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Charles de Gaulle (1890-1970)

Charles de Gaulle

Homme d’État français (Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970).

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Homme de l’appel du 18 juin 1940, Charles de Gaulle fut, en 1958, le fondateur du régime de la Ve République, qu’il présida jusqu’en 1969. Audace, grandeur, patriotisme, obstination, indépendance, stabilité, tels sont les traits qui caractérisent le tempérament et le règne de ce soldat rebelle devenu un monarque républicain, qui demeurera, de l’avis de ses compagnons comme de ses adversaires, un géant de l’Histoire.

Formation

Appartenant au milieu de la bourgeoisie catholique lilloise, Charles de Gaulle fait ses études chez les jésuites, avant d’être reçu au concours d’entrée à l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, dont il sort 13e en 1912.

À l’école de la guerre

Blessé à trois reprises, porté disparu, il se relève bien vivant mais prisonnier de guerre en Allemagne. Après cinq tentatives d’évasion, il est délivré par l’armistice du 11 novembre 1918. Sur sa demande, il est affecté en Pologne pour aller combattre l’armée rouge (1919-1920).

Entre deux guerres

Après avoir épousé Yvonne Vendroux, fille d’un industriel de Calais qui lui donnera trois enfants, il poursuit sa carrière militaire en entrant à l’École supérieure de guerre (1922). Il est nommé vice-président du Conseil supérieur de la guerre dans le cabinet du maréchal Pétain (1925), avant d’être affecté au secrétariat général de la Défense nationale (1932-1937).

juin 1940

Général de brigade au cours de la campagne de France (mai), sous-secrétaire d’État à la défense nationale dans le gouvernement Reynaud (juin), il refuse l’armistice et lance, de Londres, le 18 juin, un appel à la résistance.

General Charles de Gaulle

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Le libérateur de la France

S’imposant, non sans difficultés, comme le chef de la France libre, il préside à Alger en 1943 le Comité français de libération nationale, devenu en juin 1944 Gouvernement provisoire de la République française, qui s’installe en France après la libération de Paris (août 1944).

La « traversée du désert » (1946-1958)

Décidé à rendre à la France son rang mais hostile aux « jeux des partis », il démissionne en janvier 1946, fonde et préside le Rassemblement du peuple français (1947-1953), se retire ensuite de la vie politique et se consacre à la rédaction de ses Mémoires de guerre (1954-1959).

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Le président de Gaulle (1959-1969)

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Rappelé au pouvoir à la faveur de la crise algérienne (mai 1958), il fait approuver une nouvelle Constitution, qui fonde la Ve République. Président de la République (1959), il met fin, non sans drames, à la guerre d’Algérie et renforce l’autorité présidentielle par l’élection du président de la République au suffrage universel (1962). Il mène une politique de réconciliation avec l’Allemagne (traité franco-allemand, 1963). Réélu en 1965, il développe une politique étrangère d’indépendance nationale. Un an après les événements de mai 1968, son projet de régionalisation et de réforme du Sénat étant repoussé par référendum, il démissionne (28 avril 1969).

Décès

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Isolé dans sa propriété de Colombey-les-Deux-Églises, aux côtés de sa femme, le général de Gaulle succombe d’une rupture d’anévrisme (9 novembre 1970). Selon sa volonté, il n’aura pas d’obsèques nationales, mais la messe solennelle célébrée à Notre-Dame de Paris réunira tous les grands du monde de l’époque.

  1. INTRODUCTION

Charles de Gaulle

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Naître dans une famille de la bourgeoisie patriote à la fin du xixe siècle, choisir la carrière des armes pour la « revanche », traverser malgré les blessures et la captivité la Première Guerre mondiale avant d’aller vingt ans durant d’une unité à un état-major pour se retrouver – à l’approche de la cinquantaine et, déjà, de la retraite – simple colonel. Puis, quatre ans plus tard, surgir en héros national, libérateur du territoire et restaurateur de la république, personnage historique de première grandeur, c’est un singulier destin.

Se retirer dans son village pour écrire ses Mémoires de guerre, fonder un régime à 68 ans, le diriger en maître pendant onze années, puis accepter l’échec et le désaveu.

Survivre à cinq générations de grands de ce monde, s’asseoir à la table de Churchill, de Staline, de Roosevelt, puis voir défiler Attlee, Truman, apparaître Adenauer, traiter avec Macmillan, Eisenhower, Khrouchtchev, avec Harold Wilson, J. F. Kennedy, Brejnev et encore avec Edward Heath, L. B Johnson ou Nixon, Kiesinger ou Brandt, c’est une extraordinaire carrière.

Pourtant, ce furent là le destin et la carrière de Charles de Gaulle. Dans la vie de ce personnage hors série, on pourrait distinguer trois actes ou plutôt trois incarnations successives : de l’enfance à la Seconde Guerre mondiale, l’officier ; du 18 juin 1940 à la retraite de 1953, le résistant et l’homme politique ; et, après l’entracte de la « traversée du désert », de 1958 à 1970, l’homme d’État.

  1. L’OFFICIER (1915-1940)
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De ses origines, de son milieu, Charles de Gaulle a su très vite prendre et laisser. Un patriotisme hautain, ardent, exclusif qui emprunte parfois des accents de passion nationaliste, l’espoir et la volonté de la « revanche », une sorte de prédestination manifestée dès l’enfance, une obstination tendue et une gravité naturelle, tel est son héritage. En revanche, l’étroitesse de vues, le conservatisme, le goût du profit et de l’argent, la xénophobie, voire le racisme, qui sont trop souvent des traits caractéristiques non certes de sa famille, mais de sa classe, lui seront étrangers.

2.1. UN OFFICIER D’UNE GRANDE INDÉPENDANCE D’ESPRIT

Charles de Gaulle n’est ni un écolier modèle ni un saint-cyrien particulièrement appliqué, mais déjà pourtant ses camarades le jugent exceptionnellement brillant, bien que raide. Sa rencontre en 1912 avec son premier chef, le colonel Philippe Pétain, les marque profondément et toute leur vie, par-delà la rupture de 1938 et finalement le drame qui les oppose.

La carrière militaire de Charles de Gaulle à travers la Première Guerre mondiale, qui restera toujours pour lui la « grande » guerre, se déroule sans éclat particulier. Trois blessures, trois citations, la captivité, cinq tentatives d’évasion, puis, la paix revenue, un avancement nullement exceptionnel, des affectations assez classiques allant d’un corps de troupes à un état-major avec toutefois un détour en 1919-1921 par la Pologne, deux crochets par l’armée du Rhin en 1924 et de 1927 à 1929, quelques missions au Proche-Orient (à Beyrouth) en 1929-1931. La protection de Pétain s’étend toujours, où qu’il se trouve, sur l’officier.

Surtout, de Gaulle se signale peu à peu à l’attention, de deux façons très inhabituelles. D’abord, il écrit : des rapports, des notes, des études qui, bien vite, deviennent des articles de revues, des livres de doctrine, de réflexion et même de morale où la stratégie et la politique sont étroitement mêlées, en particulier dans le Fil de l’épée (1932). Ensuite, il fréquente les milieux parlementaires, approche le pouvoir, s’y trouve un « patron » en la personne du député Paul Reynaud, et se fait le héraut d’une arme trop négligée – par l’armée française, non par l’adversaire –, celle des blindés.

2.2. LE CHOIX DE LA RÉSISTANCE

Quand éclate la Seconde Guerre mondiale, en 1939, le « Colonel Motor », comme on l’a surnommé, commande un régiment près de la frontière. Il se voit confier coup sur coup des responsabilités plus importantes et, dès que l’armée allemande commence à déferler sur les Pays-Bas, la Belgique, le Nord, le 10 mai 1940, il est placé à la tête de la 4e division cuirassée, qui se battra courageusement autour de Laon et d’Abbeville ; il est alors promu général de brigade à titre temporaire.

Cependant, la politique, qu’il a tant courtisée, l’appelle. Paul Reynaud, succédant à Édouard Daladier comme président du Conseil en mars 1940, nomme de Gaulle sous-secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre (5 juin). Charles de Gaulle porte ce titre douze jours : à l’heure où le gouvernement Reynaud s’évanouit, où le régime se disloque devant Pétain et le général Maxime Weygand, où la défense s’effondre, l’officier de tradition choisit la rébellion, l’exil et la résistance. Le 17 juin 1940, il quitte quasi clandestinement Bordeaux, où le gouvernement s’est replié, pour Londres, pour l’action, pour son destin.

 

  1. LE RÉSISTANT ET L’HOMME POLITIQUE (1940-1953)

3.1. L’APPEL

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Le 18 juin, au micro de la BBC, c’est l’appel à poursuivre le combat. Après l’armistice du 22 juin signée entre Pétain et l’Allemagne, de Gaulle organise des forces armées qui deviendront les Forces françaises libres (FFL). Lorsque, le 14 juillet suivant, leur chef passe pour la première fois en revue sur le sol anglais ceux qu’on appelle les « Français libres », ils ne sont guère que trois cents. La métropole, écrasée, affolée, occupée, ignore à peu près tout de ce général inconnu qu’un conseil de guerre va condamner à mort par contumace, de son étrange entreprise, qui semble aux uns désespérée, aux autres suspecte. De toute façon, elle ne songe guère à résister.

3.2. CHEF DE LA FRANCE LIBRE

Ce que sera l’extraordinaire aventure de la France libre défie l’imagination et même le bon sens. Tout commence mal : au lieu des ralliements massifs qu’il escomptait, le chef de la « dissidence » ne voit pas arriver ses pairs, mais quelques officiers de réserve, des errants qui rêvent d’en découdre, des hommes de gauche, des pêcheurs de l’île de Sein, etc. Les marins et les soldats français encore présents en Grande-Bretagne après le rembarquement de Dunkerque préfèrent, sauf rares exceptions, être rapatriés ; aucun général, aucun leader politique n’a répondu aux pressants appels de Charles de Gaulle.

L’allié anglais, craignant que la flotte française puisse être utilisée par l’Allemagne, coule froidement des bâtiments à Mers el-Kébir (3 juillet 1940), et, même quand l’Afrique-Équatoriale française a rallié la France libre, le reste de l’« Empire » reste fidèle à Pétain : une expédition navale devant Dakar échoue piteusement ; bientôt, les forces de Vichy et celles de la France libre s’affrontent au Liban et en Syrie.

Il faut à de Gaulle sans cesse défendre l’indépendance, proclamer la représentativité de la France libre devant Winston Churchill, contre Franklin Roosevelt. Lorsque les Alliés débarquent enfin en Afrique du Nord, le 8 novembre 1942, ils s’entendent avec François Darlan, le second de Pétain, installent au pouvoir Henri Giraud et non de Gaulle.

3.3. L’ORGANISATEUR DE LA RÉSISTANCE

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Churchill, de Gaulle, Roosevelt et Giraud à Casablanca (janvier 1943)

En sept mois, Charles de Gaulle néanmoins manœuvre, gagne du terrain, élimine Giraud, fédère sous son autorité la Résistance intérieure. Il charge Jean Moulin d’organiser en France le Conseil national de la résistance (CNR), créé fin mai 1943, dans lequel sont représentées toutes les tendances des partis politiques, des syndicats et des mouvements de résistance, pour coordonner la lutte contre l’occupant et contre Vichy. Il énonce les principes qui seront le fondement de son pouvoir :
– changement des institutions, mais fidélité à la république ;
– condamnation de Vichy, mais liberté d’expression et d’action rendue aux tendances politiques ;
– évolution de l’Empire colonial français vers des formules plus libérales, mais défense et maintien de l’ensemble français outre-mer…

3.4. LE LIBÉRATEUR DE LA FRANCE OCCUPÉE

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Il reste au général de Gaulle, après le débarquement du 6 juin 1944 en Normandie – opération dont il a été, une fois de plus, tenu soigneusement à l’écart –, à conquérir la légitimité par l’acclamation populaire sur le sol de la patrie libérée. C’est vite et bien fait : deux millions de Parisiens rassemblés sur les Champs-Élysées le 26 août pour l’accueillir ne laissent plus aux Alliés d’autre choix que de reconnaître son Gouvernement provisoire de la République française (GRPF), formé le 3 juin 1944.

3.5. LE FONDATEUR D’UNE « FRANCE NOUVELLE » (1944-1946)

Le général restera dix-sept mois à la tête du pays, présidant à sa rentrée dans la guerre, tenant tête aux Alliés quand ils veulent évacuer Strasbourg reconquise, imposant la présence de la France à l’heure de la capitulation allemande.

Tandis que l’épuration déchaîne mille controverses, la reconstruction s’amorce ; le retour des prisonniers et des déportés va permettre de consulter le corps électoral, pour la première fois par référendum, sur les institutions ; une diplomatie audacieuse se développe avec le traité franco-soviétique de décembre 1944 et la normalisation des relations avec Londres et Washington ; les nationalisations, les lois sociales, le vote des femmes transforment les données du jeu intérieur.

Mais de Gaulle, tranchant, impavide, obstiné, se heurte à la classe politique et soudain rompt et s’éloigne, croyant, à tort, être bientôt rappelé par l’opinion : en désaccord avec l’Assemblée constituante élue en octobre 1945, il remet sa démission sur la question des crédits militaires au président de l’Assemblée nationale, le 20 janvier 1946.

LE DISCOURS DE BAYEUX (16 JUIN 1946)

Quelques mois après son départ du pouvoir, le général de Gaulle expose à Bayeux, le 16 juin 1946, à l’occasion du second anniversaire de la libération de la ville, un projet constitutionnel où il défend sa conception de l’État : un exécutif fort et une nette séparation des pouvoirs, posant ainsi la base de la Constitution de 1958. En attendant, et pour tenter d’empêcher la ratification de la Constitution de la IVe République, puis pour abattre ce « mauvais régime », le général déclenche son offensive contre les partis, qui seront désormais sa bête noire.

3.6. DU RASSEMBLEMENT DU PEUPLE FRANÇAIS…

Cette offensive prend d’abord la forme d’avertissements, de menaces, de récusations, puis, à l’adresse du pays, de mises en garde. Comme il n’est pas entendu, de Gaulle fonde le Rassemblement du peuple français (RPF), destiné à jeter bas, escompte-t-il, le « système ». Cet épisode de sa carrière d’homme politique – qu’il préférera plus tard oublier au point qu’on n’osera prononcer devant lui le sigle du mouvement – connaît dans un premier temps un succès certain à travers la conquête de nombreuses municipalités en 1947, de sièges sénatoriaux l’année suivante. Il échoue en 1951 aux législatives devant le barrage que la loi des apparentements dresse contre lui et qu’il refuse de tourner en utilisant pour ses candidats la procédure qu’il dénonce.

À partir de là, le RPF se survit en attendant de se diviser, ce qui se produit en 1952 à l’occasion de l’investiture d’Antoine Pinay. Un an plus tard, Charles de Gaulle tire la leçon des batailles perdues, abandonne le Rassemblement, se retire à Colombey, d’où il ne sortira que pour tonner de loin en loin contre certaines des initiatives du régime et pour visiter divers territoires d’outre-mer. Mais, s’il s’occupe en écrivant ses Mémoires de guerre, qui connaîtront un vif succès, il reste aux aguets tandis que la IVe République s’enlise peu à peu dans l’impuissance et l’incohérence.

3.7. … À LA TRAVERSÉE DU DÉSERT (1953-1958)

L’officier révolté de 1940, qui s’était volontairement coupé, par son acte d’insubordination soigneusement médité, de l’armée, du pouvoir légal et de sa classe sociale, avait pris à Londres figure de symbole. Le seul nom du général de Gaulle évoquait en effet la poursuite de la guerre, la présence de la France au combat, le patriotisme, le courage, la Résistance. Des hommes étaient morts en l’acclamant, d’autres se préparaient à le servir et rêvaient d’une France toute nouvelle qu’ébauchaient déjà l’indépendance farouchement défendue à l’égard des Alliés, une volonté de « grandeur » d’autant plus ombrageuse qu’elle ne reposait sur aucune réalité matérielle. Puissance de suggestion, habileté politique et orgueil national d’un homme qui s’identifiait à la France, qui incarnait la France et s’exprimait en son nom quand il n’était encore suivi que par une poignée de fidèles : tout concourait malgré les vicissitudes et les échecs à imposer ce personnage hors du commun qui parlait de lui-même à la troisième personne, en se nommant avec révérence « le général de Gaulle ».

Paris libéré, bientôt la guerre terminée, la France est d’abord subjuguée par la haute silhouette, par le langage sonore et impérieux, par l’allure souveraine du libérateur. De son côté, Charles de Gaulle développe un rare sens de la stratégie, non exempt toutefois d’erreurs d’appréciation. Il se passionne pour une diplomatie planétaire et ambitieuse, se perfectionne dans la tactique et dans l’art oratoire.

Cependant, la politique reprend ses droits, l’englue, l’exaspère. Alors, il se révolte, en appelle à la foule contre les notables défaillants, et, finalement, le personnage historique, le géant venu du fond de l’histoire de la France cesse d’unir pour diviser et perd la seconde manche. À ses yeux, aux yeux de beaucoup, la partie est terminée.

  1. L’HOMME D’ÉTAT (1958-1970)
  2. Affiche-originale-du-portrait-officiel-du-général-de-Gaulle-président-de-la-République-1

4.1. LA RECONQUÊTE DU POUVOIR

Le destin lui réserve pourtant une troisième chance, et il saura la saisir. Au début de mai 1958, la fragilité, l’impuissance, l’inadéquation de la IVe République, avec ses institutions précocement usées, engluée dans la guerre d’Algérie et qui gère le bien commun à raison d’un problème par semestre et d’un gouvernement par problème, éclatent à tous les regards. En moins d’un mois, l’armée et les Français d’Algérie étant entrés en rébellion, les leviers de commande échappent un à un au gouvernement ; le travail de sape des gaullistes soudain grossis de renforts inattendus ouvre la route, les politiciens se rallient ; appelé à la présidence du Conseil par le président de la République René Coty, Charles de Gaulle retrouve le pouvoir.

Investi par l’Assemblée, acclamé par l’opinion, salué comme le plus illustre des Français, entouré des caciques du régime défunt, il a même obtenu carte blanche pour préparer et présenter au pays une nouvelle Constitution et fonder une nouvelle République.

4.2. L’ARTISAN DE LA Ve RÉPUBLIQUE

Le général de Gaulle entame à la fois trois tâches urgentes, mais, s’il explore les voies de la normalisation en Algérie en offrant aux nationalistes algériens la « paix des braves », s’il avertit les alliés occidentaux par un mémorandum secret de sa volonté de voir réformer l’Alliance atlantique et admettre la France sans restriction parmi les « Grands », c’est à l’élaboration et à l’adoption des institutions nouvelles qu’il donne la priorité absolue.

Approuvée par 80 % des électeurs, la Constitution de 1958 produit aussitôt une Assemblée nationale où le régime, sinon les gaullistes eux-mêmes, détient une nette majorité. Élu président de la République le 21 décembre – moins de 6 mois après avoir été rappelé à la tête du gouvernement – Charles de Gaulle nomme Michel Debré Premier ministre et passe à l’action.

Cette action va s’ordonner autour de quatre idées clefs qui, selon les périodes, prendront tour à tour le pas dans les faits et dans l’esprit du général, avec des fortunes diverses. Ce sont :
– organiser, consolider et compléter le nouveau système institutionnel ;
– résoudre la question algérienne et parachever la décolonisation ;
– déployer une politique extérieure de grandeur et d’indépendance nationale ;
– enfin, procéder à un certain nombre de grandes réformes, sociale, administrative, régionale, etc.

Dans tous les aspects de cette entreprise, un souci constant : l’affirmation de l’autorité présidentielle ; un adversaire sans cesse dénoncé : les partis, la classe politique, dont la IVe République était l’expression ; un moyen essentiel : l’appel direct au peuple souverain par-delà les corps intermédiaires.

L’INDÉPENDANCE DE L’ALGÉRIE ET DES ANCIENNES COLONIES

La guerre d’Algérie se prolonge cependant plus longtemps encore sous la Ve République qu’elle n’avait duré déjà sous le régime précédent. À doses homéopathiques, de Gaulle s’efforce de conduire l’opinion française de l’« autodétermination » à l’« Algérie algérienne », puis à la « République algérienne », enfin à l’idée de l’indépendance. En même temps, à travers trois référendums successifs et des pourparlers tantôt rompus, tantôt repris, il progresse de la négociation vers le cessez-le-feu et le repli sur la métropole. Il se heurtera, sur sa route, aux pieds-noirs révoltés de la « semaine des barricades », aux officiers insurgés du « putsch des généraux » (avril 1961), au terrorisme désespéré de l’Organisation armée secrète (OAS).

Il lui faudra quatre années en tout pour atteindre le but (accords d’Évian, 18 mars 1962). Chemin faisant, la Communauté franco-africaine, réunissant les anciens territoires d’outre-mer, est née, puis s’est défaite. En juillet 1962, l’Algérie et toutes les anciennes colonies (à l’exception des quatre « vieux » départements des Antilles, de Guyane et de La Réunion et de quelques territoires lointains tels que Djibouti ou la Polynésie) ont accédé à l’indépendance pleine et entière. Mais la France est en paix, pour la première fois depuis 25 ans.

L’ÉLECTION DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE AU SUFFRAGE UNIVERSEL

La mise en place des institutions nouvelles n’a pas été réalisée sans heurts. Les étapes mouvementées de la politique algérienne ont conduit à recourir à maintes reprises à des dispositions contraignantes, à la création de successives juridictions et procédures d’exception (Haut Tribunal militaire), à la suspension partielle des libertés publiques sous les protestations de l’opposition.

Voici que, la guerre terminée, Charles de Gaulle, pour fonder l’avenir – au-delà de sa personne menacée par les attentats activistes (attentat du Petit-Clamart par l’OAS, le 22 août 1962) – entreprend de transformer de nouveau le régime par l’institution de l’élection directe du président de la République au suffrage universel.

Cette considérable réforme fait l’objet d’une dure bataille référendaire à demi gagnée – à demi seulement puisque, pour la première fois, le général n’a pas entraîné la majorité des électeurs, mais seulement celle des votants. L’Assemblée qui avait renversé le premier gouvernement Pompidou mis en place au lendemain de la paix algérienne ayant été dissoute, les élections de novembre 1962 donnent toutefois aux partisans du régime la majorité absolue au Palais-Bourbon.

LE RÉFÉRENDUM DU 28 OCTOBRE 1962 : UN TOURNANT

C’est peut-être au référendum du 28 octobre 1962, peut-être même au début de cette année-là, que commence à apparaître la faille qui ira désormais en s’élargissant dans les relations entre le chef de l’État et le peuple français. Certes, s’il est mis en ballottage à l’élection présidentielle de 1965, première application du nouveau mode de scrutin, Charles de Gaulle n’en connaît pas moins le succès au second tour.

Si les élections législatives de mars 1967 sont médiocres, l’opposition n’ayant qu’un député de moins qu’une majorité dans laquelle les gaullistes ne font plus seuls la loi, la revanche viendra. Elle sera complète, triomphale même, en juin 1968, lorsque les électeurs répondront massivement à l’appel du général, qui a repris le contrôle de la situation au terme d’un mois de mai agité, voire dramatique. Il reste que Charles de Gaulle lui-même (selon André Malraux dans les Chênes qu’on abat) fera un jour remonter à 1962 l’origine du malentendu qui aboutira au « non » du référendum d’avril 1969 et à son départ immédiat, après presque onze ans de pouvoir.

4.3. « UNE CERTAINE IDÉE DE LA FRANCE »

Pendant ces années, Charles de Gaulle marque profondément de son empreinte la vie publique du pays.

POUR L’INDÉPENDANCE ET LA GRANDEUR DE LA FRANCE

Sa politique étrangère, faite de refus, de défis et d’affirmations répétées de la grandeur et de l’indépendance, est à la fois cohérente et nouvelle, même aux yeux de ceux qui ne l’approuvent pas. Elle consiste, dans ses lignes directrices, à réorienter et rééquilibrer les alliances du pays. De Gaulle entame ainsi avec l’Union soviétique la recherche de la détente, puis de l’entente, enfin de la coopération, tandis que – sans se séparer de ses alliés occidentaux – la France prend ses distances à leur égard. Elle se retire progressivement du commandement militaire intégré de l’OTAN, tout en poussant activement la mise sur pied de la « force de frappe » nucléaire nationale, et maintient fermée devant la Grande-Bretagne la porte de la Communauté économique européenne (CEE).

Cette Communauté traverse à maintes reprises des jours difficiles et elle se transforme, par la volonté du président français : tournant le dos à l’intégration, à l’institution progressive d’un pouvoir supranational, elle devient l’« Europe des États », dans laquelle chacun des six membres conserve sa pleine souveraineté. Le traité de l’Élysée, signé le 22 janvier 1963 entre le général de Gaulle et le chancelier Adenauer a scellé la réconciliation franco-allemande.

Les crises, les menaces, les ruptures même et les combats d’avant-garde ou d’arrière-garde – contre la politique américaine au Viêt Nam (discours de Phnom-Penh du 1er septembre 1966), contre la politique israélienne au Proche-Orient, contre le système monétaire international, pour « le Québec libre » (juillet 1967) etc. – caractérisent cette diplomatie. À travers elle, de Gaulle exprime une volonté de puissance obstinément tendue à travers un jeu subtil, un dosage savant de conciliation et de chantage, mais ce qu’elle a de profondément légitime souffre de ce qu’elle peut avoir de démesuré.

UNE AUTORITÉ DE PLUS EN PLUS CONTESTÉE

En politique intérieure, sous l’égide du président de Gaulle, la gestion est moins cohérente et moins spectaculaire que sa diplomatie.

Fin 1958, une dévaluation, une révision complète des bases de la vie économique et bientôt les premiers effets du Marché commun européen avaient assuré un bon départ et permis de rétablir une situation compromise. Peu à peu, cependant, l’inflation sournoisement réapparue sape la réussite ; un plan de stabilisation, trop tardivement mis en œuvre, mal calculé et trop longtemps maintenu en application, vient casser l’expansion. Il faut alors, non sans peine, trouver un second souffle, tandis que les tensions sociales se font d’année en année plus vives jusqu’à la grève généralisée, spontanément apparue en mai 1968 à la suite de la révolte étudiante.

 « La réforme, oui, la chienlit, non »

Cette révolte et cette grève exprimaient sans doute une crise de civilisation. Elles n’en résultaient pas moins, pour une part, de l’absence de vraies réformes tant universitaires que sociales au cours des dix années précédentes. L’enseignement a bien fait l’objet de fréquentes réorganisations, transformations et retouches – trop fréquentes même à certains égards –, mais presque toujours trop tardives et insuffisantes. La doctrine sociale du régime, issue de l’« association capital-travail » du gaullisme, a bien reçu quelques timides débuts d’application, sans grand succès d’ailleurs. Mais la France est là en retard d’une révolution et même de plusieurs : dans l’enseignement, dans les rapports entre employeurs et salariés, dans l’organisation de son économie, de la distribution, etc.

4.4. HOMME D’APRÈS-DEMAIN ET D’AVANT-HIER

Visionnaire en politique étrangère, grand stratège sur l’échiquier international, pour beaucoup persuasif et même séduisant dans sa hauteur souveraine et bonhomme à la fois, audacieux et déterminé dans le jeu institutionnel, autoritaire mais non dictatorial dans sa façon de gouverner, dans ses rapports avec le peuple, de Gaulle était peut-être en avance sur son temps dans sa vision de l’avenir.

Mais il était en retard sur une époque qu’à la fin il ne comprenait plus très bien, dès lors qu’il s’agissait de canaliser les forces neuves et désordonnées parfois de la jeunesse, de devancer et d’organiser les transformations nécessaires, de dépasser la gestion pour entreprendre de grandes réformes. Lorsqu’il tenta de s’y attaquer enfin, après le choc de mai-juin 1968 – il était trop tard. Le pays le lui manifesta sans ambages en lui répondant « non » pour la première fois lors du référendum d’avril 1969 sur la régionalisation et la réforme du Sénat.

Abandonnant sur-le-champ non seulement le pouvoir mais la politique pour reprendre sa place depuis longtemps inscrite dans l’Histoire, le grand homme se contenta pendant les dix-huit mois qui lui restaient à vivre de quelques gestes et de quelques abstentions symboliques, se gardant avec soin de se prononcer de quelque façon que ce soit sur le choix et sur l’action de ses successeurs.

Pour en savoir plus, voir les articles Charles de Gaulle écrivaingaullismeVe République.

Consulter aussi le site de la Fondation Charles de Gaulle http://www.charles-de-gaulle.org/.

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Le Code noir

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Le Code noir

 

Code noir

 

Le titre Code noir a été donné à l’Ordonnance royale ou Édit royal de mars 1685 touchant la police des îles de l’Amérique française à partir de son édition Saugrain de 1718, puis aux édits similaires de 1723 sur les Mascareignes et de 1724 sur la Louisiane, et enfin, à partir du milieu du xviiie siècle, aux recueils de textes juridiques relatifs aux territoires français d’outre-mer où l’esclavage était toléré, exclusivement sur des îles et en Louisiane.

 

Trois états

Il existe trois édits différents connus sous l’appellation de Code noir. Le premier, préparé par le ministre Colbert (1619-1683) et terminé par son fils, le marquis de Seignelay (1651-1690), daté de 1685 est, à l’origine, une ordonnance promulguée en mars de cette année-là par le roi Louis XIV. Un seul manuscrit de ce texte est actuellement connu : conservé aux Archives nationales d’outre-mer, il est dit « Ordonnance ou édit de mars 1685 sur les esclaves des îles de l’Amérique ».

Le second et le troisième édits concernent respectivement les Mascareignes et la Louisiane : ils sont rédigés sous la régence de Philippe d’Orléans, promulgués aux mois de décembre 1723 puis de mars 1724 par le roi Louis XV, alors âgé de treize ans. Le contenu juridique et la numérotation des articles ont été en partie modifiés par rapport à l’Édit de mars 1685. C’est sous la Régence que les premières autorisations royales pour pratiquer la traite d’esclaves ont été données à des armateurs de ports français.

À partir du milieu du xviiie siècle, l’expression Code noir est utilisée par des éditeurs, comme les Libraires associés et Prault, pour désigner non pas seulement des édits, mais des recueils de textes juridiques applicables aux colonies françaises.

Ces recueils regroupent, autour de l’ordonnance ou édit de mars 1685, les lois, décisions royales, textes juridiques élaborés par le pouvoir royal pour les colonies et relatifs au gouvernement, à l’administration et à la condition des esclaves des pays du domaine colonial de la France entre 1685 et la fin de l’Ancien Régime.

Évoluant dans le temps et pour chaque colonie, ces textes précisent le statut civil et pénal des esclaves, ainsi que les relations entre les esclaves et leurs maîtres, et fixent le statut patrimonial des esclaves définis comme biens meubles à l’article XLIV de l’ordonnance ou édit de mars 1685 mais avec des exceptions aux articles suivants.

À travers ces recueils, se lisent les évolutions de la condition socio-économique et juridique des esclaves dans les colonies du royaume de France avant le décret d’abolition de l’esclavage du 4 février 1794.

 

Territoires d’application

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L’ordonnance ou édit de mars 1685 est enregistrée tout d’abord au conseil souverain de La Martinique le 6 août 1685, puis devant celui de La Guadeloupe le 10 décembre de la même année, avant de l’être au Petit-Goâve devant celui de la partie française de la colonie de Saint-Domingue, le 6 mai 1687, avec des variantes parfois importantes dans le texte. Et, enfin, devant celui de Cayenne en Guyane le 5 mai 1704. Le texte est également applicable à Saint-Christophe, mais la date de son enregistrement dans cette colonie n’est pas connue à ce jour.

L’édit de décembre 1723 est enregistré et applicable à la Réunion (île Bourbon à l’époque) et à l’île Maurice (Île-de-France), et son homologue de mars 1724 à la colonie et province de la Louisiane en 1724.

Le Code noir ne concerne pas la colonie du Canada, où l’esclavage était moins développé et concernait principalement les Amérindiens.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 énonce le principe de l’abolition de l’esclavage, mais sous l’influence du Club de l’hôtel de Massiac la Constituante et la Législative de 1791 posent que cette égalité ne s’applique qu’aux habitants de la métropole (où il n’y avait pas d’esclaves mais où le servage paysan subsistait encore à l’époque) et pas à ceux des colonies d’Amérique.

Après son abolition locale à Saint-Domingue en 1793, le 4 février 1794, la Convention décrète l’abolition de l’esclavage, dans toutes les colonies, mais cette mesure ne sera effective, outre Saint-Domingue, qu’en Guadeloupe et en Guyane, puisque la Martinique reste aux mains des Britanniques, et que les colons des Mascareignes s’opposeront par la force à l’application du décret de 1794 lorsqu’il y sera enfin envoyé en 1796.

Napoléon Bonaparte fait maintenir, par la loi du 20 mai 1802, l’esclavage dans les îles récupérées des Britanniques par le traité d’Amiens, spécialement la Martinique, ainsi qu’aux Mascareignes. Puis, il le rétablit en Guadeloupe (16 juillet 1802) et en Guyane (décembre 1802). L’esclavage ne sera pas rétabli à Saint-Domingue en raison de la résistance victorieuse des Haïtiens contre le corps expéditionnaire envoyé par Bonaparte, ce qui aboutit à l’indépendance de la colonie sous le nom de république d’Haïti le 1er janvier 1804.

L’esclavage des Noirs dans les colonies françaises ne sera définitivement aboli que le 4 mars 1848 et 27 avril 1848, la traite négrière l’ayant été en 1815.

 

L’origine du peuplement en esclaves

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Code Noir, définition dans Armand-Gaston Camus, Lettres sur la profession d’avocat, 1772.

L’édit de 1685 vient combler un vide juridique, puisque l’esclavage est inconnu en France depuis plusieurs siècles, alors qu’il est établi, en fait, dans les îles françaises des Antilles depuis 1625 au moins. Le premier établissement officiel français dans les Antilles est la Compagnie de Saint Christophe et îles adjacentes, créée par Richelieu en 1626, et l’île de Saint-Christophe compte déjà, en 1635, 500 ou 600 esclaves, acquis essentiellement par la prise sur les Espagnols d’une cargaison d’esclaves, population accrue ensuite d’autres esclaves amenés de Guinée par des navires hollandais ou français. L’île étant trop peuplée, on entreprend la colonisation en Guadeloupe en 1635, avec des engagés de France, et en Martinique la même année, essentiellement avec 100 « vieux habitants » de Saint Christophe.

En Guadeloupe, l’introduction d’esclaves commence en 1641 avec l’importation par la Compagnie des Isles d’Amérique, alors propriétaire des îles, de 60 Noirs, puis en 1650, de 100 nouveaux7. Mais c’est à partir de 1653-1654, avec l’arrivée dans les îles françaises, d’abord en Guadeloupe, de 50 Hollandais chassés du Brésil, qui emportent avec eux 1 200 esclaves nègres ou métis que le peuplement prend une ampleur significative. Ensuite, 300 personnes, comprenant surtout des familles flamandes et un grand nombre d’esclaves, s’installent aussi en Martinique.

Leur arrivée concorde avec la seconde étape de la colonisation. Jusqu’alors tournée vers la culture du tabac et de l’indigo, la mise en valeur faisait davantage appel aux engagés qu’aux esclaves, tendance qui s’inverse vers 1660 avec le développement de la culture sucrière et des grandes propriétés.

L’État dès lors va prendre à cœur de favoriser la traite négrière, et d’écarter la traite étrangère, en particulier hollandaise. Il est indéniable que la traite négrière est pratiquée par la Compagnie des Indes, devenue propriétaire des îles, même si le commerce des esclaves n’est pas expressément mentionné dans l’Édit de 1664 qui la constitue. Malgré diverses mesures incitatives prises en 1670, 1671, 1672, la compagnie fait faillite en 1674, et les îles passent dans le domaine royal. Le monopole de la traite vers les îles françaises est établi en faveur de la Première compagnie d’Afrique ou du Sénégal en 1679, puis, pour renforcer l’offre insuffisante, est créée en 1685 la Compagnie de Guinée pour fournir annuellement aux îles 1 000 esclaves noirs supplémentaires, et le roi lui-même, pour mettre un terme à « la disette de nègres » affrétera un navire négrier vers le Cap-Vert en 1686.

Au premier recensement officiel fait en Martinique, en 1660, il y a 5 259 habitants, dont 2 753 Blancs, et déjà 2 644 esclaves noirs, 17 indiens Caraïbes et seulement 25 mulâtres. Vingt ans après, en 1682, la population est multipliée par trois, 14 190 habitants, avec une population de Blancs qui a fait moins que doubler, tandis que celle d’esclaves noirs est passée à 9 634, et celle d’indigènes à 61 individus. La proportion d’esclaves noirs atteint 68 % de la population totale.

Il existe, dans toutes les colonies, une très grande disproportion entre le nombre d’hommes et de femmes, de telle sorte que les hommes ont des enfants, soit avec des indigènes qui sont toujours libres, soit avec des esclaves. Les femmes blanches étant rares, et les femmes noires ayant l’espoir d’améliorer ainsi leur sort, en 1680 la Martinique recense 314 métis (soit douze fois plus qu’en 1660) et la Guadeloupe 170, contre 350 métis à la Barbade, où les esclaves sont pourtant huit fois plus nombreux mais où le métissage avait été réprimé dès l’intensification de la culture du sucre.

Pour pallier ce déficit de peuplement en femmes, Versailles fait comme avec les filles du roi pour les autres colonies françaises d’Amérique et envoie entre 1680 et 1685 en Martinique 250 filles blanches, et 165 à Saint-Domingue. Contrairement aux colonies anglaises, ce sont toujours des migrants ou des migrantes volontaires, et non des populations de déclassés et de condamnés, bannis ou relégués. Toutefois, le processus de créolisation reste très fort en raison des lois d’endogamie, et les filles de couleur restent souvent préférées aux nouvelles arrivantes qui sont considérées comme des étrangères. Le problème pour les autorités n’est pas tant celui du métissage, que celui de l’affranchissement des enfants « mulâtres ». Le nouveau statut va donc inverser la coutume de France : les enfants d’une femme esclave seront esclaves, même si leur père est libre, sauf légitimation des enfants par le mariage des parents, cas fort rare. Plus tard, les mariages entre population libre et esclave seront limités.

Le Code noir ayant tranché la question du statut des métis, en 1689, quatre ans après sa promulgation, une centaine de mulâtres quittent les Îles françaises pour rejoindre la Nouvelle-France, où tous les hommes sont libres.

 

Les buts du Code noir

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Exemplaire du Code noir édité en 1742, musée d’histoire de Nantes.

Dans un livre controversé d’analyse sur le Code noir de 1987, le spécialiste de la philosophie du droit Louis Sala-Molins affirme qu’il sert un double objectif : réaffirmer « la souveraineté de l’État dans les terres lointaines » et favoriser la culture de la canne à sucre. « En ce sens, le Code noir table sur une possible hégémonie sucrière de la France en Europe. Pour atteindre ce but, il faut prioritairement conditionner l’outil esclave ».En matière religieuse, l’ordonnance de 1685 rappelle le principe chrétien de l’égalité ontologique de tous les hommes, par-delà leurs conditions sociales et leurs races. Elle prévoit donc le baptême, l’instruction et les mêmes pratiques et sacrements religieux pour les esclaves que pour les hommes libres, en excluant ce qui n’est pas catholique. De ce fait, les esclaves ont droit au repos du dimanche et des fêtes, la possibilité de se marier solennellement à l’église, d’être enterrés dans les cimetières, d’être instruits. Il donne une garantie de moralité à la noblesse catholique arrivée en Martinique entre 1673 et 1685  : chevalier Charles François d’Angennes, marquis de Maintenon, son neveu Jean-Jacques Mithon de Senneville, l’intendant Jean-Baptiste Patoulet, Charles de Courbon, comte de Blénac, le capitaine de milice Antoine Cornette, ou Nicolas de Gabaret.

Cette ordonnance tranche le débat juridique sur le statut des enfants métis, à une époque où le développement de la canne à sucre et de la traite négrière à grande échelle abaisse l’espérance de vie des esclaves, qui n’acceptent plus d’avoir des enfants qu’avec des Blancs, dans l’espoir qu’ils puissent être libres.

Le Code noir déclare que l’enfant naturel d’une esclave est forcément esclave, sauf si le père est libre et de ce fait contraint au mariage par l’article 9. (article 13) selon le principe de droit romain partus sequitur ventrem

Avoir un enfant avec une esclave lorsqu’on est déjà marié est puni d’une amende de deux mille livres de sucre et par la confiscation de l’esclave (article 9). Si le maître n’est pas marié, il doit l’épouser et l’esclave et l’enfant deviennent libres.

Les maîtres sont contraints de nourrir et vêtir leurs esclaves et de leur donner par chaque semaine […] deux pots et demi de farine de manioc (article 22) ainsi que deux habits de toile par an (article 25).

Le Code noir légitime les châtiments corporels pour les esclaves, y compris des mutilations comme le marquage au fer, ainsi que la peine de mort (art. 33 à 36, et art. 38 : Tout fugitif disparu pendant un mois aura les oreilles coupées et sera marqué d’une fleur de lys avant d’avoir le jarret coupé en cas de récidive, et condamné à mort à la deuxième récidive), peines qui existaient aussi en métropole dans les usages répressifs de l’époque.

Il s’agit de la justice publique, royale. Le pouvoir disciplinaire domestique est plus limité. Les maîtres, « lorsqu’ils croiront que leurs esclaves l’auront mérité », pourront seulement les faire enchaîner et battre au fouet (article 42). Ils ne peuvent ni torturer de leur propre chef, ni mettre à mort leurs esclaves (art. 43). Le Code noir prévoit aussi que les esclaves ont la possibilité de se plaindre auprès des juges locaux en cas d’excès ou de mauvais traitements (art. 26). En pratique, ces dispositions étaient souvent violées par les maîtres, qui outrepassaient leur pouvoir domestique en prétendant exercer un pouvoir répressif total sur leurs esclaves.

Origines juridiques et législations proches

Colonies anglaises

Dans les colonies anglaises, le Décret de 1636 sur l’esclavage à vie à La Barbade fut pris par le gouverneur Henry Hawley, de retour d’Angleterre après avoir confié la colonie à son sous-gouverneur Richard Peers. En 1661, le code des Barbades reprend et développe ce décret de 1636. Un texte proche, la loi virginienne de 1662 sur l’esclavage est édicté au même moment en Virginie, gouvernée par William Berkeley sous le règne de Charles II. La loi de 1661 édicte qu’une esclave ne peut avoir que des enfants esclaves. Elle prévoit que les mauvais traitements contre un esclave sont justifiés dans certains cas Elle traduit dans la loi la contestation de la Jurisprudence Elizabeth Key par l’aristocratie blanche, concernant les naissances métisses.

Colonies françaises

Contrairement à ce qu’ont affirmé plusieurs théoriciens du droit comme Leonard Oppenheim, Alan Watson ou Hans W. Baade, ce n’est pas la législation sur les esclaves du droit romain qui a servi de source d’inspiration, mais un recueil et codification des usages, décisions et règlements ayant cours à l’époque dans les Antilles, selon Vernon Valentine Palmer, qui a décrit le long processus décisionnel menant à l’Édit de 1685. Le processus dure quatre ans, avec brouillon, rapport préliminaire et projet de 52 articles, ainsi que les instructions du roi, document conservés dans les archives publiques françaises

Le Roi décide en 1681 la création d’un statut pour les populations noires des Îles d’Amériques, puis charge Colbert de s’en occuper. Colbert donne alors mission à l’intendant de la Martinique, Jean-Baptiste Patoulet, remplacé en juillet 1682 par Michel Bégon, et au gouverneur général des Antilles Charles de Courbon, comte de Blenac (1622-1696).

Le Mémoire du roi à son intendant, qu’on peut supposer être de Colbert, daté du 30 avril 1681, expose l’utilité de préparer une ordonnance spéciale pour les Antilles. À cette époque, il n’y avait plus aucun esclave, depuis très longtemps, en France : l’émancipation de tous les serfs du domaine royal fut prise le 11 juillet 1315 par Louis X le Hutin.

L’étude, qui incluait certains usages coutumiers vernaculaires, les décisions et la jurisprudence du Conseil souverain, avec plusieurs arrêts du Conseil du roi, a été confrontée et discutée avec les membres du Conseil souverain. Une fois terminé, le projet a été envoyé à la chancellerie qui en a conservé l’essentiel, se contentant de renforcer ou d’alléger certaines dispositions pour les rendre mieux compatibles avec le reste du droit et des institutions communes.

À cette époque, il existait deux statuts de droit commun en vigueur à la Martinique : celui des Français d’origine qui était la Coutume de Paris, et celui des Étrangers, sans parler des statuts particuliers pour les soldats, les nobles, ou les religieux. Ces statuts étaient complétés par l’Édit du 28 mai 1664 portant établissement de la Compagnie des Indes occidentales à laquelle les îles d’Amérique étaient inféodées ou concédées. Elle succédait à la Compagnie de Saint-Christophe ‘1626-1635) avec le même objet, puis à la Compagnie des îles d’Amérique (1635-1664). Les populations autochtones, connues sous le nom d’Indiens caraïbes, s’étaient vues reconnaître la naturalité française avec les mêmes droits et honneurs que les Français d’origine, dès leur baptême dans la religion catholique. Il était interdit de les mettre en esclavage et de les vendre comme esclaves. Deux sources de peuplements étaient prévues : celui des populations naturelles et les Français d’origine. L’Édit de 1664 ne prévoit pas non plus d’esclaves, ni d’importation d’une population noire. La Compagnie française des Indes occidentales ayant fait faillite en 1674, ses activités commerciales sont transférées à la Compagnie du Sénégal, tandis que les territoires des Îles reviennent au Domaine royal. Des arrêts du Conseil souverain de la Martinique pallient le vide juridique concernant les populations esclaves: en 1652, il rappelle que l’interdiction de faire travailler les domestiques le dimanche s’applique aussi aux esclaves ; en 1664, il exige qu’ils soient baptisés et tenus au catéchisme

L’Édit de 1685 entérine des pratiques esclavagistes contraires à la législation (métropolitaine) française et au droit canon.

La commande du roi, transmise par Colbert, ne vise que la Martinique

Malade dès 1681, Colbert meurt en 1683, moins de deux ans après avoir transmis la demande du roi aux deux intendants qui se sont succédé à la Martinique, Jean-Baptiste Patoulet, puis Michel Bégon. C’est son fils, le marquis de Seignelay, qui a signé l’ordonnance en 1685, deux ans après sa mort.

À la demande du roi, le travail des deux rapporteurs s’est centré sur la Martinique, où plusieurs nobles de l’entourage royal ont reçu des terres, Louis XIV acceptant de plus d’anoblir les planteurs détenant plus de cent esclaves, comme l’a conseillé l’intendant Jean-Baptiste Patoulet. Les personnalités auditionnées sont toutes martiniquaises. Personne n’est interrogé en Guadeloupe, où les métis et les grands planteurs sont moins nombreux.

La première lettre de Colbert à l’intendant Jean-Baptiste Patoulet est rédigée ainsi :

« sa Majesté estime nécessaire de régler par une déclaration tout ce qui concerne les nègres dans les isles, tant pour la punition de leurs crimes que pour tout ce qui peut regarder la justice qui leur doit être rendue, et c’est pour cela qu’il faut que vous fassiez un mémoire le plus exact et le plus étendu qu’il sera possible, qui comprenne tous les cas qui peuvent avoir rapport aux dits nègres en quelque manières que ce puisse être qui mériteraient d’être réglés par un ordre et vous devez bien connaître l’usage observé jusqu’à présent dans les isles et votre avis sur ce qui devrait être observé à l’avenir. »

La Compagnie des Indes occidentales (1664-1674) et la démographie antillaise

Colbert avait surtout privilégié aux Antilles la culture du tabac, ne nécessitant pas un grand nombre d’esclaves. Sa principale création dans le domaine colonial, la Compagnie des Indes occidentales de 1664, fut en fait suivie par dix ans de baisse du nombre d’esclaves en Martinique:

La même diminution du nombre d’esclaves, après 1664, a été constatée en Guadeloupe, où les planteurs se plaignirent de la Compagnie des Indes occidentales de Colbert. Leur nombre augmente très fortement ensuite dans les années 1680, après la dissolution la Compagnie des Indes occidentales.

Culture de la canne à sucre, chute du taux de fécondité des esclaves et recours au métissage

Le Code noir est édicté dans la foulée d’un durcissement de l’esclavage, après la création de la Compagnie royale d’Afrique anglaise en 1672 et de la Compagnie du Sénégal française en 1673, pour approvisionner en esclaves la très rentable culture du sucre (venant de la canne à sucre).

Ces nouvelles compagnies firent baisser le coût de la traversée. Leur arrivée sur les côtes d’Afrique fit augmenter brutalement le prix des esclaves, stimulant les guerres tribales africaines. L’esclavage prit une dimension industrielle, spécialement en Martinique, où subsistaient auparavant nombre de petites plantations de tabac n’employant que quelques esclaves. Le métissage y était toléré mais restait rare.

L’île se mit à rattraper son « retard » économique par la multiplication des « habitations » ou plantations comptant plus de cent esclaves. Avoir au moins cent hommes à son service sur son « habitation » permit d’en faire un fief avec titre de noblesse. La culture du sucre remplaça celle du tabac. La rentabilité y est poussée au maximum. Le traitement inhumain de la main-d’œuvre fit chuter le taux de fécondité. Pour les esclaves, le seul moyen d’avoir une progéniture libre, promise à une existence supportable, est d’avoir des relations sexuelles avec des blancs (pas forcément les plus riches), d’où une augmentation rapide du nombre de métis.

Les grands planteurs compensèrent la faible espérance de vie de leurs esclaves et leur faible fécondité, par l’achat de quantités toujours plus importantes de travailleurs sur les côtes d’Afrique. Ce qui signifie qu’à chaque période où cet approvisionnement fut freiné ou interrompu, par exemple lors de la guerre de la Ligue d’Augsbourg, le nombre d’esclaves vivant aux Antilles stagna ou déclina.

Les mémoires qui ont inspiré le Code noir

Le premier mémoire, daté du 20 mai 1682, est signé par l’intendant Jean-Baptiste Patoulet, et approuvé par Charles de Courbon, comte de Blénac. Le deuxième, daté du 13 février 1683 est signé par son successeur, l’intendant Michel Bégon. Le texte intégral des deux mémoires figure aux archives nationales. Le rédacteur de 1685 va bien sûr choisir le deuxième texte, et même le remanier.

La question des enfants nés de parents libres et esclaves est longuement évoquée dans les deux mémoires. Comme l’exige le roi, ils étudient les usages et jurisprudences en cours.

En Martinique les premières décisions de 1673 tendaient à rattacher les enfants métis au statut d’esclave de leur mère, mais sans trancher clairement.

En Guadeloupe, un arrêt du conseil des planteurs de 1680 stipula que tous les enfants de négresses seront nés esclaves. Cet arrêt s’explique par un développement plus tôt de l’esclavage en Guadeloupe qu’en Martinique, dans les années 1650. Il contribue ensuite à ce que la Guadeloupe compte deux fois moins de métis que la Martinique en 1685.

Consulté, pour son mémoire, sur le cas des femmes noires qui se font faire des enfants par leurs maîtres pour avoir une progéniture libre, Charles de Courbon, comte de Blénac et gouverneur de la Martinique répond très clairement : « L’usage de la Martinique est que les mulâtres soient libres après avoir atteint l’âge de 20 ans et les mulâtresses après avoir atteint l’âge de 15 ans. »

Résultat, on recense déjà 314 mulâtres en Martinique en 1680, mais seulement 170 en Guadeloupe alors qu’ils ne sont que 350 à la Barbade, où la population d’esclaves est pourtant huit fois plus nombreuse, mais où la loi anglaise fixe un cadre restrictif depuis 1662.

Le code noir entérinera cette évolution juridique vers la restriction. Les deux mémoires, rédigés l’un comme l’autre par les hauts fonctionnaires responsables de la Martinique, conservent le principe général en vigueur dans toutes les coutumes de France : l’enfant légitime, ou reconnu tel, suit la condition de son père, et l’enfant naturel celle de sa mère.

Les deux mémoires ajoutent cependant le même point : la possibilité pour l’enfant non reconnu dont le père est présumé libre, d’obtenir aussi son affranchissement, avec un acte particulier.

Mais cette disposition, fondamentale, ne sera pas retenue dans le texte final. Dans d’autres domaines, le code noir est encore plus restrictif que certaines pratiques existantes, en abrogeant par exemple le recours à des jardins potagers pour les esclaves, jusqu’ici tolérés.

Les dispositions du Code

Le préambule fait apparaître la notion d’ « esclave » comme un fait, sans en donner ni l’origine, ni la légitimation. De fait, c’est une disposition qui est absolument contraire au droit français et qui fera que plusieurs parlements refuseront d’enregistrer le texte.

Il encourage à baptiser les esclaves, à les instruire, à leur fournir une éducation et une sépulture catholique. Ses rédacteurs pensaient que les Noirs étaient des personnes humaines, dotées d’une âme et susceptibles de salut, conformément aux déclarations papales de 1537 (Veritas ipsa). L’interdiction de mise en esclavage de tout peuple déjà connu ou venant à être découvert reste cependant passée sous silence. L’article 2 leur interdit par ailleurs de pratiquer la foi protestante.

L’article 44, qui déclare que « les esclaves sont meubles » en fait des biens pouvant être achetés, vendus, donnés, saisis en obéissant aux formes prévues pour les biens meubles. Cette disposition n’en fait pas des choses, dénuées de personnalité juridique : ils peuvent témoigner, posséder un pécule, se marier, se plaindre, etc. Cependant, cette personnalité est celle d’une personne mineure, plus restreinte que celle des enfants et des domestiques.

Les dispositions concernant les enfants se répartissent en deux catégories :

« L’homme qui n’était point marié à une autre personne durant son concubinage avec son esclave, épousera dans les formes observées par l’Église ladite Esclave, qui sera affranchie par ce moyen, & les enfans rendus libres & légitimes » (disposition IX du code de 1685)

Un enfant né de parents esclaves devient à son tour esclave, selon l’article 12. L’article 13 précise que « Si le mari esclave a épousé une femme libre, les enfants tant mâles que filles suivent la condition de leur mère, et que si le père est libre et la mère esclave, les enfants soient esclaves pareillement ». Le mariage des esclaves est impossible sans le consentement des maîtres.

La peine de mort est prévue pour avoir frappé son maître (article 33), pour vol de cheval ou vache — mais le vol domestique était aussi puni de mort en France — (article 35), pour la troisième tentative d’évasion (article 38), ou pour réunion (article 16).

S’il est interdit de torturer les esclaves, le maître possède un pouvoir disciplinaire. Article 42 : « Pourront seulement les maîtres, lorsqu’ils croiront que leurs esclaves l’auront mérité, les faire enchaîner et les faire battre de verges ou de cordes ». Si le texte oblige à nourrir et à vêtir ses esclaves (article 22), il interdit (article 24) de cultiver pour leur propre compte un lopin de terre.

L’article 43 s’adresse aux magistrats : « et de punir le meurtre selon l’atrocité des circonstances ; et en cas qu’il y ait lieu de l’absolution, permettons à nos officiers […] ». Ainsi, les peines plus graves, l’amputation d’une oreille ou d’un « jarret » (article 38), le marquage au fer chaud de la fleur de lys et la mort sont prévues en cas de condamnation par une juridiction pénale, et appliquées par un magistrat, non par le maître lui-même. Concrètement, les condamnations des maîtres pour le meurtre ou la torture d’esclave seront très rares.

Par ailleurs, si l’esclave peut se plaindre officiellement (article 26), son témoignage est considéré comme peu fiable (article 30), mais c’est aussi le cas de tous les mineurs et des domestiques. Plus généralement, l’esclave jouit d’une capacité juridique restreinte, beaucoup plus que les serfs du Moyen Âge.

L’article 27 tente de fournir un minimum de protection à l’esclave, notamment en cas de vieillesse ou de maladie. Il semble que l’abandon pur et simple d’un esclave vieux ou malade restera toutefois la règle, et une seule condamnation a été recensée, d’après Louis Sala-Molins, citant Peytraud.

Les esclaves noirs n’avaient pas le droit de porter des armes, sauf pour la chasse. À la première tentative de fuite, le marron capturé avait les oreilles coupées et était marqué au fer rouge. La deuxième tentative aboutissait à couper le jarret. La troisième tentative était punie de mort par pendaison.

L’affranchissement est libre (art. 55), mais par la suite (dès le début du xviiie siècle) nécessitera une autorisation ainsi qu’une taxe administrative, instituées par les administrateurs locaux et confirmées par l’édit du 24 octobre 1713 et l’ordonnance royale du 22 mai 1775.

Dans son livre d’analyse sur le Code noir et ses applications, publié en 1987, Louis Sala-Molins, professeur émérite de philosophie politique à Paris-I, estime que le Code noir est « le texte juridique le plus monstrueux qu’aient produit les Temps modernes ». Selon lui, le Code noir sert un double objectif : à la fois réaffirmer « la souveraineté de l’État dans les terres lointaines » et créer des conditions favorables au commerce de la canne à sucre. « En ce sens, le Code noir table sur une possible hégémonie sucrière de la France en Europe. Pour atteindre ce but, il faut prioritairement conditionner l’outil esclave »

Toutefois, la teneur exacte de l’édit de 1685 reste incertaine, car d’une part l’original n’a pas été conservé dans les Archives nationales, et d’autre part il existe des variantes parfois importantes entre les différentes versions anciennes. Il faut donc les comparer et savoir quelle était la version applicable et appliquée dans chaque colonie et dans chaque cas, afin de pouvoir mesurer le degré d’effectivité du Code noir dans la réalité.

Bernardin de Saint Pierre qui séjourne à l’Ile de France de 1768 à 1770, met en relief le décalage qui existe entre la législation et son application. Jean Ehrard voit dans ce code une mesure typiquement colbertiste de réglementation d’un phénomène, l’esclavage, qui s’était diffusé dans les colonies en dehors du cadre législatif. On trouve à la même époque des dispositions semblables concernant des catégories comme les marins, les soldats, ou les vagabonds. Et les colons s’y opposèrent parce qu’ils étaient censés fournir aux esclaves des moyens de subsistance que normalement ils ne leurs garantissaient pas.

Polémiques mémorielles

Lors de la parution de son ouvrage Le Code noir. Idées reçues sur un texte symbolique en 2015, l’historien Jean-François Niort est attaqué par des petits groupes politiques « patriotiques » guadeloupéens. Accusé de « discrimination raciale » et de négationnisme par quelques membres de la mouvance indépendantiste qui le menacent d’expulsion, il est soutenu notamment par la communauté des historiens qui dénoncent les intimidations verbales ou physiques adressées aux historiens spécialistes de l’histoire du fait colonial de cette région, et par le Conseil national des universités qui a lancé une pétition publique de soutien

Une controverse oppose dans les colonnes du journal Le Monde le philosophe Louis Sala-Molins et Jean-François Niort qui considère le Code noir comme une « médiation entre le maître et l’esclave ».

Place des Juifs

L’article premier du Code noir enjoint de chasser des colonies « les juifs qui y ont établi leur résidence », présentés comme « ennemis déclarés du nom chrétien », ce dans un délai de trois mois sous « peine de confiscation de corps et de biens ».

Les juifs antillais visés par le Code Noir seraient majoritairement « les descendants des familles d’origine portugaise et espagnole qui avaient résidé dans la colonie hollandaise du Pernambouc au Brésil » (Jean-Frédéric Schaub, 1683 : un 1492 français ?, dans Histoire mondiale de la France (2017, dir. Patrick Boucheron), p. 333).

 

.Jean-Baptiste Colbert

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Homme d’État français (Reims 1619-Paris 1683).

  1. UN GRAND SERVITEUR DE L’ÉTAT

1.1. LA FORTUNE, UNE FORMATION DE NÉGOCIANT ET QUELQUES NOTIONS JURIDIQUES

Colbert appartient à une famille qui dispose d’une fortune considérable. Il est apparenté à Michel Le Tellier, secrétaire d’État à la Guerre, dont Colbert de Saint-Pouange, un cousin, épouse la sœur. Son père, riche négociant, le fait entrer à quinze ans chez le banquier lyonnais Mascranny, où il apprend le commerce. Un stage chez un procureur complète ensuite sa formation et lui apporte des rudiments de droit. Muni de ce bagage essentiel, Colbert achète une charge de commissaire ordinaire des guerres, qui lui octroie le privilège de négocier le ravitaillement pour le compte des armées du roi et de voyager dans tout le royaume.

1.2. AU SERVICE DE LE TELLIER PUIS DE MAZARIN

En 1645, Colbert se rapproche des allées du pouvoir en travaillant pour Michel Le Tellier. Cinq ans plus tard, il épouse Marie Charon, fille d’un conseiller du roi, qui lui apporte une dot de 100 000 livres. Fort des protections qu’il s’est assurées, Colbert devient, en 1651, l’homme de confiance de Mazarin, qui lui abandonne progressivement la gestion de sa fortune. Losque meurt le ministre de Louis XIV, le 10 mars 1661, le roi décide de gouverner seul. Mais le cardinal a eu le temps de lui recommander son protégé.

 

1.3. LE MINISTRE DE LOUIS XIV

Principal artisan de la disgrâce du surintendant Fouquet, Colbert lui succède comme ministre d’État (1661). Seul intendant des Finances en 1661, il accapare les plus hautes responsabilités : surintendant des Bâtiments, Arts et Manufactures (1664), chargé en particulier de la direction des travaux du château de Versailles, contrôleur général des Finances (1665), secrétaire d’État à la Maison du roi (1668) puis à la Marine (1669), grand maître des Mines de France (1670), il va s’occuper pendant plus de vingt ans de toute l’administration du royaume, à l’exception des Affaires étrangères et de la Guerre.

LE PERSONNAGE PRINCIPAL APRÈS LE ROI

Il avait pour devise Pro rege saepe ; pro patria semper (« Pour le roi, souvent ; pour la patrie, toujours »). Il fit preuve d’une activité débordante, accumulant de multiples attributions. Mais le roi, qui souhaitait gouverner son royaume et pas seulement y régner, n’abandonna jamais à son ministre autant de pouvoir que Louis XIII avait pu le faire avec Richelieu. Colbert ne fut donc pas un ministre tout-puissant, ni même un « principal ministre » comme l’avaient été Richelieu et Mazarin, même s’il fut, après le roi, le personnage principal du Conseil d’État (« Conseil d’en haut »).

LE CHEF DE CLAN

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Jean-Baptiste Colbert

Parvenu aux plus hautes charges de l’État, Colbert s’attacha néanmoins à favoriser ses parents et amis, créant le principal clan – avec celui, concurrent, des Le Tellier-Louvois – de la monarchie louis-quatorzienne. Son fils Seignelay fut secrétaire d’État de la Marine ; son frère Croissy, secrétaire d’État des Affaires étrangères ; son neveu Charles-Joachim Colbert de Croissy, évêque de Montpellier. Il fit nommer son cousin Jean Colbert de Terron commissaire général en 1661, puis, en 1666, intendant général des armées navales du Ponant.

Colbert ne dédaignait pas les gratifications du roi ; même s’il est considéré comme un ministre modèle, soucieux de l’intérêt de son souverain, il ne renonça pas à son enrichissement personnel – à un degré moindre, cependant, que Richelieu ou Mazarin.

Trois des six fils de Colbert furent tués dans des opérations militaires, deux lors de la guerre de la Ligue d’Augsbourg et un lors de la guerre de Succession d’Espagne.

  1. LA REMISE EN ORDRE DU ROYAUME

Étroitement liée à l’apogée de la monarchie louis-quatorzienne, elle s’inscrit en fait dans le cadre de la restauration de l’autorité monarchique et de la puissance royale, point focal de toutes les mesures prises par le ministre.

2.1. RESTAURER LES FINANCES

Dès 1661, Colbert s’efforce de restaurer les finances. Il pose les bases de la comptabilité publique en établissant un véritable budget (« état de prévoyance » pour l’année à venir et « état au vrai » pour l’année écoulée) et en tenant trois registres (recettes, dépenses, fonds). Il fait restituer au Trésor royal 120 millions de livres détournées par les financiers en créant une Chambre de justice (1661). Il diminue de plus de la moitié les charges de l’État en rachetant des offices inutiles, et en procédant à des réductions et annulations de rentes. Il augmente les recettes grâce à un meilleur rendement de l’impôt. Il abaisse de 15 % le montant de la taille personnelle et entreprend une chasse aux exempts abusifs (faux nobles, notamment). Il augmente en revanche certains impôts (dons gratuits du clergé et des pays d’état) et accroît le produit des impôts indirects par une étroite surveillance des traitants. Grâce à ses efforts obstinés (mais non réformateurs), Colbert assure un budget en équilibre de 1662 à 1671 ; dans le même temps, les revenus de l’État doublent largement.

Mais, avec les dépenses engagées pour la guerre de Hollande (1672-1678), le déficit réapparaît et le ministre doit revenir aux expédients : ventes d’offices, emprunts (création de la caisse des emprunts en 1674) et taxes nouvelles (monopole du tabac, extension de l’obligation du papier timbré [1674], etc.), qui provoquent des émeutes alors « fortement réprimées » (telle la révolte du papier timbré en Bretagne, en 1675). En 1680, Colbert signale au roi un excédent de dépenses de 20 millions sur les recettes et avoue son impuissance à combler le gouffre que creusent la guerre et les prodigalités royales. Appliquant dans tous les domaines la « maxime de l’ordre », Colbert intervient pour clarifier la loi et l’imposer dans tout le royaume.

2.2. UNIFIER LA LÉGISLATION

L’œuvre législative louis-quatorzienne est en majeure partie l’œuvre de Colbert, qui s’attache, dès le début de son ministère, à étendre la compétence des intendants, qui seront les meilleurs agents de la centralisation monarchique. En 1663, il compose pour ses subalternes une Instruction pour les maîtres des requêtescommissaires départis dans les provinces, destinée à lui permettre d’évaluer de façon en partie « statistique » les caractéristiques des provinces du royaume et les attentes des sujets.

Mais, surtout, il tente d’établir une certaine unité de législation : sous sa direction sont élaborées les ordonnances civile (1667), criminelle (1670), des Eaux et Forêts (1669), du Commerce (1673) et de la Marine (1681), qui visent toutes à mettre de l’ordre dans le chaos judiciaire et administratif hérité des siècles précédents. Il prépare le Code noir, promulgué après sa mort, qui règle les modalités de la traite des esclaves africains.

2.3. L’ORDRE CULTUREL

Instrument de la politique royale, l’ordre cuturel est aussi l’œuvre de Colbert, qui crée les Académies des inscriptions (1663), des sciences (1666), de la musique (1669), d’architecture (1671), ainsi que l’Académie de France à Rome (1666), et réorganise l’Académie de peinture et de sculpture (1663).

Il fonde aussi l’Observatoire de Paris (1667), autorise la parution du Journal des Savants (1665), enrichit considérablement la Bibliothèque du roi entre 1666 et 1682, multipliant par trois le nombre des volumes, réglemente les réunions de l’Académie française en créant les jetons de présence et réorganise le Jardin des Plantes (1671).

Dans son souci d’asservir l’art à la puissance et à la majesté royales, il édicte les règles, réglemente le travail des artistes avec le concours de Charles Le Brun, de Charles Perrault et des académies. Il est enfin à l’origine de divers grands travaux, comme, à Paris, le doublement du Cours-la-Reine par les Champs-Élysées.

  1. LA RECHERCHE DE L’EXPANSION ÉCONOMIQUE

3.1. UNE « GUERRE D’ARGENT »

Colbert consacre la majeure partie de son ministère à l’expansion économique du royaume. Il donne priorité aux manufactures, aux compagnies de commerce et de colonisation et à la construction maritime, autant de moyens pour créer dans le royaume de nouvelles richesses, cette « abondance de l’or et de l’argent dans le commerce » qui est pour lui fondamentale, et pour fournir au roi les ressources indispensables pour affirmer sa politique face aux autres États.

Le système économique qu’il préconise, et qu’on appellera le colbertisme, est fondé sur les principes du mercantilisme. Comme beaucoup de ses contemporains, Colbert voit dans le commerce une « guerre d’argent ». Mais il est avant tout au service du roi : il vise à enrichir le pays pour mettre le peuple en état de financer la « gloire du monarque ».

3.2. DES MANUFACTURES DE LUXE

Colbert crée des manufactures bénéficiant de privilèges (exemptions fiscales, monopoles de fabrication et de vente, aide financière et technique de l’État). Ces « créations » (plus de 400) concernent les produits de luxe (tapisseries des Gobelins, de Beauvais, d’Aubusson ; glaces et miroirs du faubourg Saint-Antoine, etc.), mais aussi les industries fondamentales, et principalement le textile (draps à Abbeville et Sedan, soieries de Lyon, etc.).

RÉGLEMENTÉES ET PROTÉGÉES PAR DES TARIFS DOUANIERS

Pour obtenir une production de qualité, sans égale en Europe, il multiplie les règlements dont il fait surveiller l’application par des inspecteurs généraux de manufacture. La protection des produits manufacturés est assurée par deux tarifs douaniers, institués en 1664 et en 1667 ; le second prohibant presque tous les produits anglais et hollandais, il sera une des causes de la guerre de Hollande.

3.3. MARINE MARCHANDE, MARINE DE GUERRE

Colbert encourage le développement de la marine marchande en accordant des primes aux armateurs, et fonde des compagnies de commerce dotées de privilèges et de monopoles : Compagnies des Indes orientales, des Indes occidentales (1664), du Nord (1669), du Levant (1670), du Sénégal (1673).

Colbert restaure aussi la marine de guerre : il établit le système de l’Inscription maritime (1668) et fait aménager des ports (Rochefort, Brest, Toulon, Dunkerque). Il porte ainsi, à la fin de sa vie, les flottes de guerre (276 vaisseaux en 1683 contre 18 en 1661) et de commerce à un niveau inégalé jusque-là.

3.4. LE GOUFFRE DE LA GUERRE

Dans les années 1664-1671, les résultats des efforts entrepris par Colbert sont remarquables : vers 1670, la draperie française, par exemple, exporte en Italie, en Espagne, en Allemagne, au Levant et en Inde. Mais, à partir de 1672, le coût de la guerre de Hollande provoque le relâchement du soutien financier de l’État à l’économie, ce qui entraîne la disparition ou le déclin de nombreuses manufactures et des compagnies de commerce.

  1. LES CAUSES DE L’« ÉCHEC DE COLBERT »

4.1. LA RARÉFACTION DES MÉTAUX PRÉCIEUX EN EUROPE

La politique belliqueuse de Louis XIV ne suffit pas à expliquer l’« échec de Colbert ». Celui-ci est dû également à la puissance de la concurrence anglo-hollandaise, qu’il était impossible d’évincer en quelques années, et plus encore à la conjoncture de dépression liée à la raréfaction des métaux précieux en Europe, qui allait à l’encontre de principes économiques fondés sur l’accumulation de ces métaux. En outre, en cette période de baisse des prix et des revenus, la clientèle courante (et majoritaire) ne pouvait s’intéresser aux produits de luxe ou de qualité fabriqués par les entreprises de Colbert.

4.2. LA STRUCTURE SOCIO-ÉCONOMIQUE DE LA FRANCE D’ANCIEN RÉGIME

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De plus, le ministre s’est heurté à des obstacles qui tenaient à la structure socio-économique de la France d’Ancien Régime : le refus des négociants, attachés à la liberté du commerce, de participer à des compagnies mises sur pied par l’État ; l’hostilité des marchands, des fabricants et des artisans aux contrôles, aux monopoles et aux règlements ; l’attrait de la bourgeoisie pour la terre et les offices ; la répugnance de la noblesse à l’égard de l’activité commerciale ; l’insuffisance du crédit ; la lenteur et le coût des transports.

Le système de Colbert était inadapté aux redoutables concurrences, à la conjoncture économique et aux traditions de la France louis-quatorzienne, encore féodale dans une large mesure, et où une mutation capitaliste rapide était irréalisable. À partir de 1680, l’influence de Colbert sur le roi diminue.

Cependant, malgré les efforts de Louvois, le ministre conservera jusqu’à la fin de sa vie un rôle essentiel dans la direction des affaires intérieures. Le « grand commis » de Louis XIV mourra épuisé de travail en 1683. (Académie française, 1667.)

 

https://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Jean-Baptiste_Colbert/114048

FRANCE, HISTOIRE DE FRANCE, HOMME POLITIQUE, HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, JACQUES CHIRAC (1932-2019)

Jacques Chirac (1932-2019)

JACQUES CHRIRAC (1932-2019)

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En dates

 1932 : naissance à Paris.

1956 : mariage avec Bernadette Chodron de Courcel. Le couple aura deux enfants, Laurence et Claude.

1957 : élève de l’ENA, puis chargé de mission au cabinet de Georges Pompidou.

1965 : élu conseiller municipal de Sainte-Féréole (Corrèze).

1967 : élu député, puis nommé au gouvernement.

1974 : nommé à Matignon après avoir soutenu Valéry Giscard d’Estaing contre Jacques Chaban-Delmas.

1975 : s’empare du parti gaulliste. 1976 : démissionne de Matignon et fonde le RPR.

1977 : élu maire de Paris. 1978 : lance l’appel de Cochin.

1981 : première candidature présidentielle (18 %, derrière Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand).

1986 : nommé premier ministre de cohabitation par François Mitterrand.

1988 : battu par François Mitterrand au second tour de l’élection présidentielle (45,98 %).

1992 : appelle à voter « oui » au traité européen de Maastricht.

1995 : élection à la présidence de la République (52,64 % face à Lionel Jospin).

1997 : dissolution de l’Assemblée nationale ; cohabitation avec le premier ministre PS Lionel Jospin. 2002 : réélu président de la République (82,21 % face à Jean-Marie Le Pen). Discours du Vél’ d’Hiv sur la responsabilité de la France dans la déportation des juifs. Discours au Sommet de la terre à Johannesburg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. »

2003 : s’oppose à la guerre américaine en Irak.

2007 : quitte l’Élysée après l’investiture de Nicolas Sarkozy. 2008 : crée la Fondation Chirac.

2011 : ne siège plus au Conseil constitutionnel, dont il est membre de droit en tant qu’ancien président de la République.

 

 Mémoires

Tome I, Chaque pas doit être un but, NiL Éditions, 2009.

Tome II, Le Temps présidentiel, NiL Éditions, 2011.

 Bibliographie

Henri Amouroux, Trois fins de règne [De Gaulle, Mitterrand, Chirac], JC Lattès, 2007.

Bruno Dive, Le Dernier Chirac, Duvernet, 2011.

Jean-Louis Debré, Le Monde selon Chirac, Tallandier, 2015.

FRANCE, HISTOIRE DE FRANCE, HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, JACQUES CHIRAC (1932-2019)

Jacques Chirac (1932-2019)

Mort de Jacques Chirac, les dates marquantes

CHRONOLOGIE L’ancien président de la République est décédé le 26 septembre à l’âge de 86 ans. De la Corrèze à l’Élysée, retour sur les instants marquants de sa vie.

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https://www.la-croix.com/France/Politique/Jacques-Chirac-dates-marquantes-2019-09-26-1201050136?htm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_content=20190926&utm_campaign=newsletter__crx_alert&utm_term=1795717&PMID=c36a145ebdfca921639f05a

AIX-EN-PROVENCE (BOUCHES-DU-RHÔNE), HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, HONORE-GABRIEL RIQUETI DE MIRABEAU (1749-1791), MARIE-MAGUERITE-EMILIE DE COVET DE MARIGNANE(1752-1800), MIRABEAU (comte de ; 1749-1791), PAROISSE DU SAINT-ESPRIT (Aix-en-Provence : Bouches-du-Rhône), SAINT-ESPRIT (paroisse ; Aix-en-Provence), SAINT-ESPRIT (paroisse du ; Aix-en-Provence), UN PAROISSIEN INATENDU AU SAINT-ESPRIT

Un paroissien inatendu au Saint-Esprit

 

Mirabeau-la Bourrasque se marie à Saint-Esprit…

ça promet !

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Le mariage de la Bourrasque

Mais l’église voit surtout se dérouler un grand moment, en ce jour de 23 juin 1772 : le mariage de Mirabeau ! Le comte de Mirabeau Gabriel-Honoré de Riquetti, 23 ans, se marie avec la demoiselle Marie-Marguerite-Emilie de Covet de Marignane, 19 ans !

La jeune fille est une riche héritière, courtisée par tout ce qui se fait de plus noble dans le pays. Mais elle a dit oui à celui qu’on surnomme monsieur de la Bourrasque, Mirabeau ! Incompréhensible… Emilie, si jolie, lui si moche ! Un visage à faire peur, ravagé par la petite vérole, une gueule effrayante qu’il décrit lui-même comme une « hure »… En plus, le monsieur a des mauvaises manières et il n’a pas un sou en poche.

Mais qu’est-ce qui a traversé la tête de leur fille pour aller s’amouracher d’un homme pareil, ont dû penser, effrayés, les parents d’Emilie en découvrant le carrosse de Mirabeau arrêté devant chez eux toute une nuit ? Là, ça suffit : on crie au scandale, il faut marier les deux jeunes gens. Chose faite en 1772 ! Mais les parents d’Emilie coupent les ponts et ne leur versent plus un kopeck.

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Tant pis ! Notre Bourrasque multiplie les dettes chez tous les commerçants d’Aix… Ce qui lui vaudra un emprisonnement au château d’If plus un divorce, en 1783. 6 ans plus tard, Mirabeau se fait élire aux Etats-Généraux…

 

https://fr.anecdotrip.com/anecdote/mirabeau-la-bourrasque-se-marie-a-saint-esprit-ca-promet-par-vinaigrette

 

 

Biographie de Mirabeau

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Ecrivain, journaliste et homme politiquerévolutionnaire
1749-1791    

Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau, plus connu sous de nom de Mirabeau, est né dans le château de Bignon-Mirabeau dans le Loiret. Souffrant de malformations physiques (un pied tordu, deux grandes dents et une énorme tête) et défiguré à l’âge de trois ans par la petite vérole, il compense sa laideur impressionnante par une remarquable intelligence et vivacité d’esprit.
Mirabeau étudie le droit à l’université d’Aix-en-Provence. Il mène une vie de débauche et a des relations très difficiles avec son père. Pour le soustraire à ses dettes ce dernier le fait enfermer plusieurs fois au fort de Vincennes. Après un exil au château de Joux (Jura), il s’enfuit en Hollande avec Sophie de Ruffey, épouse du marquis de Monnier. Condamné à mort par contumace, il est extradé en France et emprisonné pendant trois ans dans le fort de Vincennes où il écrit « Lettres à Sophie » et rencontre le marquis de Sade qui y est enfermé à cette époque.

Libéré en 1780, Mirabeau essaie de vivre en écrivant et publiant des textes politiques et notamment un Essai sur les lettres de cachet et les prisons d’État (1782). En 1786, Talleyrand lui obtient une mission secrète à Berlin, où il reste pendant six mois pour le compte du Contrôleur général des finances, Charles Alexandre de Calonne.

A la veille de la Révolution, rejeté par la noblesse, Mirabeau est nommé au Tiers-état d’Aix-en-Provence en 1789 puis à l’Assemblée nationale dont il devient l’un des plus illustres orateurs grâce à son éloquence hors du commun.

Il est l’auteur de la célèbre phrase prononcée pendant les États généraux, lors de la séance royale du 23 juin 1789 :
« Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté du peuple, et qu’on ne nous en arrachera que par la puissance des baïonnettes. »

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Mirabeau participe à la rédaction de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Avec Condorcet, La Fayette et l’Abbé Sieyès, il fait partie de la Société des amis des Noirs qui défend l’abolition de la traite des Noirs et la fin progressive de l’esclavage. Voulant réconcilier le roi et l’Assemblée nationale, il se montre favorable à une monarchie constitutionnelle forte pour laquelle il défend sans succès le véto absolu, tout en continuant à défendre le peuple. Il contribue à la nationalisation des biens du clergé.

Mirabeau meurt brusquement, usé par le travail et les excès, le 2 avril 1791 à l’âge de 42 ans. Sa mort est perçue comme un deuil national et son corps est amené en grande pompe au Panthéon. En 1792, on découvre par sa correspondance qu’il s’était rallié secrètement au roi Louis XVI qu’il informait et conseillait en échange d’argent pour payer ses dettes. Il est accusé de trahison et sorti du Panthéon en 1794.

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AIX-EN-PROVENCE (BOUCHES-DU-RHÔNE), HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, JEAN ESPARIAT (1747-1827), PAROISSE DU SAINT-ESPRIT (Aix-en-Provence : Bouches-du-Rhône), SAINT-ESPRIT (paroisse ; Aix-en-Provence), SAINT-ESPRIT (paroisse du ; Aix-en-Provence)

Jean Espariat (1747-1827)

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Jean Espariat (1747-1827)

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Espariat calmant les oppositions entre soldats de Royal-Vexin et Royal-Marine.

Jean Espariat (Aix-en-Provence, 17 septembe 1747 – 14 janvier 1827)) est un avocat français qui fut le premier maire de la ville d’Aix-en-Provence, commissaire du Roi pour la création du département des Bouches-du-Rhône, président du Tribunal civil du district d’Aix, député à l’Assemblée Législative, procureur général sous l’Empire et chevalier de la Légion d’honneur. Il reste célèbre pour son intervention courageuse ayant évité un massacre entre le régiment de Royal-Vexin et celui de Royal-Marine le 26 mai 1790.

 

Biographie

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Avocat au parlement d’Aix

Issu d’une ancienne famille provençale enrichie dans le commerce (soie, orfèvrerie, …) Jean Espariat est avocat au Parlement jusqu’aux  débuts de la Révolution française.

 Administrateur d’Aix lors de la Révolution

Jean Espariat est proclamé premier maire d’Aix le 10 février 1790 au soir avec 663 voix sur 858 votants, contre le président de la chambre des Comptes, Aides et Finances de Provence, M. d’Albert de Bornes, installé à sa charge le 21 février. En revanche, l’élection des onze officiers municipaux est plus laborieuse et nécessite quatre jours. Jean Espariat est rapidement confronté aux débordements révolutionnaires.

Le 26 mai 1790, le maire Espariat, considéré comme un homme d’ordre modéré, se rend célèbre en s’interposant courageusement, décoré de son écharpe, entre un régiment patriote, le Royal-Vexin et un régiment royaliste, le Royal-Marine, alors que ceux-ci allaient s’entre-massacrer sur le cours Saint-Louis à Aix. Se jetant entre les deux régiments, il s’écrie : « Non, citoyens, je ne serai point témoin d’un aussi horrible spectacle, non, je n’aurai pas la douleur de voir mes frères s’exterminer entre eux. Faites feu, et la première victime sera celui qui voulait rétablir la concorde ». Des gravures restituent cet acte héroïque. De cette manière, Espariat prouve à ses administrés qu’il ne laisse pas l’anarchie s’installer et sauvegarde la paix civile à Aix durant quelques mois encore.

Espariat administre Aix dans un contexte agité et doit endurer les attaques répétées des Antipolitiques (menés par l’abbé Rive, révolutionnaire forcené) qui forment la faction la plus avancée de la Gauche. Il est élu juge du Tribunal civil d’Aix à l’automne 1790 et se démet de ses fonctions de maire alors que des massacres se préparent à Aix. À l’époque de ces massacres qui emportèrent notamment son collègue l’avocat Pascalis, Espariat avait, depuis le 11 novembre 1790, remis ses pouvoirs au vice-maire Toussaint-Bernard Émeric-Davidqui eut certaines difficultés à justifier ces débordements tant le corps municipal d’Aix sembla passif en cette occasion.

Jean Espariat fut également, au printemps 1790, l’un des trois commissaires du Roi délégués à la formation du département des Bouches-du-Rhône avec l’abbé de Quinson, prévôt de l’église d’Arles, et d’Antoine Balthazar Joachim d’André, député à la Constituante.

 Député à la Législative

Les électeurs envoient Jean Espariat, alors président du Tribunal civil du district d’Aix, à l’Assemblée législative pour le département des Bouches-du-Rhône en septembre 1791. Député de la Plaine, Espariat prend notamment la parole pour condamner les crimes d’Avignon et demander le renvoi des responsables devant la Haute Cour de justice. Mais c’est à la commission des finances qu’il se rend le plus utile.

 Procureur général sous l’Empire

À l’expiration de son mandat législatif, le 20 septembre 1792, Jean Espariat revient à Aix et reprend ses anciennes fonctions judiciaires. Il est emprisonné sous la Terreur Sous le Directoire, Espariat est administrateur du département des Bouches-du-Rhône. Sous le Consulat, Bonaparte nomme Jean Espariat procureur général près la Cour de justice criminelle des Bouches-du-Rhône et l’Empire en fera l’un des premiers chevaliers de l’Ordre de la Légion d’honneur. Il est également membre de la société académique d’Aix. Il décède le 14 janvier 1827 dans sa ville natale.

Rue Espariat à Aix-en-Provence

Une rue historique de sa ville natale porte le nom d’Espariat en son souvenir. Cette rue est la réunion de deux rues qui, avant 1811, se nommaient « rue des Salins » pour la partie haute et « rue du Saint-Esprit » pour la partie basse. C’était à cette époque une des portes d’entrée dans la ville d’Aix-en-Provence. Au bas de la rue, en effet, se dressait la porte des Augustins qui permettait de pénétrer dans l’ancienne ville comtale d’Aix.

En séance du 24 juillet 1879, parmi d’autres « dénominations nouvelles de quelques rues ….
… Le Conseil (municipal) émet le vœu suivant :…
5°)  que la rue Grande Saint Esprit s’appelle rue Espariat ».
(Archives Communales, registre D1 26, page 163 verso).

De plus, il avait habité non loin de là au n° 4 de la rue du Trésor (actuelle rue Paul-Doumer)

Sa vie

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Né à Aix (paroisse St-Sauveur) le 17 septembre 1747, dans une ancienne famille provençale enrichie dans le commerce. (les ESPARIAT avaient des racines à Roumoules dans les Alpes de Hte Provence), il devint avocat.

En 1790, il se présenta aux élections municipales : Il devint alors le premier maire élu de la ville

Si l’élection de leur maire n’avait pas passionné les aixois, l’accueil qu’ils lui réservèrent fut enthousiaste : 

Relation de la fête du 21 février 1790, en l’honneur du maire et du corps municipal au complet : 
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… »on alla chercher le maire chez lui pour l’amener en cérémonie…. annoncé par les tambours de deux compagnies de la milice citoyenne devant la porte principale de l’hôtel de ville que le patriotisme des citoyens avait décoré de guirlandes….présentation des armes par la troupe, haie d’honneur de la milice citoyenne, applaudissements, cris de joie, sonneries de trompettes…. 
Le maire remercia, fit un discours promettant de se dévouer à sa tâche et prononça le « serment de maintenir de tout son pouvoir la Constitution, d’être fidèle à la Nation, à la Loy et au Roy et de bien remplir ses fonctions »…. puis tout le corps municipal se rendit en cortège à la messe, et  retour en cortège dans les rues de la ville avec apparition au balcon de l’hôtel de ville aux cris de  ‘Vive la Nation’,  etc….(AC Cérémonial d’Aix, registre AA55, pages 322 à 328).

Un mandat bref (de février à novembre 1790) mais fertile en péripéties

Voici ce que durent affronter en quelques mois le maire et ses conseillers :

– la gestion quotidienne des affaires de la ville avec des difficultés d’approvisionnement en blé, et le maintien de l’ordre public car cette pénurie était cause d’émeutes,
– des tracasseries administratives dues au démantèlement de tout l’ancien système et son remplacement par de nouvelles structures, de nouvelles lois à appliquer et des rapports à transmettre à l’Assemblée à Paris,
– des tensions politiques entre les Royalistes encore présents, le Club des Amis de la Constitution (en faveur d’une révolution raisonnée, dans la légalité) et celui des Antipolitiques (réclamant une révolution violente) fondé par l’Abbé Rive, qui échauffait les esprits.
– des événements qui reflétaient le trouble de l’époque : quelques émeutes dans Aix dues au prix élevé du blé, des émeutes aux Milles ou les femmes s’étaient révoltées contre le « piquet » (péage du grain), troubles occasionnés par les régiments en garnison à Aix et leurs démêlés avec les « Marseillais », assassinat de Monsieur d’Albertas et  
   exécution à Aix de son meurtrier Anicet Martel., etc…
– sans oublier la création du Département des Bouches-du-Rhône, et la dissolution du Parlement de Provence.

Outre sa compétence au quotidien, son courage dans des circonstances exceptionnelles est resté dans les mémoires :

Un acte héroïque : les événements des 25 et 26 mai 1790

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La ville était en effervescence depuis le 23 mai : des insultes avaient été échangées entre le régiment de Royal-Vexin en garnison à Marseille et celui de Royal-la-Marine, stationné à Aix. 
Ce dernier était accusé de « faits de barbarie » sur certains de ses soldats (l’un était à l’infirmerie avec une oreille coupée et trois autres étaient emprisonnés en attendant leur jugement). 
Espariat avait d’ailleurs décidé de faire partir ce régiment qui menaçait l’ordre public.

Mais le 25 mai, il fut informé de l’approche d’une troupe de soldats armés venant de Marseille, composée de grenadiers du Régiment Royal Vexin et de soldats de la Garde Nationale de Marseille, venant demander réparation de l’affront subi. Il fit en sorte de les empêcher d’entrer en ville et les fit loger dans une auberge pour la nuit. Les troupes de Royal-la-Marine, et celles du Lyonnais aussi présent à Aix, furent consignées. 

Dès l’aube du lendemain 26 mai, Jean Espariat et tout le conseil municipal, aidés par les soldats du Rgt Lyonnais et de la Garde Nationale, s’employèrent à apaiser les arrivants, dont le nombre avait décuplé pendant la nuit, et à satisfaire au mieux à toutes leurs exigences, notamment obtenir « la rétractation des Injures, et une déclaration d’attachement à la Constitution et aux principes de l’Assemblée Nationale », puis une entrevue solennelle à la maison commune, etc…Après un défilé en cortège dans les rues de la ville, les « marseillais » avaient enfin pris le chemin du retour lorsqu’ils décidèrent de vouloir récupérer les soldats emprisonnés.

A partir de ce moment la situation semblait échapper à tout contrôle. Divisés en petits groupes fortement armés, les marseillais convergeaient vers la caserne de la Charité, suivis par la population, dont de nombreuses femmes. Ils furent heureusement devancés par Jean Espariat qui les persuada de le laisser agir en intermédiaire pour présenter leur requête. Le Régiment de Royal-la-Marine au grand complet était massé en ordre de bataille, attendant l’affrontement. Jean Espariat obtint de pouvoir s’avancer avec trois officiers municipaux et réclamer les soldats emprisonnés, au nom de la municipalité. Les soldats lui furent enfin remis par le Major, contre une décharge, et chacun rentra chez soi. Il est certain que par son courage, Monsieur Espariat avait évité un bain de sang.

Au soir du 26 mai, les membres du conseil municipal assemblés après cette journée mouvementée décidèrent de « relater les événements graves qu’ils avaient vécus, ainsi que la conduite héroïque de leur maire, Monsieur Espariat, afin d’en informer l’Assemblée Nationale ». Ils en dressèrent donc un « verbal » de six feuillets (Archives Communales, LL 73, fin du registre).

L’imagerie populaire illustra aussitôt l’événement. Même si on veut y voir « le thème amplement  exploité : les cadres modérés se flattent de contrôler les « fureurs » et de tenir la balance égale entre les deux parties », (HISTOIRE D’AIX-EN-PROVENCE, planche 53), symbolisé de façon simpliste, les faits sont indiscutables : le courage et le sens du devoir de M. ESPARIAT furent exemplaires.

La règle de non-cumul des mandats le contraignit à démissionner

Le 13 novembre 1790  Jean ESPARIAT, venant d’être nommé juge au Tribunal du district d’Aix, il signa sa lettre de démission du poste de maire. BOUCHE fut élu le 15, « maire en remplacement », mais aussitôt remplacé par EMERIC-DAVID, « président en absence de Monsieur le Maire », et le 16 novembre EMERIC-DAVID devint « président par démission de Monsieur le Maire » (BOUCHE)
 (Archives Communales – LL 74, Délibérations du Conseil Municipal,  pages 40, 44 et 45).

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En 1791, il fut élu Président du tribunal civil du district d’Aix, puis député des Bouches-du-Rhône pour représenter notre département à l’Assemblée Législative à Paris en 1791 et 1792. Ensuite il revint à Aix où il reprit ses fonctions de magistrat. 
Le 25 prairial an XII (1804), Napoléon 1er le nomma Chevalier de la Légion d’Honneur.

En 1811, il devint Procureur général de la justice criminelle du département, et membre du Conseil de discipline et d’enseignement de l’école de Droit.

 Il décéda à Aix le 14 janvier 1827, en son domicile, 4 rue du Trésor (actuelle rue Paul-Doumer).

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<Sources : AD dépôt d’Aix (usuels) , AC Registres AA55, BB114, LL73, LL74
Bibliothèque Méjanes (usuels), Bibliothèque du Musée Arbaud 
    Internet : Wikipédia, Bibliothèque Nationale (site Gallica)
Ouvrages : Encyclopédie des Bouches-du-Rhône, Histoire d’Aix (Edisud)
Réalisation : Michèle Renoux AG13  2008

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BIOGRAPHIE DE PIERRE LAVAL, HISTOIRE DE FRANCE, HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, LIVRES, LIVRES - RECENSION, PIERRE LAVAL (1883-1945), POLITIQUE FRANÇAISE, POLITIQUE FRANCAISE

Une biographie de Pierre Laval

Pierre Laval, un mystère français,

Renaud Metz

Paris, Perrin, 2018.

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Après le Pétain[1] de Bénédicte Vergez-Chaignon, le monumental Pierre Laval de Renaud Meltz fera date. Pour retracer le destin du numéro 2 du régime de Vichy, l’auteur synthétise une masse peu commune de témoignages et d’archives. Il a écumé les papiers déposés par le clan Laval à la Fondation Josée et René de Chambrun, mais aussi des fonds diplomatiques, ministériels, judiciaires et policiers. Sont aussi épluchés la presse du temps, les biographies apologétiques ou à charge publiées du vivant de Laval, les journaux intimes des contemporains. Les documents vont des bulletins scolaires du jeune Pierre aux précieux souvenirs de Charlotte Charpentier, sa discrète maîtresse, fortuitement redécouverts. En passant par les innombrables lettres de sollicitation, soutien ou blâme, reçues par l’Auvergnat au cours de sa longue carrière. Des notes saisissantes de début juillet 1940 montrent comment Laval liste, cerne et entreprend chaque parlementaire à qui il veut faire voter le suicide de la République.

Le lecteur fera ses délices de ce travail riche et complet, aux analyses fines, à l’écriture fluide et agréable, à l’architecture habile. Chercheur ou amateur passionné, il suivra Laval pas à pas, parfois heure par heure (vote du 10 juillet 1940, Montoire, attentat du 27 août 1941, intrigue ultime en se servant d’Herriot à la veille de la libération de Paris, procès et exécution). Loin du biographisme pur, le livre reconstitue les forces qui appuient ou contestent Laval à chaque étape. L’ouvrage reconstitue ses réseaux de fidèles et d’agents (il n’a pas d’amis), ses clientèles (l’élu du Puy-de-Dôme et d’Aubervilliers rend constamment service, jusque sous l’Occupation), ses soutiens et adversaires dans la classe politique et dans l’opinion, sa perception par la presse nationale et étrangère. À travers le livre défile ainsi toute une galerie de journalistes, diplomates, hauts fonctionnaires ou hommes d’État. Tantôt le lecteur comprend que bien des erreurs de Laval se révèlent assez partagées du temps, tantôt il saisit que son aveuglement et son isolement sortent de l’ordinaire. 

On redécouvre l’enfance du fils d’un aubergiste de Châteldon (Puy-de-Dôme), qui n’est pas si désargenté qu’il voudra bien le dire. Disgracié par ses origines modestes, sa laideur physique et ses manières mal dégrossies, l’ambitieux précoce prend sa revanche en jouant de ses capacités de charme. Dès avant 1914, il est l’un des plus jeunes avocats de France, l’un des plus jeunes députés socialistes, et un pacifiste inscrit au carnet B des personnes à arrêter en cas de conflit. Dès ses jeunes années de pion en collège puis d’avocat, il est habitué à négocier et à ne raisonner qu’en terme d’intérêts, d’échanges de biens ou de services rendus : les idées abstraites lui sont étrangères, tout comme les valeurs morales ou religieuses (superstition et astrologie exceptées). Le « maquignon » ne peut dès lors aimer le conflit ni a fortiori la guerre, ce gâchis où nul n’a rien à gagner : sa répulsion pour la guerre et pour l’armée est l’un des rares invariants de sa vie entière.

Ne sacrifiant pas à la logorrhée patriotique en 1914-1918, Pierre Laval n’en est pas moins un assoiffé de pouvoir qui mange à tous les râteliers : le pacifiste quasi défaitiste épargne et renseigne en sous-main le gouvernement jusqu’au-boutiste de Clemenceau, dans l’espoir de l’intégrer. Au début des années 1920, quittant la SFIO en silence, il n’évolue que progressivement et imperceptiblement vers la droite : le ministre de la deuxième moitié de la décennie est encore perçu comme un socialiste indépendant, le président du Conseil de 1931 comme un rassembleur à la charnière des droites et des gauches, et ce n’est qu’au terme de son dernier gouvernement d’avant-guerre qu’il se retrouve définitivement classé à droite, à la suite de la déflation de 1935-1936.

Manœuvrier habile, le disciple autoproclamé d’Aristide Briand sait aussi précipiter la retraite de ce dernier en torpillant en coulisses son élection à la présidence de la République (1932). Il se fait tour à tour ennemi ou allié de circonstance de Caillaux, Herriot, Flandin ou Daladier, et c’est dès le milieu des années 1930 qu’il songe au maréchal Pétain pour couvrir de son prestige un gouvernement aux pouvoirs renforcés, dont lui-même serait le chef réel. Indéniable charmeur, Laval sait retourner par sa gouaille et ses boniments aussi bien des parlementaires méfiants que des syndicalistes hostiles ; en avril 1945, en pleine débâcle du Reich, il persuade encore des requis du Service du travail obligatoire (STO) qu’il a évité le pire.

Dans l’entre-deux-guerres, Laval ménage assez les notables et les électorats de tous bords pour être constamment réélu dans la banlieue populaire d’Aubervilliers ; il se l’attache par une vaste œuvre sociale et de travaux publics. Ministre du Travail en 1930, il est l’un fondateur de l’État-Providence par ses lois sur les assurances sociales, malgré la violente opposition conjointe de la bourgeoisie et… du mouvement ouvrier, inquiet du caractère obligatoire des cotisations. Au pays natal, le clientéliste devient un puissant patron de presse et un riche homme d’affaires. Il est des rares politiques du temps à accumuler une fortune aussi colossale en partant de si peu. Après enquêtes minutieuses, l’historien ne peut conclure avec certitude à une malhonnêteté pénalement répréhensible, mais « défenseur des profiteurs de guerre, spéculateur favorisé par des prêts complaisants et probablement jamais remboursés, ministre corruptible, trafiquant d’influence, il a fait feu de tout bois, tôt affranchi de la morale et de la loi » (p. 268).

Cette fortune lui permet d’accéder à un mode de vie petit-bourgeois assumé, mais aussi d’assouvir sa passion sincère pour la terre et l’agriculture. Le notable qui a pu racheter le château de sa commune natale peut aussi faire faire en 1935 un beau mariage à Josée, sa fille unique. René de Chambrun joue par la suite un grand rôle dans les intrigues politiques et financières de son beau-père ; il est l’intermédiaire-clé entre lui et Pétain, puis gère à Vichy sa propagande personnelle.

Brouillon et superficiel, Laval marche à l’intuition, sans connaissance approfondie des dossiers, et sans écouter de conseil. Il ignore l’histoire, la géographie ou la stratégie, et sa vision est étroitement hexagonale (l’Empire n’est qu’une monnaie d’échange). Incapable de penser la nouveauté (il n’est pas le seul), il ne perçoit jamais que la déflation est une politique économique anachronique, que l’Italie du Duce a rejoint l’Axe sans retour, que l’Allemagne d’Hitler n’est pas celle de Weimar, que l’épuration en 1945 n’est pas le procès de Caillaux ou Malvy en Haute Cour après 1918.

Pragmatique pur, cet amoral n’a aucune doctrine. Tout n’est pour lui que négociations matérielles et question d’intérêts. Il ne veut préserver de la France que son patrimoine matériel et humain, pas son honneur ou ses valeurs humanistes. Il ne croit pas à la Société des Nations (SDN), a cessé tôt d’être internationaliste et la guerre ne le dérange pas si c’est la lointaine Éthiopie qui est agressée par son ami Mussolini (1935). Il ne voit pas la démocratie comme un universel, et s’en détache peu à peu dans les années 1930. L’antifascisme se réduit pour lui à un risque de compromettre cette alliance italienne qui est son obsession de 1935 à 1940. Le communisme répugne à son individualisme de parvenu, mais il ne devient pas plus fasciste, nazi ou pétainiste : à Vichy, il méprise la Révolution nationale et maintient des références à la République et au socialisme.

Dès avant-guerre, Laval tend à tout céder sans contrepartie, en espérant que sa démonstration de bonne volonté lui vaudra des renvois d’ascenseur jamais survenus. Jamais il ne se laisse décourager par les démentis du réel. Confiant jusqu’à la présomption en son pouvoir de séduction, il croit que tout s’arrangera toujours en s’expliquant avec l’interlocuteur, en jouant des relations personnelles et des négociations bilatérales. En 1935, le premier dirigeant français reçu en URSS ne fait rien pour établir une vraie alliance franco-soviétique, au demeurant refusée aussi par une large part de l’opinion, par le Quai d’Orsay et par l’armée : tous jugent le pays des Soviets peu fiable et craignent qu’il n’entraîne la France dans un conflit anti-allemand. En revanche, Laval tient des propos pro-allemands au Haut Comité militaire, devant un général Gamelin bouleversé. Une simple discussion avec Göring, aux obsèques de Pilsudski à Cracovie, suffit à lui faire croire durablement qu’une entente est possible avec ce Reich dont il prend les protestations pacifistes pour argent comptant. Par ses ambiguïtés délibérées, il laisse croire à Mussolini qu’il a les « mains libres » pour envahir l’Éthiopie – Laval espérait qu’il se cantonne à une mise sous influence. Il n’y gagne que de se démonétiser sans retour aux yeux du Duce lorsque son gouvernement est bien obligé de voter les (médiocres) sanctions contre l’Italie, par fidélité à l’alliance britannique. Ultérieurement, son soutien obstiné à l’Italie ne lui vaut même pas la gratitude de Rome, qui le récuse comme ambassadeur ou intermédiaire potentiel. Antimunichois inattendu en 1938, mais défaitiste en 1939-1940, Laval se croit l’homme clairvoyant et indispensable : sa mission serait de réparer une situation que ses ennemis auraient gravement compromise en l’évinçant. Il n’admet jamais n’avoir en fait rien obtenu avant janvier 1936 – ou avant le renvoi humiliant du 13 décembre 1940 –, ni que son maintien au pouvoir n’aurait pas rapporté davantage à la France.

Empli de rancœur, revanchard, Laval est en juin-juillet 1940 à la pointe du défaitisme et de l’anglophobie, il est le liquidateur empressé de la République – alors que Pétain et maints ministres ne croyaient pas que le Parlement accepterait de se suicider et se seraient accommodés de sa simple mise en sommeil. Il est le premier à réclamer le procès des « responsables de la défaite » et il est prêt à une législation autoritaire, antisémite et antimaçonnique pour rapprocher la France du modèle des vainqueurs. Avec plus de zèle qu’aucun ministre, il est « l’inventeur de la collaboration », jamais définie précisément. Aucun fiasco ne lui fait jamais saisir que le Reich n’y voit qu’un encouragement à toujours exiger plus. Étant le plus expérimenté au sein de l’État français et s’étant arrogé le monopole des relations avec l’Allemagne, il se croit incontournable et ne voit pas venir la disgrâce du 13 décembre 1940. Il revient au pouvoir après l’échec de Darlan, faute d’alternative, et en faisant croire qu’il a le soutien de l’Allemagne, ce qui est initialement faux (avril 1942).

Avec le STO et la fondation de la Milice, la livraison des juifs de France accable le plus sa mémoire. L’auteur démontre un Laval dissimulateur et indifférent au sort de ceux qu’il livre, inhabituellement hostile aux « déchets » étrangers. Tout à son approche « nationalitaire », Laval sacrifie les juifs étrangers non couverts par d’autres pays, dans le vain espoir de préserver les juifs français. Il ne songe pas à se retrancher derrière le droit d’asile qui lui fait obligation de protéger aussi quiconque a placé sa confiance en la France. Il ne veut pas considérer que la fermeté aussi peut payer : ce qui se vérifie pourtant fin 1942, lorsque sans grande réaction ni représailles des Allemands, il ralentit la coopération aux déportations, par peur des réactions de l’opinion, ou lorsqu’il louvoie avec succès, en 1943, pour ne pas dénaturaliser les juifs français. Si à l’été 1942, Laval livre aussi les enfants, initialement non demandés par les nazis, ce n’est pas par souci de ne pas séparer les familles, mais par peur que l’atteinte à leur unité choque la population, et faute de savoir que faire d’eux. S’il n’a pas connaissance des modalités exactes de la Solution finale, il soupçonne bel et bien un sort plus tragique que la simple transplantation qu’il dépeint à ses interlocuteurs : tandis que son féal chef de la police René Bousquet affirme froidement à l’archevêque de Paris que les Juifs sont « destinés à disparaître du continent », Laval convient avec la Gestapo des éléments de langage qui permettront de cacher la vérité à la population.

Fin août 1944, seul l’exil forcé en Allemagne le convainc de faire enfin la grève de l’action politique. Bouté hors de l’ingrate Espagne franquiste, il préfère se livrer à la France que finir sa vie en fuite, en Irlande ou ailleurs. Le naufrage de son procès inspire une prompte réforme de la Haute Cour, mais nul ne conteste le verdict de mort en soi, tant l’homme est de longue date le plus haï de France. Son rival Monzie l’avait cruellement comparé à un mulet : têtu et stérile. De fait sa descendance physique s’arrête avec sa fille, et politiquement, nul ne se revendiquera jamais de sa figure ni de son héritage. Laval espérait qu’au moins, la postérité le réhabiliterait et lui donnerait tardivement raison. Une fois de plus, il se berçait d’illusions.

 

Notes :

[1] Bénédicte Vergez-Chaignon, Pétain, Paris, Perrin, 2014.

 

http://histoire-politique.fr/index.php?numero=37&rub=comptes-rendus&item=697&fbclid=IwAR3R2dPyiunzUBnLZVdUo7GsBoLKl6U1xwk0hJ_D23it8awTPjw8PVeLOqA

HOMME POLITIQUE FRANÇAIS, MICHEL ROCARD (1930-2016)

MICHEL ROCARD (1930-2016)

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Michel Rocard (1930-2016)

Michel Rocard fait ses premiers pas en politique en s’engageant contre la guerre d’Algérie. En 1958, il rejoint les bancs du Parti Socialiste Autonome (PSA) dont il sera secrétaire général en 1967. Après la défaite du Général de Gaulle lors du référendum de 1969 il se présente à l’élection présidentielle où il recueille 3,61% des suffrages. Cette même année il devient député dans les Yvelines  (un poste qu’il gardera jusqu’en 1973). Après avoir fondé le PSU il finit par rejoindre le Parti Socialiste. Avant d’entamer une carrière ministérielle il briguera avec succès des mandats locaux : ainsi il sera successivement élu maire de Conflans-Sainte-Honorine , député de cette même circonscription dans les années 1970.

Quand la gauche arrive au pouvoir en 1981 avec l’élection de François Mitterrand comme Président de la République il devient dans le gouvernement de Pierre Maurois ministre d’État, ministre du Plan et de l’aménagement du territoire jusqu’en 1983. Il est ensuite nommé ministre de l’Agriculture, poste duquel il démissionnera en 1985. En 1988 il devient Premier ministre et son action est marquée par l’instauration du RMI (Revenu du Minimum d’Insertion en lieu et place du SMIC), de la CSG, et surtout il sera l’homme de la situation pour la signature des Accords de Matignon qui mettent fin à la crise de la Nouvelle-Calédonie.  En profond désaccord avec François Mitterand il doit démissionner de son poste de Premier ministre en 1991.

Il redevient premier secrétaire du PS en 1993 mais démissionne l’année suivante. En 2009, il démissionne du Parlement européen sous les applaudissements de ses confrères et créé en 2012 le « Collectif Roosevelt 2012 » avec Stéphane Hessel. En 2013 il prédit la fin de la croissance dans un essai intitulé « La gauche n’a plus droit à l’erreur »  (co-écrit avec l’économiste Pierre Larrouturou). En 2013, Michel Rocard se positionne contre le projet de loi sur le mariage homosexuel. 

 Fonctions antérieures :

inspecteur des finances, secrétaire général des comptes et des budgets économiques de la nation, secrétaire général du Parti socialiste unifié, député de la 4e circonscription des Yvelines, secrétaire national du PS, membre du bureau exécutif du PS, maire de Conflans-Sainte-Honorine, député de Conflans, ministre d’Etat, ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire, ministre de l’Agriculture, premier ministre, député européen, sénateur SOC des Yvelines, conseiller municipal de Conflans, conseiller régional d’Ile-de-France, premier secrétaire du PS

 Quelques dates

 1930 (23 août) : Naissance à Courbevoie.

Le 30 novembre 1988 : 1988 : Vote sur le RMI (Revenu Minimum d’Insertion)

Le 15 mai 1991 : Il donne sa démission de Premier ministre. Après trois ans passés à la tête du gouvernement, Michel Rocard est contraint à la démission par Mitterrand à cause de nombreuses divergences avec le Président. Cependant il restera comme celui qui a instauré le RMI et la CSG et surtout comme l’instigateur des Accords de Matignon qui règlent rapidement la crise de la Nouvelle-Calédonie

De part ses prises de positions il sera appelé « l’homme de la deuxième gauche »