CHARLES PEGUY, ECRIVAIN FRANÇAIS, JESUS CHRIST, MEDITATIONS, NATIVITE DE JESUS, NOËL SELON CHARLES PEGUY, NOEL, POEME, POEMES, POETE FRANÇAIS

Noël selon Charles Péguy

Noël selon Charles Péguy

 

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Chaque poutre du toit…

Chaque poutre du toit était comme un vousseau.
Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire
Tomber comme une ardente et tragique rosée
N’était dans cette heureuse et paisible misère
Qu’un filet transparent sous la lèvre rosée.

Sous le regard de l’âne et le regard du bœuf
Cet enfant reposait dans la pure lumière.

Et dans le jour doré de la vieille chaumière
S’éclairait son regard incroyablement neuf.
Et ces laborieux et ces deux gros fidèles
Possédaient cet enfant que nous n’avons pas eu.

Et ces industrieux et ces deux haridelles
Gardaient ce fils de Dieu que nous avons vendu.
Et les pauvres moutons eussent donné leur laine
Avant que nous n’eussions donné notre tunique.

Et ces deux gros pandours donnaient vraiment leur peine.
Et nous qu’avons-nous mis aux pieds du fils unique ?
Ainsi l’enfant dormait sous ce double museau,
Comme un prince du sang gardé par des nourrices.

Et ces amusements et ses jeunes caprices
Reposaient dans le creux de ce pauvre berceau.
L’âne ne savait pas par quel chemin de palmes
Un jour il porterait jusqu’en Jérusalem

Dans la foule à genoux et dans les matins calmes
L’enfant alors éclos aux murs de Bethléem…
« Chaque poutre du toit… »,

Charles Péguy (1873-1914) est un écrivain, poète et essayiste. Le noyau central de toute son œuvre réside dans un profond patriotisme d’essence religieuse.

Ce poème est un extrait d’« Eve » où Charles Péguy évoque à la fois la chute et de la rédemption, le péché et la grâce.

FRANÇOIS COPPEE (1842-1908), MEDITATIONS, POEMES, POESIES, POETE FRANÇAIS, PRIERE, UN EVANGILE, UN EVANGILE DE FRANCOIS COPPEE

Un évangile de François Copée

Un évangile

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En ce temps-là, Jésus, seul avec Pierre, errait
Sur la rive du lac, près de Génésareth,
À l’heure où le brûlant soleil de midi plane,
Quand ils virent, devant une pauvre cabane,
La veuve d’un pêcheur, en longs voiles de deuil,
Qui s’était tristement assise sur le seuil,
Retenant dans ses yeux la larme qui les mouille,
Pour bercer son enfant et filer sa quenouille.
Non loin d’elle, cachés par des figuiers touffus,
Le Maître et son ami voyaient sans être vus.

Soudain, un de ces vieux dont le tombeau s’apprête,
Un mendiant, portant un vase sur sa tête,
Vint à passer et dit à celle qui filait:
« Femme, je dois porter ce vase plein de lait
Chez un homme logé dans le prochain village;
Mais tu le vois, je suis faible et brisé par l’âge,
Les maisons sont encore à plus de mille pas,
Et je sens bien que, seul, je n’accomplirai pas
Ce travail, que l’on doit me payer une obole. »

La femme se leva sans dire une parole,
Laissa, sans hésiter, sa quenouille de lin,
Et le berceau d’osier où pleurait l’orphelin,
Prit le vase, et s’en fut avec le misérable.
Et Pierre dit:
« Il faut se montrer secourable,
Maître! mais cette femme a bien peu de raison
D’abandonner ainsi son fils et sa maison,
Pour le premier venu qui s’en va sur la route.
À ce vieux mendiant, non loin d’ici, sans doute,
Quelque passant eût pris son vase et l’eût porté. »

Mais Jésus répondit à Pierre:
« En vérité,
Quand un pauvre a pitié d’un plus pauvre, mon père
Veille sur sa demeure et veut qu’elle prospère.
Cette femme a bien fait de partir sans surseoir. »

Quand il eut dit ces mots, le Seigneur vint s’asseoir
Sur le vieux banc de bois, devant la pauvre hutte.
De ses divines mains, pendant une minute,
Il fila la quenouille et berça le petit;
Puis se levant, il fit signe à Pierre et partit.

Et, quand elle revint à son logis, la veuve,
À qui de sa bonté Dieu donnait cette preuve,
Trouva sans deviner jamais par quel ami,
Sa quenouille filée et son fils endormi.

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François Coppée, Les récits et les élégies (1878)

ECRIVAIN FRANÇAIS, HIVER, IL FAIT FROID, LITTERATURE FRANÇAISE, POEME, POEMES, POESIES, POETE FRANÇAIS, VICTOR HUGO

Il fait froid de Victor Hugo

Il fait froid

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L’hiver blanchit le dur chemin
Tes jours aux méchants sont en proie.
La bise mord ta douce main ;
La haine souffle sur ta joie.

La neige emplit le noir sillon.
La lumière est diminuée…
Ferme ta porte à l’aquilon !
Ferme ta vitre à la nuée !

Et puis laisse ton coeur ouvert !
Le coeur, c’est la sainte fenêtre.
Le soleil de brume est couvert ;
Mais Dieu va rayonner peut-être !

Doute du bonheur, fruit mortel ;
Doute de l’homme plein d’envie ;
Doute du prêtre et de l’autel ;
Mais crois à l’amour, ô ma vie !

Crois à l’amour, toujours entier,
Toujours brillant sous tous les voiles !
A l’amour, tison du foyer !
A l’amour, rayon des étoiles !

Aime, et ne désespère pas.
Dans ton âme, où parfois je passe,
Où mes vers chuchotent tout bas,
Laisse chaque chose à sa place.

La fidélité sans ennui,
La paix des vertus élevées,
Et l’indulgence pour autrui,
Eponge des fautes lavées.

Dans ta pensée où tout est beau,
Que rien ne tombe ou ne recule.
Fais de ton amour ton flambeau.
On s’éclaire de ce qui brûle.

A ces démons d’inimitié
Oppose ta douceur sereine,
Et reverse leur en pitié
Tout ce qu’ils t’ont vomi de haine.

La haine, c’est l’hiver du cœur .
Plains-les ! mais garde ton courage.
Garde ton sourire vainqueur ;
Bel arc-en-ciel, sors de l’orage !

Garde ton amour éternel.
L’hiver, l’astre éteint-il sa flamme ?
Dieu ne retire rien du ciel ;
Ne retire rien de ton âme !

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Victor Hugo

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Les Saints Innocents de Paul Verlaine

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Cruel Hérode, noir Péché,
De tes sept glaives tu poursuis
Les innocents, lesquels je suis
Dans mes cinq sens, — et, qu’empêché
Me voici pour, las ! me défendre !

L’argile dont Dieu les forma,
Leur faiblesse à ces tristes sens
Par quoi je suis les innocents
Que l’on immole dans Rama,
Trahissent leur âge trop tendre.

Nulle fuite. Mais mon Sauveur,
Assumant mon sort et ma mort,
Vit en Égypte dont il sort
À temps pour l’insigne faveur
Qu’il me fait de donner sa vie

Et sa pensée à mon bonheur
Éternel, et, par l’action
Sûre de l’absolution
De son prêtre à lui, le Seigneur,
Ressuscite ma chair ravie.

Paul Verlaine (1844-1896)

Recueil : Liturgies intimes (1892).

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Toussaint de Paul Verlaine

Toussaint

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Ces vrais vivants qui sont les saints,
Et les vrais morts qui seront nous,
C’est notre double fête à tous,
Comme la fleur de nos desseins,

Comme le drapeau symbolique
Que l’ouvrier plante gaîment
Au faite neuf du bâtiment,
Mais, au lieu de pierre et de brique,

C’est de notre chair qu’il s’agit,
Et de notre âme en ce nôtre œuvre
Qui, narguant la vieille couleuvre,
A force de travaux surgit.

Notre âme et notre chair domptées
Par la truelle et le ciment
Du patient renoncement
Et des heures dûment comptées.

Mais il est des âmes encor,
Il est des chairs encore comme
En chantier, qu’à tort on dénomme
Les morts, puisqu’ils vivent, trésor

Au repos, mais que nos prières
Seulement peuvent monnayer
Pour, l’architecte, l’employer
Aux grandes dépenses dernières.

Prions, entre les morts, pour maints
De la terre et du Purgatoire,
Prions de façon méritoire
Ceux de là-haut qui sont les saints.

 

Paul Verlaine (1844-1896)

Extraits de Liturgies intimes (1892)

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Poême d’automne de Victor Hugo

 

L’aube est moins claire…

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L’aube est moins claire, l’air moins chaud, le ciel moins pur ;
Le soir brumeux ternit les astres de l’azur.
Les longs jours sont passés ; les mois charmants finissent.
Hélas ! voici déjà les arbres qui jaunissent !
Comme le temps s’en va d’un pas précipité !
Il semble que nos yeux, qu’éblouissait l’été,
Ont à peine eu le temps de voir les feuilles vertes.

Pour qui vit comme moi les fenêtres ouvertes,
L’automne est triste avec sa bise et son brouillard,
Et l’été qui s’enfuit est un ami qui part.
Adieu, dit cette voix qui dans notre âme pleure,
Adieu, ciel bleu ! beau ciel qu’un souffle tiède effleure !
Voluptés du grand air, bruit d’ailes dans les bois,
Promenades, ravins pleins de lointaines voix,
Fleurs, bonheur innocent des âmes apaisées,
Adieu, rayonnements ! aubes ! chansons ! rosées !

Puis tout bas on ajoute : ô jours bénis et doux !
Hélas ! vous reviendrez ! me retrouverez-vous ?

Victor HUGO
1802 – 1885

EN SEPTEMBRE, LITTERATURE FRANÇAISE, PAUL VERLAINE, PAUL VERLAINE (1844-1896), POEME, POEMES, POESIES, POETE FRANÇAIS

En septembre de Paul Verlaine

  1. En septembre

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    Parmi la chaleur accablante
    Dont nous torréfia l’été,
    Voici se glisser, encor lente
    Et timide, à la vérité,

     

    Sur les eaux et parmi les feuilles,
    Jusque dans ta rue, ô Paris,
    La rue aride où tu t’endeuilles
    De tels parfums jamais taris,

    Pantin, Aubervilliers, prodige
    De la Chimie et de ses jeux,
    Voici venir la brise, dis-je,
    La brise aux sursauts courageux…

    La brise purificatrice
    Des langueurs morbides d’antan,
    La brise revendicatrice
    Qui dit à la peste : va-t’en !

    Et qui gourmande la paresse
    Du poëte et de l’ouvrier,
    Qui les encourage et les presse…
     » Vive la brise !  » il faut crier :

     » Vive la brise, enfin, d’automne
    Après tous ces simouns d’enfer,
    La bonne brise qui nous donne
    Ce sain premier frisson d’hiver ! « 

     Paul VERLAINE
    1844 – 1896

ECRIVAIN FRANÇAIS, JUIN, LITURGIES INTIMES, MEDITATIONS, PAUL VERLAINE, PAUL VERLAINE (1844-1896), POEME, POEMES, POETE FRANÇAIS, PRIERE, PRIERES

Juin, poème de Paul Verlaine

 
 

 Juin

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Mois de Jésus, mois rouge et or, mois de l’Amour,
Juin, pendant quel le cœur en fleur et Tàme en flamme
Se sont épanouis dans la splendeur du jour
Parmi des chants et des parfums d’épithalame,

Mois du Saint-Sacrement et mois du Sacré-Cœur,
Mois splendide du Sang réel, et de la Chair vraie,
Pendant que l’herbe mûre offre à l’été vainqueur
Un champ clos où le blé triomphe de l’ivraie,

Et pendant quel, nous misérables, nous pécheurs,
Remémorés de la Présence non pareille.
Nous sentons ravigorés en retours vengeurs
Contre Satan, pour des triomphes que surveille

Du ciel là-haut, et sur terre, de l’ostensoir,
L’adoré, l’adorable Amour sanglant et chaste,
Et du sein douloureux où gîte notre espoir
Le Cœur, le Cœur brûlant que le désir dévaste,

Le désir de sauver les nôtres, ô Bonté
Essentielle, de leur gagner la victoire
Éternelle. Et l’encens de l’immuable été
Monte mystiquement en des douceurs de gloire.

Paul Verlaine (1844-1896)
Recueil liturgies intimes (1892).
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ALFRED DE MUSSET (1810-1857), BALLADE A LA LUNE, LITTERATURE FRANÇAISE, POEME, POEMES, POETE FRANÇAIS

Ballade à la lune d’Alfred de Musset

Ballade à la lune


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C’était, dans la nuit brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

Lune, quel esprit sombre
Promène au bout d’un fil,
Dans l’ombre,
Ta face et ton profil ?

Es-tu l’oeil du ciel borgne ?
Quel chérubin cafard
Nous lorgne
Sous ton masque blafard ?

N’es-tu rien qu’une boule,
Qu’un grand faucheux bien gras
Qui roule
Sans pattes et sans bras ?

Es-tu, je t’en soupçonne,
Le vieux cadran de fer
Qui sonne
L’heure aux damnés d’enfer ?

Sur ton front qui voyage.
Ce soir ont-ils compté
Quel âge
A leur éternité ?

Est-ce un ver qui te ronge
Quand ton disque noirci
S’allonge
En croissant rétréci ?

Qui t’avait éborgnée,
L’autre nuit ? T’étais-tu
Cognée
A quelque arbre pointu ?

Car tu vins, pâle et morne
Coller sur mes carreaux
Ta corne
À travers les barreaux.

Va, lune moribonde,
Le beau corps de Phébé
La blonde
Dans la mer est tombé.

Tu n’en es que la face
Et déjà, tout ridé,
S’efface
Ton front dépossédé.

Rends-nous la chasseresse,
Blanche, au sein virginal,
Qui presse
Quelque cerf matinal !

Oh ! sous le vert platane
Sous les frais coudriers,
Diane,
Et ses grands lévriers !

Le chevreau noir qui doute,
Pendu sur un rocher,
L’écoute,
L’écoute s’approcher.

Et, suivant leurs curées,
Par les vaux, par les blés,
Les prées,
Ses chiens s’en sont allés.

Oh ! le soir, dans la brise,
Phoebé, soeur d’Apollo,
Surprise
A l’ombre, un pied dans l’eau !

Phoebé qui, la nuit close,
Aux lèvres d’un berger
Se pose,
Comme un oiseau léger.

Lune, en notre mémoire,
De tes belles amours
L’histoire
T’embellira toujours.

Et toujours rajeunie,
Tu seras du passant
Bénie,
Pleine lune ou croissant.

T’aimera le vieux pâtre,
Seul, tandis qu’à ton front
D’albâtre
Ses dogues aboieront.

T’aimera le pilote
Dans son grand bâtiment,
Qui flotte,
Sous le clair firmament !

Et la fillette preste
Qui passe le buisson,
Pied leste,
En chantant sa chanson.

Comme un ours à la chaîne,
Toujours sous tes yeux bleus
Se traîne
L’océan montueux.

Et qu’il vente ou qu’il neige
Moi-même, chaque soir,
Que fais-je,
Venant ici m’asseoir ?

Je viens voir à la brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

Peut-être quand déchante
Quelque pauvre mari,
Méchante,
De loin tu lui souris.

Dans sa douleur amère,
Quand au gendre béni
La mère
Livre la clef du nid,

Le pied dans sa pantoufle,
Voilà l’époux tout prêt
Qui souffle
Le bougeoir indiscret.

Au pudique hyménée
La vierge qui se croit
Menée,
Grelotte en son lit froid,

Mais monsieur tout en flamme
Commence à rudoyer
Madame,
Qui commence à crier.

« Ouf ! dit-il, je travaille,
Ma bonne, et ne fais rien
Qui vaille;
Tu ne te tiens pas bien. »

Et vite il se dépêche.
Mais quel démon caché
L’empêche
De commettre un péché ?

« Ah ! dit-il, prenons garde.
Quel témoin curieux
Regarde
Avec ces deux grands yeux ? »

Et c’est, dans la nuit brune,
Sur son clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

 

 

Alfred de Musset (1810-1857)
Premières poésie

JEAN-BAPTISTE ROUSSEAU (1670/1671 - 1741), LITTERATURE FRANÇAISE, POEME, POEMES, POETE FRANÇAIS, PRIERE, PRIERES

Faiblesse des hommes, grandeur de Dieu par Jean-Baptiste Rousseau

Faiblesse des hommes. Grandeur de Dieu

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Mon âme, louez le Seigneur ;

Rendez un légitime honneur
À l’objet éternel de vos justes louanges.

Oui, mon Dieu, je veux désormais

Partager la gloire des anges,
Et consacrer ma vie à chanter vos bienfaits.

Renonçons au stérile appui

Des grands qu’on implore aujourd’hui ;


Ne fondons point sur eux une espérance folle.

Leur pompe, indigne de nos vœux,

N’est qu’un simulacre frivole ;
Et les solides biens ne dépendent pas d’eux.

 

Comme nous, esclaves du sort,

Comme nous, jouets de la mort,
La terre engloutira leurs grandeurs insensées ;

Et périront en même jour

Ces vastes et hautes pensées
Qu’adorent maintenant ceux qui leur font la cour.

 Dieu seul doit faire notre espoir ;

Dieu, de qui l’immortel pouvoir
Fit sortir du néant le ciel, la terre, et l’onde ;

Et qui, tranquille au haut des airs,

Anima d’une voix féconde
Tous les êtres semés dans ce vaste univers.

 Heureux qui du ciel occupé,

Et d’un faux éclat détrompé,
Met de bonne heure en lui toute son espérance !

II protège la vérité,

Et saura prendre la défense
Du juste que l’impie aura persécuté.

 C’est le Seigneur qui nous nourrit ;

C’est le Seigneur qui nous guérit :
Il prévient nos besoins ; il adoucit nos gênes ;

Il assure nos pas craintifs ;

Il délie, il brise nos chaînes ;
Et nos tyrans par lui deviennent nos captifs.

 Il offre au timide étranger

Un bras prompt à le protéger ;
Et l’orphelin en lui retrouve un second père :

De la veuve il devient l’époux ;

Et par un châtiment sévère
II confond les pécheurs conjurés contre nous.

 Les jours des rois sont dans sa main :

Leur règne est un règne incertain,
Dont le doigt du Seigneur a marqué les limites ;

Mais de son règne illimité

Les bornes ne seront prescrites
Ni par la fin des temps, ni par l’éternité.

 

 

Jean-Baptiste Rousseau (1670/1671 – 1741)

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Jean-Baptiste Rousseau est un poète et dramaturge français.

Fils d’un cordonnier enrichi, Jean-Baptiste Rousseau fut élevé avec soin et fit de bonnes études chez les Jésuites au collège Louis-le-Grand. Selon les témoignages contemporains, il eut toujours honte de sa naissance obscure qu’il chercha à dissimuler et l’on prétend qu’il alla jusqu’à renier son propre père.

Rousseau entreprit d’exercer sa vindicte sur ses ennemis désignés. On commença par trouver des vers satiriques sous les tables du café où il se rendait quelquefois et il en envoya de Versailles où il séjournait à ses ennemis. La police fut prévenue et il dut faire un terme à ces envois.

En Suisse, Jean-Baptiste Rousseau trouva un protecteur dans l’ambassadeur français, le comte du Lue. Il s’attacha ensuite au prince Eugène, mais il prit parti pour le comte de Bonneval, et fut obligé de quitter Vienne. Il se retira alors à Bruxelles; où il vit Voltaire, qui devint son ennemi. Il aurait pu obtenir en 1716 des lettres de rappel, mais il demanda une réhabilitation, et elle ne lui fut pas accordée. Il visita Paris incognito en 1738, et mourut dans un hameau près de Bruxelles en 1741, dans de grands sentiments de piété.

Il entre dans la carrière littéraire par des pièces de théâtre et de poésie. Nourri à l’école de Boileau, il se croit appelé à former, aux confins des deux siècles, la transition entre deux époques. En fait, son œuvre, où se mêlent alors odes religieuses et épigrammes obscènes, est empreinte d’une sorte de duplicité morale, caractéristique de la fin du règne de Louis XIV. À trente ans, il a une grande réputation littéraire, mais aussi un grand nombre d’ennemis que lui attire son caractère. En 1707, alors qu’il est candidat à l’Académie française, on fait courir sous son nom des couplets calomnieux contre plusieurs hommes de lettres. Il s’en défend, mais l’affaire s’envenime, et le parlement le juge coupable et le condamne au bannissement à perpétuité (1712). Obligé de s’enfuir, il erre misérablement en Suisse, à Vienne, à Bruxelles, en Angleterre (1721). Pendant son exil, il est protégé par le comte du Luc, ambassadeur de France en Suisse, auquel est dédiée son Ode à la Fortune, une de ses œuvres les plus connues :

Fortune dont la main couronne

Les forfaits les plus inouïs,

Du faux éclat qui t’environne

Serons-nous toujours éblouis ?

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