pont de la Tournelle, qui traverse la Seine à Paris.

En 1945, Anna Quinquaud réalise une statue de Sainte Geneviève, aujourd’hui conservée à la Direction générale de la Gendarmerie nationale, Issy-les-Moulineaux.

 

Littérature

Plusieurs œuvres littéraires évoquent le personnage ou la vie de sainte Geneviève :

Le vendredi 3 janvier 1913, pour le 1400e anniversaire de sa mort, Charles Péguy écrit un poème intitulé La Tapisserie de sainte Geneviève et de Jeanne d’Arc

Elizabeth Brun, La vie de Sainte Geneviève, Patronne de Paris, biographie, Editions Mégard et Cie, Rouen, 1855.

Henri Lavedan, La belle histoire de Geneviève, roman dialogué, Société littéraire de France, Paris, 1920, 289 pages.

Mgr Yvon Aybram, Petite vie de sainte Geneviève (421-502), Desclée De Brouwer, 2013.

Érasme, Vers à Sainte Geneviève, traduit par Le Lièvre en 1611.

Musique

Marc-Antoine Charpentier a composé vers 1675 un motet Pour le jour de Ste Geneviève H 317 pour 3 voix, 2 dessus instrumentaux, et basse continue.

 

Bibliographie

Dom Jacques Dubois et Laure Beaumont-Maillet, Sainte Geneviève de Paris : la vie, le culte, l’art, Beauchesne, 1982, 167 p.

Face aux barbares, sainte Geneviève (423-502), Pierre Téqui éditeur, 2001

Emmanuel Bourassin, Sainte Geneviève, Editions du Rocher, 1997

Janine Hourcade, Sainte Geneviève hier et aujourd’hui, Mediaspaul Editions, 1998, 111 p.

FRANCE, GUERRE MONDIALE 1939-1945, HISTOIRE DE FRANCE, LIBERATION DE PARIS (25 août 1944), PARIS (France)

Libération de Paris (25 août 1944)

25 août 1944

La Libération de Paris

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Le vendredi 25 août 1944, à 15h 30, le général Philippe Leclerc de Hauteclocque (43 ans) reçoit à Paris, devant la gare Montparnasse, la capitulation des troupes d’occupation de la capitale.

Le document est signé par le général Dietrich von Choltitz, commandant du 84e corps d’armée. Il est aussi contresigné par le colonel Henri Rol-Tanguy, chef régional des FTP-FFI (Francs-tireurs et partisans des Forces Françaises de l’Intérieur).

Une heure plus tard, le général Charles de Gaulle lui-même arrive à la gare et se voit remettre par Leclerc l’acte de capitulation (il fait la moue en voyant la signature de Rol-Tanguy, représentant de la résistance intérieure, communiste de surcroît).

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On le voit ci-contre face aux généraux Philippe Leclerc, Alphonse Juin et Jacques Chaban-Delmas (de dos).

Peu après, cependant, il consent à tendre la main à la résistance intérieure et se rend à l’Hôtel de Ville où il est reçu par Georges Bidault, président du Conseil national de la Résistance. Comme celui-ci lui demande de proclamer le rétablissement de la République, de Gaulle rétorque qu’elle n’a jamais cessé d’exister.

Sur le perron, devant une foule enthousiaste et joyeuse, sous un beau soleil estival, il célèbre en des termes flamboyants la Libération de Paris : « Paris martyrisé ! mais Paris libéré !… ». Son discours improvisé est aussitôt retransmis à la radio.

« Paris libéré ! »

Le soir, de Gaulle s’installe au ministère de la Guerre en qualité de chef du gouvernement provisoire de la République française et le lendemain, 26 août 1944, le chef de la France libre descend en triomphe les Champs-Élysées, suivi de Leclerc et de ses fidèles de la première heure auxquels il a recommandé de se tenir derrière lui.

Dans une joyeuse pagaille, acclamé par deux millions de Parisiens, il arrive à la Concorde. Là éclatent des coups de feu sporadiques. Puis le général gagne Notre-Dame pour un Te Deum passionné.

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S’insurger ou attendre ?

La Libération de Paris a débuté le 10 août. Ce jour-là, les cheminots se mettent en grève. Ils sont suivis cinq jours plus tard par les policiers et les employés du métro, enfin par les postiers le 18 août. Dans le même temps, les troupes allemandes de la capitale commencent à plier bagage en prévision de l’arrivée prochaine des troupes alliées.

Celles-ci ont débarqué en Normandie deux mois plus tôt et progressent avec quelques difficultés vers l’est et l’Allemagne. Il est à noter que leurs chefs, les généraux américains Eisenhower et Bradley, n’envisagent pas un seul instant d’entrer à Paris. Ils ne veulent pas disperser leurs forces ni perdre du temps, encore moins prendre en charge 3 à 4 millions de Parisiens plus ou moins démunis. Ils préfèrent contourner l’agglomération et l’encercler.

Pour sa part, le général Pierre Koenig, chef d’état-major des Forces Françaises de l’Intérieur, souhaite qu’un soulèvement populaire précède l’arrivée des troupes alliées dans la capitale. Koenig ainsi que de Gaulle et le Comité national de la Résistance veulent de la sorte éviter une administration alliée, affirmer la souveraineté du peuple français et prouver que la résistance n’est pas un mythe.

Le soulèvement n’est pas sans risques.

Quelques jours plus tôt, le 1er août, les résistants de Varsovie ayant fait le même choix ont subi une répression d’une extrême violence. D’autre part, le risque existe d’un affrontement entre gaullistes et communistes. 

C’est à ces derniers, sous les ordres de Rol-Tanguy, que revient l’initiative du soulèvement proprement dit. Dès le 18 août, Paris se couvre d’affiches appelant la population à s’insurger.

Le 19 août, des combats sporadiques éclatent un peu partout. 3 000 policiers de Paris sont invités en secret à rejoindre la Préfecture de police de l’île de la Cité, au coeur de la capitale, en tenue civile et avec leur arme de service. Le drapeau tricolore est hissé au sommet de l’édifice au nez et à la barbe des Allemands. Mais les Alliés n’étant pas attendus dans la capitale avant le 1er septembre, les gaullistes jugent l’insurrection prématurée. Ils le font savoir à Rol-Tanguy par le biais d’une note transmise par l’intermédiaire de Jacques Chaban-Delmas (29 ans), délégué militaire national.

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Capitaine Rol-Tanguy

Au terme d’une violente discussion, les représentants du Comité national de la Résistance conviennent de négocier une trêve par l’intermédiaire du consul général de Suède, Raoul Nordling. Celui-ci a déjà obtenu du gouverneur militaire de Paris, von Choltitz, qu’il libère des prisonniers, dont 1482 juifs détenus dans le camp de Drancy, au nord de Paris.

Dans les faits, la trêve ne sera appliquée que de façon intermittente puis plus du tout. À l’aube du 20 août, un groupe de maquisards, sous les ordres du futur journaliste Roger Stéphane, occupent l’Hôtel de ville et arrêtent le président du conseil municipal, Pierre Taittinger, auquel on reproche ses compromissions avec l’occupant.

Le colonel Rol-Tanguy coordonne tant bien que mal les opérations à partir de son quartier général installé dans les catacombes de la place Denfert-Rochereau, en utilisant le réseau téléphonique du métro. Opposé à la trêve, il lance l’ordre de constituer partout des barricades. La population, aussitôt, se met avec frénésie à la tâche. On dépave les rues, on entasse des meubles et l’on coupe des arbres pour dresser un total de plus de 400 barricades comme au temps de la Commune ou des Journées de juin 1848.

Au nombre de plusieurs dizaines de milliers mais manquant d’armes lourdes et de munitions, les insurgés doivent faire face aux 16 000 soldats allemands, nerveux et lourdement armés, qui sillonnent la capitale à bord de 80 chars et d’autres véhicules blindés, le doigt sur la détente.

De la légende à la réalité

Dietrich Von Choltitz (48 ans), général de la vieille école, hésite sur la conduite à tenir. Il a prouvé en Russie, en rasant la ville de Sébastopol, qu’il était capable du pire.

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Maintenant, il est conscient que la défaite allemande est proche. Le consul Raoul Nordling lui signifie qu’il aura à répondre de ses actes devant les Alliés. Mais par ailleurs, sa femme et ses enfants sont à Nuremberg et répondent de sa loyauté au Führer. Lui-même a le souci de protéger la vie de ses hommes et de limiter les dégâts.

Comme il est habituel aux militaires en pareil cas, le général allemand fait miner les ponts de Paris en vue de ralentir les troupes alliées si elles venaient à pénétrer dans la ville. Ses artificiers commencent également à miner certains édifices (Palais-Bourbon et palais du Luxembourg).

On dit qu’il aurait reçu de Hitler, dès sa prise de fonctions le 7 août, l’ordre de détruire complètement Paris. L’ordre aurait été réitéré par un télégramme comminatoire du Führer mais le général l’aurait rejeté. Paris a-t-il vraiment été menacé de destruction ? Cette rumeur a été entretenue par le livre de Dominique Lapierre et Larry Collins, Paris brûle-t-il ? (1964) et le film à grand spectacle qui en a été tiré deux ans plus tard. Mais elle repose seulement sur les témoignages de von Choltitz lui-même et de quelques interlocuteurs soucieux comme lui de se donner belle figure.

Le 22 août, les événements se précipitent. Un chef FFI, le commandant Gallois, adjoint de Rol-Tanguy, traverse les lignes, rejoint le général Leclerc et lui fait part de la situation désespérée des insurgés parisiens.

Le même jour, de Gaulle et Koenig parviennent à convaincre le général Eisenhower d’intervenir. Ils obtiennent de celui-ci qu’il autorise le général Leclerc à faire un crochet vers la capitale. De Gaulle insiste auprès du généralissime américain pour que l’honneur de libérer la capitale revienne à un détachement français.

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Pêcheurs à la ligne

La presse parisienne est demeurée collaborationniste jusqu’au 19 août. Elle disparaît alors brusquement des kiosques et se voit remplacée par de nouveaux titres issus de la clandestinité. Parmi ceux-ci figure Combat, un journal dirigé par le jeune philosophe Albert Camus. L’un de ses collaborateurs est un autre philosophe, Jean-Paul Sartre. Il publie jour après jour sa chronique : « Un promeneur dans Paris insurgé »

Ainsi écrit-il : « L’insurrection n’est pas visible en tous lieux. Rue de la Gaîté, un accordéoniste aveugle joue la Traviata, assis sur un fauteuil pliant. Les gens se pressent dans un bistrot à demi ouvert et boivent un coup de vin. Sur les berges de la Seine, des hommes et des femmes se baignent ou se dorent au soleil en maillot de bain. »

Ultimes combats

À la tête des 15 000 hommes et femmes de sa 2e division blindée, sous uniforme et sous commandement américains, Leclerc se lance en avant. De Laval, il a 200 km à parcourir avant d’atteindre son but. Il contourne la banlieue ouest où le dispositif allemand est encore menaçant et contourne l’agglomération par le sud.

Le jeudi 24 août, en milieu de journée, il envoie un avion au-dessus de Paris. Celui-ci largue un message d’encouragement aux insurgés de la Préfecture de police, sur l’île de la Cité : « Tenez bon, nous arrivons ».

Après de rudes combats, ses hommes arrivent exténués à une cinquantaine de kilomètres de la capitale. À la Croix-de-Berny, pendant que les troupes prennent quelques heures de repos, Leclerc demande au capitaine Raymond Dronne de prendre les devants et d’entrer à Paris dès le soir.

Ce baroudeur commande la 9e compagnie du 1er Régiment de marche du Tchad, surnommée La Nueve du fait qu’elle comprend 120 vétérans espagnols de la guerre d’Espagne sur un total de 150 hommes ; il dispose aussi de trois chars (MontmirailChampaubertRomilly). Il avait inscrit sur une jeep sa profession de foi : « Mort aux cons » (« Vaste programme ! » aurait opiné le général de Gaulle en la voyant).

Dronne a donc l’honneur insigne d’être le premier Français libre à entrer dans la capitale par la porte d’Italie, le 25 août vers 20h30. À la tête de sa compagnie, il se rend derechef à l’Hôtel de Ville et se met en position de résister aux tirs des Allemands qui tiennent encore solidement la ville.

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Le reste de la 2e DB entre dans Paris le lendemain matin dès 9h, par les portes d’Italie, d’Orléans et d’Ivry. Les colonnes blindées doivent lutter partout contre les poches de résistance allemandes.

Le général Leclerc, qui est entré par la porte d’Orléans, gagne immédiatement la gare Montparnasse où il établit son quartier général.

Dans la rue de Rivoli, les 200 hommes qui défendent l’Hôtel Meurice, siège du commandement militaire allemand, se rendent vers 14h30 après une résistance de principe.

Von Choltitz lui-même se rend à un soldat de Leclerc, un ancien républicain espagnol, qui l’amène aussitôt au QG de la gare Montparnasse.

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Bilan affligeant

En quelques jours, la libération de Paris aura causé la mort de 76 soldats de la 2e division blindée ainsi que de 901 FFI et 3 200 Allemands. 12 800 soldats allemands ont été aussi faits prisonniers. Un bilan somme toute modéré si on le compare à l’effroyable répression du soulèvement de Varsovie.

Certains soldats allemands ont été lynchés par des « résistants de la 25e heure » cependant que des « coiffeurs de septembre » venus d’on ne sait où s’occuperont de tondre les femmes suspectées d’avoir couché avec l’occupant.

Parmi les drames les plus désolants, gardons en mémoire le souvenir de 35 garçons et filles qui avaient maladroitement confié à un agent double leur désir de combattre. Dans la nuit du 16 au 17 août, celui-ci les a livrés à la Gestapo (police allemande) qui les a fusillés près de la cascade du bois de Boulogne.

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https://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19440825&ID_dossier=125

CATHEDRALE DE PARIS, PARIS (France), THEOPHILE GAUTIER, VICTOR HUGO

Notre-Dame de Paris : en prose, en vers

Notre Dame de Paris  » Monde de poésie, en ce monde de prose »

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Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire. Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale, il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par moments un lambeau dans la fumée.

Notre Dame de Paris (1831), Victor Hugo

I
(…)
Comme, pour son bonsoir, d’une plus riche teinte, 
Le jour qui fuit revêt la cathédrale sainte, 
Ébauchée à grands traits à l’horizon de feu ; 
Et les jumelles tours, ces cantiques de pierre, 
Semblent les deux grands bras que la ville en prière, 
Avant de s’endormir, élève vers son Dieu.
 (…)
III
Et cependant, si beau que soit, ô Notre-Dame, 
Paris ainsi vêtu de sa robe de flamme, 
Il ne l’est seulement que du haut de tes tours. 
Quand on est descendu tout se métamorphose, 
Tout s’affaisse et s’éteint, plus rien de grandiose, 
Plus rien, excepté toi, qu’on admire toujours.

Car les anges du ciel, du reflet de leurs ailes, 
Dorent de tes murs noirs les ombres solennelles, 
Et le Seigneur habite en toi. 
Monde de poésie, en ce monde de prose, 
A ta vue, on se sent battre au cœur quelque chose ; 
L’on est pieux et plein de foi !

Aux caresses du soir, dont l’or te damasquine, 
Quand tu brilles au fond de ta place mesquine, 
Comme sous un dais pourpre un immense ostensoir ; 
A regarder d’en bas ce sublime spectacle, 
On croit qu’entre tes tours, par un soudain miracle, 
Dans le triangle saint Dieu se va faire voir.
 (…)

Théophile Gautier

 

Quelques lignes pour rendre hommage à Notre Dame de Paris ; se souvenir de ce qu’elle a été et rêver – avec espérance – à ce qu’elle deviendra car :

Qu’est-ce qu’il y aurait à la fin si tout était au commencement ?  Notre Dame de Paris, Victor Hugo

PARIS (France), POEME, POEMES, TABLEAU DE PARIS A CINQ HEURES DU SOIR

Tableau de Paris à cinq heures du soir de Marc-Antoine Desaugiers

Marc-Antoine Desaugiers (1772-1827)

Tableau de Paris à cinq heures du soir
(1802)
1673
Notice.

DÉSAUGIERS, après avoir tracé la peinture de Paris à cinq heures du Matin, voulut faire un pendant à son tableau, et esquissa Paris à cinq heures du Soir. Je dis esquissa, car quel pinceau pourrait rendre complètement la physionomie de l’immense capitale, à cette heure où commencent tant de scènes dramatiques et bouffonnes, tant d’orgies et de mystères lugubres, tant de misères et de brillantes folies. Et comment circonscrire ce qui ferait le sujet d’un vaste poème, dans le cadre étroit d’une Chanson.

Si l’auteur voulait prendre le ton de la satire, il lui fallait lutter avec Boileau et avec Voltaire. Tout le monde sait par cœur cette philippique qui commence par ces vers :

Qui frappe l’air, bon Dieu, de ces lugubres cris ?
Est-ce donc pour veiller qu’on se couche à Paris ?

Ce sont les embarras de la rue que Boileau a dépeints. Les scènes d’intérieur ont été retracées de la manière la plus piquante dans la pièce de Voltaire où il fait le tableau d’un salon de son époque :

Après dîner, l’insolente Glycère
Sort pour sortir, sans avoir rien à faire.
Le Chansonnier dans une revue rapide et générale aiguise un trait, moins acéré peut être, mais d’une philosophie plus gaie et olus rieuse ; car ce qui distingue Désaugiers des faiseurs de chansons qui remplissent leurs couplets de banalités, et qui amènent tant bien que mal un refrain vulgaire, c’est qu’il pense souvent en philosophe et écrit en poète.

Le gai Désaugiers, avec son extérieur joyeux, était un homme mélancolique. Épanoui dans la société, son ame était rêveuse dans la solitude. Bouffon en apparence, boute-en-train à table, il était au fond épicurien, dans l’acception que l’on doit donner à ce mot. Epicurien à la façon de Chaulieu et de Saint-Evremond.

Désaugiers avait fait d’excellentes études, il était nourri de plusieurs modèles, et quand il s’élevait, il était à leur hauteur, autant que le lui permettait le genre auquel il avait voué sa muse. Il chante son refrain Il faut rire, ou il faut boire, comme Horace disait : Nunc est bibendum.

La Chanson de l’Epicurien est le code philosophique d’un homme dont le cœur est sensible ; et plusieurs Romances, où Désaugiers a laissé tomber ses pensées mélancoliques, respirent une grace touchante. Tant il est vrai que malgré soi, l’homme se peint toujours dans un coin de ses écrits.

Marc-Antoine Désaugiers, né à Fréjus en 1772, reçut bien jeune encore les leçons du malheur. C’est à cette école que les ames se trempent fortement ; la sienne résista aux plus rudes épreuves. Il raconte lui-même dans la préface de son premier recueil de chansons, comment la gaité le soutint dans les circonstances les plus pénibles, au milieu des horreurs de l’insurrection de Saint-Domingue, au moment où, condamné par un conseil de guerre, et les yeux déjà couverts d’un bandeau, il allait recevoir le coup fatal, lorsque par miracle il fut soustrait à la mort. Il appelle gaité ce qui était le courage de la résignation.

Il revoit sa patrie, et le goût de la poésie et du théâtre qui est si rarement la route de la fortune, l’entraîne par ces jouissances qui ne sont connues que de ceux qui aiment les lettres pour elles-mêmes. Il s’essaye dans ces petits spectacles où l’on retirait de ses pièces un gain bien léger, à cette époque où les théâtres supérieurs offraient eux-mêmes aux auteurs d’assez faibles ressources. Il voyage avec quelques amis, et leur bourse légère étant épuisée, ils se font acteurs de circonstance. Leur talent ne répondant pas à leur bonne volonté, ils fuyent la scène ingrate qui ne les nourrissait pas, et laissent jusqu’à leurs vêtements pour gages.

Mais de retour à Paris, Désaugiers parvient enfin à faire connaître son esprit, et bientôt son talent et son caractère lui assurent une position.

Dès lors, il marche de succès en succès. Sa verve s’anime, il chante, il est partout reçu, accueilli, fêté. Ses jours s’écoulent dans la joie, on l’applaudi au théâtre, on l’applaudit dans les banquets, où ses Chansons, chantées par lui, avaient un double attrait, car il les chantait aussi bien qu’il les faisait.

Le Caveau moderne nomme son président, celui qui avait hérité de l’esprit de Collé, de la gaité de Vadé, et du sel de Panard. Le Théâtre du Vaudeville choisit pour directeur l’émule des Piis et des Barré.

Mais Désaugiers n’économisait ni ses forces ni son esprit, il abrégea sa carrière en la remplissant trop. Il n’avait que cinquante-cinq ans, lorsque sa santé robuste chancela sous les rudes assauts qu’il lui faisait soutenir. Un lit de douleurs fut le dernier asyle de sa gaité. L’esprit lutta en vain contre le corps épuisé. Il fit en riant son épitaphe, et ses amis la lurent en pleurant.

Le 9 août 1827, Désaugiers ne chantait plus.

 

DU MERSAN.

 

Texte.

 

 

En tous lieux la foule
Par torrents s’écoule ;
L’un court, l’autre roule ;
Le jour baisse et fuit,
Les affaires cessent ;
Les dîners se pressent,
Les tables se dressent ;
Il est bientôt nuit.

Là, je devine
Poularde fine,
Et bécassine,
Et dindon truffé ;
Plus loin je hume
Salé, légume,
Cuits dans l’écume
D’un bœuf réchauffé.

Le sec parasite
Flaire… et trotte vite
Partout où l’invite
L’odeur d’un repas ;
Le surnuméraire
Pour vingt sous va faire
Une maigre chère
Qu’il ne paiera pas.

Plus loin qu’entends-je ?
Quel bruit étrange
Et quel mélange
De tons et de voix !
Chants de tendresse,
Cris d’allégresse,
Chorus d’ivresse
Partent à la fois.

Les repas finissent ;
Les teints refleurissent ;
Les cafés s’emplissent ;
Et trop aviné,
Un lourd gastronome
De sa chûte assomme
Le corps d’un pauvre homme
Qui n’a pas dîné.

Le moka fume,
Le punch s’allume,
L’air se parfume ;
Et de crier tous :
« Garçons, ma glace !
– Ma demi-tasse !…
– Monsieur, de grâce,
L’Empire après vous. »

Les journaux se lisent ;
Les liqueurs s’épuisent,
Les jeux s’organisent ;
Et l’habitué,
Le nez sur sa canne,
Approuve ou chicane,
Défend ou condamne
Chaque coup joué.

La Tragédie,
La Comédie,
La Parodie,
Les escamoteurs ;
Tout, jusqu’au drame
Et mélodrame,
Attend, réclame
L’or des amateurs.

Les quinquets fourmillent ;
Les lustres scintillent ;
Les magasins brillent ;
Et l’air agaçant
La jeune marchande
Provoque, affriande
Et de l’œil commande
L’emplette au passans.

Des gens sans nombre
D’un lieu plus smbre
Vont chercher l’ombre
Chère à leurs desseins.
L’époux convole,
Le fripon vole,
Et l’amant  vole
A d’autres larcins.

                       
Jeannot, Claude, Blaise,
Nicolas, Nicaise,
Tous cinq de Falaise
Récemment sortis,
Elevant la face,
Et cloués sur place,
Devant un Paillasse
S’amusent gratis.

La jeune fille,
Quittant l’aiguille,
Rejoint son drille
Au bal du Lucquet ;
Et sa grand’mère
Chez la commère,
Va coudre et faire
Son cent de piquet.

Dix heures sonnées,
Des pièces données
Trois sont condamnées
Et se laissent choir.
Les spectateurs sortent,
Se poussent, se portent…
Heureux s’ils rapportent
Et montre et mouchoir !

« Saint-Jean, la Flèche,
Qu’on se dépêche…
Notre calêche !
– Mon cabriolet ! »
Et la livrée,
Quoiqu’enivrée,
Plus altérée
Sort du cabaret.

Les carrosses viennent,
S’ouvrent et reprennent
Leurs maîtres qu’ils mènent
En se succédant ;
Et d’une voix âcre,
Le cocher de fiacre
Peste, jure et sacre
En rétrogradant.                     
Quel tintamarre !
Quelle bagarre !
Aux cris de gare
Cent fois répétés,
Vite on traverse,
On se renverse,
On se disperse
De tous les côtés.

La sœur perd son frère,
La fille son père,
Le garçon sa mère
Qui perd son mari ;
Mais un galant passe,
S’avance avec grâce,
Et s’offre à la place
De l’époux chéri.

Plus loin des belles
Fort peu rebelles,
Par ribambelles
Errant à l’écart,
Ont doux visage,
Gentil corsage…
Mais je suis sage…
D’ailleurs il est tard.

Faute de pratique,
On ferme boutique,
Quel contraste unique
Bientôt m’est offert !
Ces places courues,
Ces bruyantes rues,
Muettes et nues,
Sont un noir désert.

Une figure
De triste augure
M’approche et jure
En me regardant…
Un long qui vive ?
De loin m’arrive,
Et je m’esquive
De peur d’accident.

Par longs intervalles,
Quelques lampes pâles,
Faibles, inégales,
M’éclairent encor…
Leur feu m’abandonne
L’ombre m’environne ;
Le vent seul résonne,
Silence !… tout dort.

 

http://www.miscellanees.com/d/paris02.htm

MARC-ANTOINE DESAUGIERS (1772-1827), PARIS (France), POEME, POEMES, TABLEAU DE PARIS A CINQ HEURES DU MATIN

Paris cinq heures du matin (Marc-Antoine Désaugiers)

Marc-Antoine Désaugiers (1772-1827)

Tableau de Paris à cinq heures du matin (1802)

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Que de tableaux on a faits de cette grande capitale de la France et de la civilisation ! sous combien d’aspects, en effet, on peut la peindre ! Mercier, ce bizarre écrivain, ou plutôt fabricateur d’écrits en tout genre, qui se donnait tant de peine pour singer l’originalité, fut le premier qui entreprit ce portrait en grand. Jusque-là, on s’était borné à en décrire les monuments et les édifices ; il voulut en retracer aussi les usages et les mœurs. Son Tableau de Paris ne manquait point, dans quelques parties, d’observation et de vérité ; mais un philosophisme frondeur et bavard, un manque presque total de vues saines et élevées, condamnaient cette œuvre à la médiocrité. Son style, sans correction et sans couleur, acheva de la vouer à l’oubli. Aussi n’en reste-t-il guère aujourd’hui dans nos souvenirs que cet arrêt porté sur elle par un ingénieux critique : « Livre pensé dans la rue et écrit sur la borne ! » 

Mercier, toutefois, se crut, d’après cette ébauche, promu en quelque sorte à l’emploi de peintre officiel et permanent de notre capitale. En 1796, il en recommençait le tableau sous le titre du Nouveau Paris ; mais cette fois ce fut pis encore. Outre ses divagations personnelles, il y entassa les doctrines et rêveries politiques de l’époque : ce qui en rendit la lecture dès lors très fastidieuse, et aujourd’hui à peu près impossible.

Au temps où il avait entrepris son premier travail, c’était tenter une espèce de voyage de découvertes dans cette cité-monde. Il en avait laissé beaucoup à faire à ses successeurs, et vingt années de révolutions les avaient multipliées pour eux. Aussi un assez grand nombre d’observateurs se lancèrent dans cette carrière, avec plus ou moins de succès. Salgues, Gallois, Saint-Victor, Dulaure, etc., y consacrèrent tour à tour leurs pinceaux. Ajoutons que, pour justifier un adage de nos jours : 

Tout s’entreprend par compagnie. 

La capitale a également fourni les sujets de deux ouvrages assez volumineux, éclos de l’association de divers écrivains, le Livre des Cent-Un, et le Nouveau Tableau de Paris.

Paris a aussi inspiré, comme on sait, des compositions moins graves ; ainsi le spirituel Ermite de la Chaussée-d’Antin en crayonna, sous l’Empire, avec une légèreté railleuse les mœurs et les ridicules, et Picard voulut en transporter sur le théâtre le panorama critique ; mais il fut moins heureux avec la Grande Ville qu’avec la Petite.

Depuis longtemps la Poésie avait aussi trouvé des couleurs sur sa palette pour retracer au moins quelques traits de la physionomie de cette vaste cité, et la verve satyrique de Boileau en avait les embarras, qui, de nos jours, auraient fourni un ample supplément à ses descriptions. Désaugiers ne voulut pas que la Chanson fût déshérité dans ce partage ; il saisit, pour faire poser Paris devant lui, l’instant où le portrait devait être et rester le plus vrai, cinq heures du matin, moment où n’ayant point encore fait sa toilette, Paris s’offrait à lui 

 

……. Dans le simple appareil
D’une cité qui vient d’échapper au sommeil.

 

Grâce à cet habile choix, ce tableau a conservé, après un demi-siècle, toute sa fraîcheur, tout son coloris. Son exécution finie l’a rendu il est vrai l’un des chefs-d’œuvre de son auteur. Là ne brille pas seulement sa vive et franche gaité ; observation fine, critique maligne, morale enjouée, tout s’y trouve réuni et disposé avec un art qui a tout le charme du naturel. 

Dans cette production, Désaugiers s’imposa en outre la tâche et mérita le prix de la difficulté vaincue par le choix de son rythme. Sur la contredanse du Ballet de la rosière, de Gardel aîné, il fit courir pour ainsi dire une foule de vers rapides, courts et légers, de rimes redoublées, qui constituent ce que l’on appelle chez nous le couplet de facture. C’est un mérite de plus, quand il n’a rien coûté au sens, au goût et à la vérité ; et, à tous ces titres, cette jolie miniature restera l’un des ornements de notre Musée lyrique.

OURRY, membre du Caveau moderne.

 

 

 

L’ombre s’évapore
Et déjà l’aurore
De ses rayons dore
Les toits alentours
Les lampes pâlissent,
Les maisons blanchissent
Les marchés s’emplissent :
On a vu le jour.

De la Villette
Dans sa charrette,
Suzon brouette
Ses fleurs sur le quai,
Et de Vincenne,
Gros-Pierre amène
Ses fruits que traîne
Un âne efflanqué.

Déjà l’épicière,
Déjà la fruitière,
Déjà l’écaillère
Sautent au bas du lit.
L’ouvrier travaille,
L’écrivain rimaille,
Le fainéant baille,
Et le savant lit.

J’entends Javotte,
Portant sa hotte,
Crier : Carotte,
Panais et chou-fleur !
Perçant et grêle,
Son cri se mêle
A la voix frêle
Du noir ramoneur.

 

L’huissier carillonne,
Attend, jure, sonne,
Ressonne, et la bonne,
Qui l’entend trop bien,
Maudissant le traître,
Du lit de son maître
Prompte à disparaître,
Regagne le sien.

Gentille, accorte
Devant ma porte
Perrette apporte
Son lait encor chaud ;
Et la portière,
Sous la gouttière,
Pend la volière
De Dame Margot.

Le joueur avide,
La mine livide,
et la bourse vide,
Rentre en fulminant ;
Et sur son passage,
L’ivrogne, plus sage,
Rêvant son breuvage,
Ronfle en fredonnant.

Tout, chez Hortense,
Est en cadence ;
On chante, on danse,
Joue, et cætera…
Et sur la pierre
Un pauvre hère,
La nuit entière,
Souffrit et pleura.

Le malade sonne,
Afin qu’on lui donne
La drogue qu’ordonne
Son vieux médecin ;
Tandis que sa belle,
Que l’amour appelle,
Au plaisir fidèle,
Feint d’aller au bain.

Quand vers Cythère,
La solitaire,
Avec mystère,
Dirige ses pas,
La diligence
Part pour Mayence,
Bordeaux, Florence,
Ou les Pays-Bas.

« Adieu donc, mon père,
Adieu donc, mon frère,
Adieu donc, ma mère,
– Adieu, mes petits. »
Les chevaux hennissent,
Les fouets retentissent,
Les vitres frémissent :
Les voilà partis.

 

Dans chaque rue,
Plus parcourue,
La foule accrue
Grossit tout à coup :
Grands, valetaille,
Vieillards, marmaille,
Bourgeois, canaille,
Abondent partout.

Ah ! quelle cohue !
Ma tête est perdue,
Moulue et fendue,
Où donc me cacher !
Jamais mon oreille
N’eut frayeur pareille…
Tout Paris s’éveille…
Allons nous coucher.

 

http://www.miscellanees.com/d/paris01.htm

PARIS (France), POEME, POEMES

Paris vue par les poètes

Paris célébrée par les poètes

 

Des poèmes qui rendent hommage à la capitale française. Chaque poète décrit Paris à sa manière en mettant en avant des attributs différents, de l’architecture à la joie de vivre des habitants en passant par les lieux cultes et des souvenirs personnels.

 

  

Enfants de la haute ville, Jacques Prévert

 

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Enfants de la haute ville
filles des bas quartiers
le dimanche vous promène
dans la rue de la Paix
Le quartier est désert
les magasins fermés
Mais sous le ciel gris souris
la ville est un peu verte
derrière les grilles des Tuileries
Et vous dansez sans le savoir
vous dansez en marchant
sur les trottoirs cirés
Et vous lancez la mode
sans même vous en douter
Un manteau de fou rire
sur vos robes imprimées
Et vos robes imprimées
sur le velours potelé
de vos corps amoureux
tout nouveaux tout dorés

Folles enfants de la haute ville
ravissantes filles des bas quartiers
modèles impossibles à copier
cover-girls
colored girls
de la Goutte d’Or ou de Belleville
de Grenelle ou de Bagnolet.

 

  

La Seine a rencontré Paris, Jacques Prévert

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Qui est là
toujours là dans la ville
et qui pourtant sans cesse arrive
et qui pourtant sans cesse s’en va
C’est un fleuve répond un enfant
un devineur de devinettes.
Et puis l’œil brillant il ajoute
et le fleuve s’appelle la Seine
quand la ville s’appelle Paris
et la Seine c’est comme une personne
des fois elle court elle va très vite
elle presse le pas quand tombe le soir
des fois au printemps elle s’arrête et
vous regarde comme un miroir.
Et elle pleure si vous pleurez
ou sourit pour vous consoler
et toujours elle éclate de rire quand
arrive le soleil d’été…

 

  

La Tour Eiffel, Maurice Carême

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Mais oui, je suis une girafe,
M’a raconté la tour Eiffel,
Et si ma tête est dans le ciel,
C’est pour mieux brouter les nuages,
Car ils me rendent éternelle.
Mais j’ai quatre pieds bien assis
Dans une courbe de la Seine.
On ne s’ennuie pas à Paris :
Les femmes, comme des phalènes,
Les hommes, comme des fourmis,
Glissent sans fin entre mes jambes
Et les plus fous, les plus ingambes
Montent et descendent le long
De mon cou comme des frelons
La nuit, je lèche les étoiles.
Et si l’on m’aperçoit de loin,
C’est que très souvent, j’en avale
Une sans avoir l’air de rien.

 

 

Sous le pont Mirabeau, Guillaume Apollinaire

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Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait toujours après la peine.

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l’onde si lasse

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

L’amour s’en va comme cette eau courante
L’amour s’en va
Comme la vie est lente
Et comme l’Espérance est violente

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure
Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine

 

 

Chanson de la Seine, Jacques Prévert

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La Seine a de la chance
Elle n’a pas de souci
Elle se la coule douce
Le jour comme la nuit
Et elle sort de sa source
Tout doucement, sans bruit…
Sans sortir de son lit
Et sans se faire de mousse,
Elle s’en va vers la mer
En passant par Paris.
La Seine a de la chance
Elle n’a pas de souci
Et quand elle se promène
Tout au long de ses quais
Avec sa belle robe verte
Et ses lumières dorées
Notre-Dame jalouse,
Immobile et sévère
Du haut de toutes ses pierres
La regarde de travers
Mais la Seine s’en balance
Elle n’a pas de souci
Elle se la coule douce
Le jour comme la nuit
Et s’en va vers le Havre
Et s’en va vers la mer
En passant comme un rêve
Au milieu des mystères
Des misères de Paris

 

 

Paris blanc, Pierre Coran

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La neige et la nuit
Tombent sur Paris,
A pas de fourmi.

Et la ville au vent
Peint l’hiver en blanc,
A pas de géant.

La Seine sans bruit
Prend couleur d’encens
Et de tabac gris.

A l’hiver en blanc,
Le temps se suspend,
A pas de fourmi.

A pas de géant
Tombent sur Paris
La neige et la nuit.

 

  

Sur la ville de Paris, Isaac de Benserade

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Rien n’égale Paris ; on le blâme, on le louë ;
L’un y suit son plaisir, l’autre son interest ;
Mal ou bien, tout s’y fait, vaste grand comme il est
On y vole, on y tuë, on y pend, on y rouë.

On s’y montre, on s’y cache, on y plaide, on y jouë ;
On y rit, on y pleure, on y meurt, on y naist :
Dans sa diversité tout amuse, tout plaist,
Jusques à son tumulte et jusques à sa bouë.

Mais il a ses défauts, comme il a ses appas,
Fatal au courtisan, le roy n’y venant pas ;
Avecque sûreté nul ne s’y peut conduire :

Trop loin de son salut pour être au rang des saints,
Par les occasions de pécher et de nuire,
Et pour vivre longtemps trop prés des médecins.

 

  

Paris, Louis Aragon

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Où fait-il bon même au cœur de l’orage
Où fait-il clair même au cœur de la nuit
L’air est alcool et le malheur courage
Carreaux cassés l’espoir encore y luit
Et les chansons montent des murs détruits

Jamais éteint renaissant dans sa braise
Perpétuel brûlot de la patrie
Du Point-du-Jour jusqu’au Père Lachaise
Ce doux rosier au mois d’août refleuri
Gens de partout c’est le sang de Paris

Rien n’a l’éclat de Paris dans la poudre
Rien n’est si pur que son front d’insurgé
Rien n’est si fort ni le feu ni la foudre
Que mon Paris défiant les dangers
Rien n’est si beau que ce Paris que j’ai

Rien ne m’a fait jamais battre le cœur
Rien ne m’a fait ainsi rire et pleurer
Comme ce cri de mon peuple vainqueur
Rien n’est si grand qu’un linceul déchiré
Paris Paris soi-même libéré

 

 

Le Spleen de Paris, Charles Baudelaire

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Le cœur content, je suis monté sur la montagne
D’où l’on peut contempler la ville en son ampleur,
Hôpital, lupanars, purgatoire, enfer, bagne,
Où toute énormité fleurit comme une fleur.
Tu sais bien, ô Satan, patron de ma détresse,
Que je n’allais pas là pour répandre un vain pleur ;
Mais comme un vieux paillard d’une vieille maîtresse,
Je voulais m’enivrer de l’énorme catin
Dont le charme infernal me rajeunit sans cesse.
Que tu dormes encor dans les draps du matin,
Lourde, obscure, enrhumée, ou que tu te pavanes
Dans les voiles du soir passementés d’or fin,
Je t’aime, ô capitale infâme ! Courtisanes
Et bandits, tels souvent vous offrez des plaisirs
Que ne comprennent pas les vulgaires profanes.